Formation - Le devenir des contrats d'objectifs territoriaux en question
La commission du Conseil national de la formation professionnelle tout au long de la vie (CNFPTLV) s'est penchée sur les contrats d'objectifs territoriaux (COT) pour analyser ces outils et vérifier si cette forme de contractualisation au niveau territorial assurait effectivement une meilleure cohérence des politiques de formation. Les COT ont été mis en place en 1987 (loi du 23 juillet 1987) pour développer de manière coordonnée les différentes voies de formation des jeunes (formation initiale, continue et alternée). Au fil des années, ces contrats ont fait l'objet de plusieurs évolutions. En juillet 1992, la loi prévoit d'associer les organismes consulaires aux COT. La loi quinquennale de 1993 crée les plans régionaux de développement de la formation professionnelle des jeunes (PRDFJ) qui doivent prendre en compte les orientations des COT. Enfin, la loi du 13 août 2004, qui a étendu la compétence des régions à la formation des adultes, prévoit la possibilité de COT interrégionaux.
L'étude, réalisée par les cabinets Dubouchet et Amnyos, porte sur les COT signés entre 2000 et 2006 avec un focus sur cinq régions : l'Aquitaine, la Haute-Normandie, la Bourgogne, Midi-Pyrénées et Provence-Alpes-Côte d'Azur. 147 contrats sur les 157 recensés ont ainsi été passés à la loupe. Les conclusions sont claires : "Si l'on s'en tient à la loi du 23 juillet 1987, on ne peut pas dire que les COT ont rempli leur rôle", résume Françoise Amat, secrétaire générale du CNFPTLV.
Au départ orientés vers la formation des jeunes, les COT se sont progressivement éloignés de leur cible. Ils ont élargi leur champ d'action, jusqu'à bien souvent perdre de vue leur objectif initial. Autres faiblesses des COT mises en lumière par l'étude : la lourdeur et la lenteur des procédures, la tendance à reproduire en région une approche structurée par la logique de branches alors que les questions transversales sont plus prégnantes aujourd'hui, et la dispersion des thèmes. "Il s'agit davantage d'une juxtaposition d'actions que d'actions définies en commun, assure Françoise Amat. De plus, il n'y a pas de sanction si les actions ne sont pas réalisées." Des contrats... "non contractuels", donc peu efficaces. Côté budget, même problème : les engagements financiers n'apparaissent pas dans les COT. Des faiblesses qui n'empêchent pas certaines avancées.
Supprimer les COT ou les transformer en vrais contrats ?
Les COT ont notamment permis le développement du dialogue en continu entre les régions, les branches, la direction régionale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle (DRTEFP) et le rectorat. "C'est autour du croisement branche/région que va s'engager une bonne partie de la réforme de la formation professionnelle, explique Françoise Amat. Les COT ont permis à chacun d'entre eux de s'apprivoiser."
Certaines régions, comme la Bretagne ou la Bourgogne, ont joué le jeu et ont été très actives en matière de COT. D'autres, comme l'Ile-de-France ou la Lorraine, ont très peu signé de COT et ont utilisé d'autres moyens, comme des conférences annuelles, pour gérer leur relation avec les branches professionnelles.
Autre point positif : au fil des années, les COT ont gagné en qualité. L'étude observe en effet un saut qualitatif des contrats de troisième génération par rapport aux précédents et un renforcement des outils d'observation et de diagnostic qui permettent des états des lieux au niveau régional.
Fort de cette analyse, le CNFPTLV a émis trois hypothèses pour l'avenir des COT. Première hypothèse : les supprimer et laisser au processus d'élaboration du plan régional de développement des formations (PRDF) le soin de réguler les voies de formation des jeunes et d'établir la carte des formations initiales. "Personne ne s'est réellement engagé dans cette voie", rassure Françoise Amat.
La deuxième hypothèse consisterait à acter l'évolution des COT en sortant de leur champ la carte des formations initiales, prise en charge par le PRDF et d'autres dispositifs, et à faire évoluer l'outil vers une véritable coopération contractualisée entre les régions et branches professionnelles qui le souhaitent.
Enfin, la troisième et dernière hypothèse propose de créer un nouveau cadre de contractualisation entre les branches et les régions. Une hypothèse qui pourrait s'inscrire dans le processus de réforme de la formation professionnelle en cours. D'après la secrétaire générale du CNFPTLV, "il s'agirait d'en faire de vrais contrats, avec des engagements financiers pour les parties prenantes et des objectifs partagés". Reste à définir leur positionnement par rapport au PRDF. Au départ conçus comme des outils "en amont" des PRDF, ils sont le plus souvent des déclinaisons de ceux-ci. Après ce rapport sur les COT, le CNFPTLV compte maintenant s'attaquer aux comités de coordination régionaux de l'emploi et de la formation professionnelle (CCREFP) pour alimenter les réflexions du groupe multipartite sur la formation professionnelle. Un rapport sur le sujet devrait paraître à la fin du mois de mai 2008.
Emilie Zapalski