Environnement - Le nucléaire, sujet tabou pour deux Français sur trois

Deux Français sur trois considèrent le nucléaire comme un sujet tabou, selon un sondage* effectué par l'Ifop pour l'Association des commissions locales d'information sur la sûreté nucléaire (Anccli) publié ce 8 juillet. Interrogés sur les mots qu'ils associent en priorité au nucléaire, 48% des Français citent d'abord le mot "électricité", 41% le mot "centrale" et 32% le mot "déchet". Seuls 15% des sondés mentionnent le mot "accident" et 9% le mot "progrès". Les jeunes et les personnes résidant à moins de 20 km d'une centrale nucléaire sont plus nombreux que la moyenne à associer le mot "déchet" au nucléaire (respectivement 39% et 42% des citations).
A la question "En cas d'accident nucléaire, quelle est, selon vous, la distance de sécurité à observer pour préserver la population de toute conséquence ?", les Français semblent très partagés. 32% d'entre eux considèrent que le périmètre de sécurité autour d'une centrale en cas d'accident nucléaire s'étend de 100 à 249 kilomètres, un tiers indique une distance inférieure à 100 km et un tiers une distance supérieure à 250 kilomètres. En moyenne, les Français situent cette distance de sécurité à 330 km. Mais ceux qui résident à moins de 20 km d'une centrale l'estiment en moyenne à 489 km.

"Un sujet à la fois sensible et flou"

"Les résultats de ce sondage attestent du manque d'information des Français à l'égard du nucléaire", souligne l'Anccli, qui fédère les 37 commissions locales d'information (CLI) existant auprès de chaque installation nucléaire et composées chacune de quatre collèges - élus, représentants d'associations de protection de l'environnement, des syndicats de salariés du nucléaire et d'experts (scientifiques, médecins, chefs d'entreprises, universitaires, etc.). Pour l'association, les réponses à la question sur la distance de sécurité montrent que les Français n'ont pas conscience d'habiter, en réalité, et quel que soit leur lieu de résidence, à moins de 200 km d'un site nucléaire. Plus de 25 ans après la catastrophe de Tchernobyl, le nucléaire reste ainsi "un sujet à la fois sensible et flou, en particulier s'agissant de la sûreté nucléaire", souligne l'Anccli. Plus grave à ses yeux : "les résultats du sondage démontrent qu'en matière nucléaire, la culture du risque n'est pas clairement intégrée par la population française." Or, souligne Jean-Claude Delalonde, président de l'Anccli, "l'accident de Fukushima a démontré qu'une véritable veille citoyenne était indispensable, même dans les pays démocratiques où règne l'excellence technologique. Dans le contexte de la gouvernance des activités nucléaires, en particulier dans le domaine de la sûreté et de la gestion des déchets nucléaires, la vigilance de la société civile est une nécessité." L'Anccli voit aujourd'hui dans le futur projet de loi sur la transition énergétique un moyen de renforcer l'information puisqu'il prévoit déjà que les CLI organisent au moins une fois par an une réunion publique et que l'exploitant informe régulièrement les riverains des centrales sur les mesures de sécurité et les conduites à tenir en cas d'accident.

Anne Lenormand


*Sondage réalisé du 20 au 21 mai 2014 auprès d'un échantillon de 1.200 personnes, représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus.