Archives

Investissements - Le financement du plan "Juncker 2" suscite des interrogations

Parmi les nouveautés du "plan Juncker 2" présenté par la Commission la semaine dernière figure la possibilité de soutenir les projets de défense. Mais pour financer cette deuxième phase, il est à nouveau envisagé de puiser dans le mécanisme pour l'interconnexion pour l'Europe, ce qui suscite des interrogations.

Annoncé en grande pompe la semaine dernière, le prolongement du "plan Juncker" provoque déjà des remous chez les parlementaires. A l'occasion de son discours sur "l'état de l'Union", le 14 septembre, le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker a en effet annoncé que son plan présenté fin 2014 serait prolongé jusqu'en 2022 et son volume multiplié par deux ; soit un objectif de 630 milliards d'euros investis au total, comparés au 315 milliards prévus dans le plan initial.
Pour mettre en musique ces déclarations, la Commission a présenté le jour même une proposition de modification du règlement du plan d'investissement pour l'Europe (non officiel du plan) dans le cadre plus général de la révision à mi-parcours du cadre financier de l'Union européenne pour la période 2014-2020. Le but de cette proposition est de préparer la première tranche du prolongement du plan, avec un objectif transitoire de 500 milliards (sur les 630) d'ici à 2020. Pour y parvenir, le FEIS (Fonds européens pour les investissements stratégiques), l'outil financier du plan, devrait être porté de 16 à 26 milliards d'euros. La contribution de la Banque européenne d'investissement (BEI) passera de 5 à 7,5 milliards d'euros. La Commission envisage aussi un transfert de 650 millions d'euros des instruments financiers du mécanisme pour l'interconnexion en Europe (MIE) consacré aux grands réseaux transeuropéens. Or elle y avait déjà puisé 3,3 milliards d'euros lors de la première phase ! Elle souhaite enfin renforcer les passerelles entre le plan Juncker et les fonds structurels dont les règlements vont être assouplis en conséquence. 

Plus d' "additionnalité"

Au-delà du financement, la Commission entend renforcer "l'additionnalité" des projets financés par le plan, alors que jusqu'ici certains projets sélectionnés ont pu surprendre. "Il est indiqué encore plus clairement que les projets soutenus (…) remédient à des situations d'investissement sous-optimales et à des lacunes du marché", souligne-t-elle dans sa proposition de règlement, citant notamment "les projets d'infrastructures transnationaux". Elle propose aussi de concentrer davantage les crédits "vers les priorités politiques de l'UE relatives au changement climatique". On notera également la volonté de Bruxelles d'inclure désormais la pêche, l'agriculture et "les projets d'investissement liés à la défense", ce qui ouvrirait des possibilités pour les projets de restructuration de sites de défense.
Enfin, la Commission veut veiller à un meilleur équilibre des pays bénéficiaires vu que pour l'heure la France, le Royaume-Uni, l'Italie et l'Espagne trustent une bonne part des projets retenus. Elle cherche à accroître son utilisation dans les régions moins développées ou en transition avec une possibilité pour les pays dits de "cohésion" de financer des projets d'autoroutes (les régions d'Outre-mer sont concernées). Elle insiste à ce titre sur le rôle de la plateforme d'assistance technique (EIAH) lancée en septembre 2015 qui devra "contribuer activement à l'objectif de diversification sectorielle et géographique". Elle devra aussi mieux cibler les projets impliquant plusieurs Etats membres, ceux qui contribuent aux objectifs de la COP 21, ceux qui combinent le plan avec d'autres sources de financement (fonds structurels, programme Horizon 2020, mécanisme pour l'interconnexion en Europe). 

Une adoption avant la fin de l'année ?

En revanche, la proposition de règlement n'abaisse pas le ticket d'entrée (aujourd'hui à 25 millions d'euros), contrairement aux engagements pris par Jean-Claude Juncker devant les maires français fin mai 2016.
Voilà pour le contenu. Mais si l'idée d'un prolongement était dans les tuyaux, certains observateurs jugent "abrupt" le lancement de cette deuxième phase, en l'absence de véritable évaluation. Jean-Claude Juncker a simplement indiqué le 14 septembre que le plan avait pour l'heure mobilisé 116 milliards d'euros d'investissements sur les 315, ce qui est en effet conforme au rythme envisagé. Pour la Commission, les "succès engrangés" et ces "signes encourageant" sur la relance de l'investissement en Europe justifient un prolongement, souligne-t-elle, dans un communiqué du 14 septembre. Surtout, la nouvelle réallocation des crédits du mécanisme pour l'interconnexion en Europe fait grincer des dents chez certains députés. Pour rappel, sur les 195 projets retenus à l'issue du deuxime appel à projets présenté cet été, 20 concernent la France.
Si la Commission espère faire adopter sa proposition avant la fin de l'année par le Parlement et le Conseil, elle devra sans doute la retoucher.
 

 

Téléchargements

Voir aussi

Abonnez-vous à Localtis !

Recevez le détail de notre édition quotidienne ou notre synthèse hebdomadaire sur l’actualité des politiques publiques. Merci de confirmer votre abonnement dans le mail que vous recevrez suite à votre inscription.

Découvrir Localtis