Aménagement numérique - L'Avicca demande la modification du dispositif de montée en débit sur le réseau France télécom

Dans une lettre adressée au ministre de l'Industrie et à l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep), l'Association des villes et collectivités pour les communications électroniques et l'audiovisuel (Avicca) réitère sa demande de modification du cadre actuel de la montée en débit sur le réseau de cuivre de France télécom. Comme elle l'avait  déjà demandé lors de son assemblée générale de 2011, l'association souhaite que le coût d'amélioration de la boucle de cuivre soit pris en charge au niveau national et non par les collectivités locales. Elle considère "injuste" le schéma élaboré par les pouvoirs publics car "ce sont les contribuables des communes rurales qui vont financer l'amélioration de la boucle de cuivre, tandis que les zones les plus urbanisées passeront gratuitement à la fibre optique".
L'Arcep a redéfini les modalités de mise en oeuvre de la montée en débit en imposant à France télécom de fournir un accès à la sous-boucle via un point de raccordement mutualisé, afin d'améliorer les conditions d'exercice de la concurrence entre opérateurs. Depuis juin 2011, France télécom propose une solution, conformément aux règles édictées par l'Arcep. Il s'agit de l'offre "point de raccordement mutualisé" (PRM) qui remplace le dispositif NRA zones d'ombre (NRA-ZO) tout en s'en distinguant sur quelques points stratégiques. Le NRA nouvelle formule doit être obligatoirement raccordé à un réseau de collecte fibre optique - ce qui est cohérent, mais en augmente sensiblement le prix -, les offres de gros proposées par France télécom sont régulées par l'Arcep et les opérateurs de services concurrents à France télécom qui souhaitent s'y installer sont mieux accompagnés.

Un investissement supporté par les communes rurales

Seule ombre au tableau, la totalité des coûts d'investissements qui incluent la collecte, l'hébergement, les modifications sur la boucle locale et l'accompagnement des opérateurs privés pour l'installation de leurs équipements actifs est assurée par les demandeurs de la montée en débit, c'est-à-dire les collectivités locales. A titre indicatif, l'Arcep a estimé le coût d'aménagement d'un sous-répartiteur nouvelle formule entre 80.000 et 100.000 euros. La prestation passée à France télécom serait comprise entre 40.000 et 70.000 euros, suivant le nombre de lignes, le solde représentant les travaux d'aménagement assurés directement par la collectivité. Sur les 126.000 sous-répartiteurs existants en France, cette offre en concernerait 30.000 au maximum et un peu plus de la moitié en "coeur de cible", soit 16.500. L'investissement pour les collectivités territoriales représenterait donc un volume de 1 à 1,5 milliard d'euros, moins les 250 millions d'euros de subventions prévues par l'Etat d'ici à 2017 (volet C du programme national THD, via le fonds national pour la société numérique, FNSN).

Risque de requalification en "aides d'Etat"

L'Avicca relève quelques risques supplémentaires dans le dispositif. Les dispositions contractuelles prévues par France télécom seraient plus restrictives que dans l'offre NRA-ZO : à titre d'exemple, les contrats ne permettraient pas aux collectivités d'installer des équipements supplémentaires pour délivrer ponctuellement du très haut débit "dans des armoires qu'elles financent pourtant intégralement". Quant aux financements dont bénéficieraient France télécom et les opérateurs désireux de s'installer sur le NRA, ils pourraient être assimilés à des aides d'Etat n'ayant pas été notifiées aux autorités européennes, ce qui leur fait courir un risque d'annulation.
Parmi les pistes à examiner au niveau national, l'association relève celle du "financement par les revenus de la boucle locale de cuivre". La baisse de 50 centimes d'euro par abonné programmée par l'Arcep sur les tarifs de la boucle locale semble en effet indiquer qu'il existe une certaine marge de manoeuvre. Toutefois dans le contexte économique actuel, la prudence reste de mise, l'association ne semble pas véritablement avancer de solution. Elle souhaite surtout attirer l'attention sur le risque de fracture territoriale : "Faire supporter le financement de la montée en débit aux collectivités locales rurales est non seulement injuste, mais revient au bout du compte à se débarrasser de la question. Dans le montage actuel, seule une minorité de communes pourra suivre sur ce terrain", souligne-t-on à l'association. 

 Philippe Parmantier / EVS

René Souchon se désolidarise de l'Avicca sur la montée en débit

Dans un communiqué publié le 7 février, René Souchon, président de la région Auvergne, déclare se désolidariser de l'initiative de l'Avicca qui vise à remettre en cause le cadre de la montée en débit sur le réseau de cuivre. Il considère que cette position va à l'encontre du modèle de déploiement prôné en Auvergne et qu'elle fait peser un risque sur des initiatives similaires qui ont déjà fait leurs preuves.
"La convergence de nos objectifs vise à éviter que ne s’installe une fracture numérique durable entre les territoires, qui vont être couverts 'naturellement' par l’investissement privé, et les autres, qui pèsent pour 53% de la population mais 94% des communes auvergnates." Pour y parvenir, la région a passé un contrat de partenariat public-privé, attribué à France télécom, lequel a permis de déployer 750 km de fibre optique pour irriguer les territoires les plus ruraux. Ce déploiement aurait permis de desservir 14.000 foyers privés d’internet jusqu’alors et d'augmenter les débits pour 37.000 autres. Sans préjuger des conditions financières du contrat de partenariat signé par l'Auvergne, l'initiative se démarque effectivement de celle de l'Avicca, mais confirme bien la nécessité d'une approche mutualisée pour traiter la question de la montée en débit.