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Suppression de la taxe professionnelle - Le Sénat adopte sa version du volet entreprises

Le Sénat a voté ce week-end la suppression de la taxe professionnelle avec la volonté de défendre les intérêts des collectivités. Contre l'avis du gouvernement, il a étendu l'assiette de la cotisation sur la valeur ajoutée, sans toutefois revenir sur le barème de l'impôt. La Haute Assemblée examinera dans moins de deux semaines le volet de la réforme concernant la répartition des ressources des collectivités.

Vent de fronde au Sénat. A l'occasion de la discussion ces 20 et 21 novembre de l'article 2 du projet de loi de finances pour 2010, les sénateurs de la majorité ont à plusieurs reprises marqué leur désaccord avec le gouvernement.
Contre l'avis de celui-ci, ils ont adopté un amendement du rapporteur général de la commission des finances, Philippe Marini, qui instaure pour toutes les entreprises dont le chiffre d'affaires est compris entre 500.000 euros et 2 millions d'euros une cotisation minimale de 250 euros d'imposition sur la valeur ajoutée. 235.000 entreprises sont concernées. L'amendement ne supprime toutefois pas l'abattement de 1.000 euros mis en place par les députés. Il gomme seulement ses effets les plus critiqués, à savoir l'exonération totale d'imposition sur la valeur ajoutée pour les entreprises dégageant un chiffre d'affaire inférieur à 1,1 million d'euros.
Gérard Longuet, président du groupe UMP, qui avait appelé ses troupes à la loyauté avec le gouvernement, n'a pas été entendu.
Les sénateurs ont aussi rejeté un amendement du gouvernement tendant à lier en 2010 les taux des impôts payés par les ménages et ceux que versent les entreprises. Cette mesure est "un point important de la réforme auquel le gouvernement tient tout particulièrement", avait pourtant déclaré plus tôt la ministre de l'Economie. "Nous sommes en présence de ce qu'il faut bien appeler un désaccord de fond. Il y a une divergence d'analyse entre la commission [des finances du Sénat] et le gouvernement", a conclu le rapporteur général. Le vote qui devait intervenir le matin a, du coup, été renvoyé à l'après-midi, le temps pour la majorité sénatoriale de proposer un compromis.

 

Impôt sur la valeur ajoutée : le plafond maintenu à 3,5%

Ce compromis prévoyait de maintenir la déliaison entre les taux des impôts des ménages et les impôts des entreprises, mais d'en limiter la portée. Selon l'amendement présenté par le rapporteur général, la limite de l'augmentation du taux de la taxe professionnelle est réduite à 1,25 fois le taux moyen pondéré de la taxe d'habitation et des taxes foncières (contre 1,5 fois auparavant) et, désormais, des cotisations foncières des entreprises. Malgré l'avis défavorable du gouvernement, les sénateurs ont adopté cette solution, à l'unanimité.
Autre surprise, un amendement du RDSE visant à maintenir le plafonnement actuel de 3,5% sur l'imposition de la valeur ajoutée (contre 3% voulu par le gouvernement) a été voté. Le gouvernement devrait toutefois demander une deuxième délibération sur cet amendement. Le coût pour les finances publiques du plafonnement à 3%, au lieu de 3,5%, était évalué à 255 millions d'euros.
Les sénateurs ont donc clairement montré qu'ils n'entendaient pas suivre le gouvernement sur tout. Mais ils ont adopté l'article 2 sans difficulté. Il faut dire qu'ils ont repoussé les dispositions sur les ressources des collectivités à l'examen de la seconde partie du projet de loi de finances, qui débute le 6 décembre. Ils ont aussi instauré "deux rendez-vous législatifs" pour revenir éventuellement sur ce dossier, l'un avant le 31 juillet 2010, l'autre après le vote de la loi sur les compétences des collectivités territoriales. L'adoption de ce calendrier a pour effet d'apaiser les sénateurs de la majorité qui, autour de Jean-Pierre Raffarin, avaient montré leur désaccord avec le gouvernement.

 

Péréquation : rien ne change en 2010

Pour le reste, les sénateurs ont adopté de nombreuses dispositions techniques. Certaines précisent les règles de la territorialisation de la valeur ajoutée. Les sénateurs ont retenu, en ce domaine, deux critères : les effectifs, pour moitié, et le foncier non-industriel, pour l'autre moitié. Toutefois, afin de maintenir la "prime" aux communes qui acceptent d'accueillir des établissements industriels, leurs immobilisations sont prises en compte à hauteur du tiers lorsqu'elles représentent une part importante des bases foncières d'une entreprise.
En matière de péréquation, les sénateurs ont décidé de geler pour 2010 le fonctionnement des fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle. Les modalités de fonctionnement du fonds ne changeront donc pas l'année prochaine. Les conseils généraux disposeront des mêmes marges de manœuvre qu'aujourd'hui. Les sénateurs ont aussi supprimé les fonds départementaux de péréquation des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) qui avaient été créés par les députés.
On retiendra par ailleurs la nouvelle appellation donnée par le Sénat aux impôts qui vont remplacer la taxe professionnelle. La contribution économique territoriale sera constituée de la cotisation foncière des entreprises (et non plus cotisation locale d'activité) et de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (et non plus cotisation complémentaire). Deux nouveaux termes qui ont le mérite d'être plus clairs que ceux qui avaient été imaginés par Bercy, Christine Lagarde en convenant elle-même.

 

Thomas Beurey / Projets publics