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La label de la Fondation du patrimoine bientôt étendu aux petites villes

Une proposition de loi adoptée à l'unanimité au Sénat en première lecture entend "rendre plus efficaces les actions de sauvegarde du patrimoine culturel local et de revitalisation des centres-bourgs/centres-villes confiées à la Fondation du patrimoine".  Elle étend le champ d'application du label aux petites villes jusqu'à 20.000 habitants et aux parcs et jardins remarquables, réforme le conseil d'administration et autorise la réaffectation des dons non utilisés.

Le Sénat a adopté à l'unanimité, en première lecture, la proposition de loi "visant à moderniser les outils et la gouvernance de la Fondation du patrimoine". Le texte était présenté par Dominique Vérien, sénatrice (Union centriste) de l'Yonne, et une soixantaine de ses collègues. L'objectif affiché est "de rendre plus efficaces les actions de sauvegarde du patrimoine culturel local et de revitalisation des centres-bourgs/centres-villes confiées à la Fondation du patrimoine, en apportant des modifications à sa gouvernance et ses outils définis dans ses statuts".

Créée par la loi du 2 juillet 1996 relative à la Fondation du patrimoine et reconnue d'utilité publique un an plus tard, la Fondation est une personne morale de droit privé à but non lucratif, qui accompagne les particuliers, les collectivités territoriales et les associations dans des projets de restauration du patrimoine de proximité (plus précisément du patrimoine non protégé au titre des monuments historiques). Depuis vingt ans, elle a participé à plus de 30.000 projets de sauvetage et de mise en valeur du patrimoine local.

Dans le cadre de sa mission en faveur du patrimoine de proximité, elle peut délivrer un label "Fondation du patrimoine" qui permet à des propriétaires privés, dans certaines conditions, de déduire de leurs revenus 50% du montant des travaux de restauration des biens concernés. Entre 1.000 et 1.200 labels sont délivrés chaque année.

Fin 2017, elle s'est vu confier la gestion des recettes perçues sur le Loto du patrimoine, qui doivent financer la restauration des sites en péril identifiés comme prioritaires par la mission portée par Stéphane Bern.

Une extension du champ du label

La proposition de loi adoptée par le Sénat apporte plusieurs assouplissements aux règles régissant la Fondation, afin de faciliter et d'étendre ses interventions. Ainsi, elle précise le champ d'application du label attribué par la Fondation. Celui-ci peut être attribué "aux immeubles non protégés au titre des monuments historiques, bâtis ou non bâtis, situés dans les zones rurales, bourgs et petites villes de moins de 20.000 habitants [contre 2.000 actuellement, Ndlr], dans les sites patrimoniaux remarquables et dans les sites classés au titre du code de l'environnement. Les immeubles non habitables ne sont pas soumis à ces restrictions géographiques". Les travaux réalisés sur les immeubles, visibles de la voie publique, ayant reçu le label mentionné sont déductibles de l'impôt sur le revenu (sous réserve d'une subvention de la Fondation dont le montant ne peut être inférieur à 2% du coût des travaux). En outre, en évoquant les "immeubles non bâtis", le texte élargit, de fait, l'intervention du label aux parcs, aux jardins ou au patrimoine industriel.

Cette extension entraînera "une hausse de la dépense fiscale raisonnable, de 6,4 millions d'euros", pour un volume d'interventions de la Fondation doublé, a estimé le ministre de la Culture, Franck Riester, ajoutant que l'élargissement au patrimoine des communes de moins de 20.000 habitants "était très attendu dans le cadre du programme de revitalisation des centres-bourgs, en lien avec le programme 'petites villes de demain' porté par Jacqueline Gourault". "Cette extension cependant ne doit pas se faire au détriment du patrimoine rural, la Fondation nous l'a garanti", a relevé Philippe Nachbar, sénateur LR de Meurthe-et-Moselle.

Outre la suppression de diverses dispositions inutilisées de la loi de 1996, la proposition de loi apporte également des modifications à la composition du conseil d'administration de la Fondation. En particulier, elle supprime la présence obligatoire d'un député et d'un sénateur, mais précise en revanche que le conseil doit comprendre des "représentants des collectivités territoriales permettant d'assurer la représentation des communes rurales, des communes, des départements et des régions". Elle précise également que les représentants des fondateurs, mais aussi des mécènes et des donateurs, doivent détenir ensemble la majorité des sièges du conseil.

Passer outre la volonté des donateurs ?

Le seul point polémique du texte, qui n'a pas empêché l'adoption sans difficulté de la proposition de loi, concerne l'article 5 sur la réaffectation des dons lorsque le projet de restauration ayant fait l'objet d'une campagne de mécénat n'a finalement pas abouti. A ce jour, la Fondation du patrimoine compte en effet près de 10 millions d'euros bloqués sur ses comptes du fait de projets à l'arrêt depuis plus de 5 ans.

La proposition de loi prévoit donc que ces fonds "peuvent être réaffectés à un autre projet de sauvegarde du patrimoine, sous réserve que les donateurs en aient été préalablement avertis lors de l'affectation de leur don". Cette réaffectation est possible soit au terme d'un délai de cinq ans après la conclusion de la convention signée avec le maître d'ouvrage, soit à l'achèvement des travaux, "lorsque le projet n'a pas été réalisé conformément au dossier présenté par le maître d'ouvrage et validé par la Fondation du patrimoine".

Ce même article prévoit que "les surplus de dons collectés par la Fondation du patrimoine dans les mêmes conditions que celles prévues au I peuvent être réaffectés à un autre projet de sauvegarde du patrimoine, sous réserve que les donateurs en aient été préalablement avertis lors de l'affectation de leur don, lorsqu'il est constaté, à l'achèvement des travaux, qu'un montant excédentaire de dons a été perçu par rapport au coût effectif des travaux".

Lors de l'examen du texte en commission, le gouvernement a présenté un amendement de suppression de l'article 5 en faisant valoir, non sans raison, que "la rédaction de cet article méconnaît le principe du consentement du donateur". Une simple information préalable n'étant pas suffisante, l'article encourt clairement un risque d'inconstitutionnalité. La commission a toutefois rejeté cet amendement de suppression. Aucun nouvel amendement n'ayant été déposé sur le texte pour le passage en séance publique, la discussion s'en est tenue aux explications de vote. A cette occasion, Franck Riester a redit qu'il faudra profiter de la navette "pour trouver une solution, car l'intention des donateurs est un principe essentiel du mécénat".

Références : proposition de loi visant à moderniser les outils et la gouvernance de la Fondation du patrimoine (adoptée en première lecture par le Sénat le 23 octobre 2019).

 

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