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Elus - Le non-cumul des mandats obtient la majorité absolue à l'Assemblée

Le projet de loi sur le cumul des mandats, qui interdira à un parlementaire d'exercer, à compter de 2017, une fonction exécutive locale, a passé ce mardi 9 juillet le cap du vote de l'Assemblée nationale, par 300 voix contre 228.
Durant les quatre séances consacrées à la réforme, toute la droite a fustigé un texte qu'elle juge contre-nature. Avec, en poupe, des élus relativement jeunes tels que le député des Yvelines Jean-Frédéric Poisson ou, très en verve, le député-maire UDI de Drancy (93), Jean-Christophe Lagarde. Les élus de gauche opposés au non-cumul se sont en revanche faits fort discrets.
Le texte sera vraisemblablement rejeté à l'automne au Sénat. Il devra donc revenir en seconde lecture à l'Assemblée, où une majorité absolue des députés devra le voter pour qu'il soit définitivement adopté puisqu'il s'agit d'une loi organique. Le seuil de la majorité absolue de 289 sièges ayant été nettement dépassé dès la première lecture, cela semble désormais possible.
Pour éviter une fronde de ceux des députés socialistes pour lesquels le non-cumul "reste en travers du gosier", l'entrée en application de la future loi a été fixée en 2017 et non en 2014 ou 2015 comme le souhaitaient les écologistes et certains socialistes. "Il n'était pas possible d'appliquer cette réforme en 2014 pour des raisons politiques évidentes que j'assume", a ainsi déclaré le ministre de l'Intérieur, Manuel Valls, lors du débat, débat durant lequel il a régulièrement appelé, tout comme le rapporteur PS Christophe Borgel, à préserver "l'équilibre" du texte.
Comme prévu, les députés du MRC, bien qu'apparentés au PS, ont voté contre une réforme qui va "sacrifier" le député-maire, tout comme les radicaux de gauche qui parlent d'un "vaste hara-kiri". Ecologistes et Front de gauche ont en revanche apporté leurs suffrages au texte.

"Vous ne voulez plus d'ancrage local"

L'argumentaire des opposants à la réforme est connu. Il a été récurrent. "J'ai l'impression que nous tournons toujours autour des mêmes arguments, cela commence à devenir lassant", s'est d'ailleurs plaint le député socialiste du Cantal Alain Calmette. Cet argumentaire fut par exemple celui d'Annie Genevard, député-maire UMP de Morteau (Doubs) : "Vous affirmez qu'un ancrage local est nécessaire, mais vous en empêchez à peu près toutes les applications : aux fonctions de chef de l'exécutif, mais aussi de membre des exécutifs. En quoi un poste d'adjoint ou de maire délégué d'une petite commune empêcherait-il d'être un parlementaire ? De même pour une fonction de vice-président d'un syndicat mixte de pays, par exemple. En réalité vous ne voulez plus d'ancrage local ! Vous voulez le mandat unique qui ne dit pas son nom."
Cette ligne fut aussi celle, naturellement, du patron des députés UMP, Christian jacob : "Imaginez ce que seront les débats sur l'urbanisme, les métropoles ou l'intercommunalité par exemple, le jour où plus un seul parlementaire n'exercera un exécutif local. Quelles âneries voterons-nous ? Personne ne pourra plus en effet témoigner ici de son expérience sur le terrain." "Nous ne sommes pas en train de demander qu'il n'y ait qu'une assemblée d'élus locaux, nous cherchons à vous empêcher de faire en sorte qu'il n'y ait plus d'élus locaux exécutifs dans nos assemblées", a de même résumé Jean-Christophe Lagarde.
L'élu de Seine-Saint-Denis s'est aussi à plusieurs reprises emporté contre l'élargissement, voté en commission, de la liste des fonctions locales ne pouvant être cumulées avec un mandat parlementaire.
Aux maires et adjoints, présidents et vice-présidents de départements, régions et intercommunalités, la commission avait en effet ajouté les présidents et vice-présidents des syndicats de communes et syndicats mixtes. "On sait que la charge de travail du président d'un syndicat mixte est faible. Ces structures ont en effet été créées dans des communes rurales pour gérer des chemins vicinaux, des systèmes d'adduction d'eau très anciens. Au nom de quoi le président d'un syndicat mixte n'aurait-il pas le droit d'être député ? En raison de la charge de travail ou de conflits d'intérêts ? A ce moment-là, interdisez aux députés toute forme de mandat et toute forme d'activité professionnelle ! Chacun concevra le ridicule et l'hypocrisie qu'il y a à interdire à quelqu'un d'être député parce qu'il exerce une fonction qui, en réalité, ne l'engage que quelques heures par mois !", s'est insurgé Jean-Christophe Lagarde.
D'autres ont pointé ce qu'ils considèrent comme des incohérences. Tel que le fait que les présidents de sociétés d'économie mixte (Sem) locales sont concernés par le non-cumul, mais pas les présidents d'autres Sem (une Sem de conseil général par exemple). Du coup, un amendement élargissant l'interdiction à l'ensemble des présidences de Sem a été adopté.
Pour le reste, très peu d'amendements ont été votés. Certains l'ont été alors qu'ils émanaient de l'opposition et entendaient surtout faire apparaître le caractère "illogique" du texte. Par exemple en élargissant le non-cumul à la vice-présidence du conseil d'administration de divers organismes.
La seule modification substantielle a consisté, à la demande du gouvernement, à supprimer l'interdiction, ajoutée en commission, d'exercer plus de trois mandats parlementaires consécutifs. "Aucune disposition constitutionnelle ne peut garantir le non-cumul dans le temps des mandats parlementaires et locaux", a notamment fait valoir Manuel Valls.

 

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