Funéraire - Le développement durable fait une progression dans les cimetières
Les préoccupations paysagères et environnementales reviennent en force dans certains cimetières, ont expliqué le 20 octobre les participants d'un colloque organisé, à Paris, par le Syndicat intercommunal funéraire de la région parisienne (Sifurep). A l'époque contemporaine, la standardisation des pierres tombales et le recul de la végétation dans les cimetières ont conduit à un appauvrissement du paysage funéraire, a regretté Frédéric Bertrand, architecte et urbaniste à l'Atelier parisien d'urbanisme. "Les consultations de paysagistes pour des cimetières sont assez rares", a indiqué Bernard Cavalie, paysagiste à l'Atelier de l'Ile.
A Noisy-le-Grand, ce professionnel a apporté ses conseils pour l'extension du cimetière. Le terrain en pente a été organisé en terrasses de nature minérale, dont l'aspect a été masqué par des haies. Au cimetière de Magny-le-Hongre, aménagé également par l'Atelier de l'Ile, des plantes grimpantes recouvrent le mur pour donner au lieu un caractère plus vert, comme l'a souhaité la municipalité. A Angers, les agents municipaux ont remis en herbe 2.600 m2 d'allées dans les cimetières. Entre les tombes, ils ont étalé des tapis de sedum ou ont planté des mini-mottes. Ces nouveaux espaces verts sont entretenus sans utiliser de produits phytosanitaires et ne sont pas arrosés.
Dans les cimetières parisiens, les trottoirs en béton sont progressivement remplacés par du gazon ou des revêtements stabilisés perméables. Le végétal a ainsi "reconquis" 28 des 420 hectares que représentent les cimetières parisiens. La ville a aussi réduit de 87% en 13 ans l'utilisation des engrais et des désherbants. Par ailleurs, depuis cette année, de petites zones des cimetières sont rendues à la nature, afin de favoriser la biodiversité. Résultat de ces efforts, certaines espèces de fleurs font leur réapparition, comme le coquelicot, ou l'orchidée sauvage. En parallèle, la capitale favorise la vie animale dans les cimetières, qu'il s'agisse de renards ou d'oiseaux nocturnes.
Les pieds mouillés par temps de pluie
Ces villes ont obtenu des résultats encourageants, mais elles se sont heurtées parfois à d'importantes difficultés. La première est le coût de ces nouvelles pratiques. A Angers, l'enherbement autour des tombes a coûté 30 euros par m2. Pour un tapis de sedum, il faut compter 27 euros pour un m2. La facture a grimpé à 65 euros par m2 pour l'enherbement des allées rendues aux piétons. Au cimetière de Pantin, la végétalisation des allées d'une division (moins d'un hectare) a coûté 35.000 euros. Le second défi concerne la formation des personnels. Alors qu'avant, de "simples agents d'entretien suffisaient, il faut désormais l'intervention de jardiniers qualifiés", constate Marc Houdon, responsable des activités funéraires de la ville d'Angers. Pascal Hervé Daniel, responsable des cimetières de la ville de Paris, va plus loin : "Demain, la gestion des cimetières ne sera plus centrée uniquement sur les enjeux funéraires. La gestion sera transversale : elle fera intervenir notamment des équipes de spécialistes en conservation du patrimoine, en gestion de la flore et de la faune." Dernière grosse préoccupation: le comportement des personnels et des usagers. Si à Paris par exemple, les agents s'impliquent beaucoup dans la mise en œuvre des nouvelles méthodes, il ne faut pas que certaines espèces (la fouine, les étourneaux ou les corneilles notamment), détruisent leur travail, comme cela arrive si rien n'est fait. Quant aux usagers, parfois âgés, ils n'acceptent pas tous d'avoir les pieds mouillés par temps de pluie, parce qu'ils n'ont pas d'autre choix que d'emprunter les allées enherbées. Certains n'apprécient pas non plus les traces que les escargots ou les limaces laissent après leur passage sur les sépultures. "L'éducation du public est indispensable", conclut Pascal Hervé Daniel, dont les services vont prochainement mener une campagne de sensibilisation auprès du public, pour expliquer les changements en cours dans les cimetières parisiens.