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Développement local - L'avenir du café-tabac en question...

"Les café-tabac resteront-ils demain le premier commerce de proximité ?" A l'occasion d'une journée débat organisée le 15 janvier 2010 au Sénat sous le haut patronage du ministre de l'Espace rural et de l'Aménagement du territoire et du secrétaire d'Etat chargé du commerce, représentants de la profession, sénateurs, députés et entreprises ont posé la question de l'avenir du café-tabac et du bistrot du coin. Des commerces qui présentent de véritables atouts économiques résumés par Anne-Marie Escoffier, sénateur de l'Aveyron : "Ils assurent une proximité géographique, affective et fonctionnelle." Autre force de ces commerces : le maillage territorial, "en particulier dans les zones rurales où les cafés sont des lieux de vie intergénérationnels", a précisé pour sa part Gérard Bohelay, président de la Fédération des buralistes de Paris Ile-de-France. "Ce sont, après les enseignants, les derniers survivants, ceux qui partent les derniers du village", a aussi détaillé Etienne Wery, avocat aux barreaux de Paris et de Bruxelles. Mais si leur attrait est manifeste, la profession a du mal à tenir le coup. "Notre profession a perdu 5.000 établissements en moins de dix ans, a souligné Gérard Bohelay, et depuis 2007, le chiffre d'affaires est en baisse de 16%, les plus petits établissements, en zone rurale, étant les plus touchés." En cause : la nouvelle réglementation sur la cigarette qui a fait chuter la consommation. "Mais je pense que le bistrot a une utilité publique et qu'il faut le sauvegarder, a encore affirmé le président de la Fédération des buralistes de Paris Ile-de-France, beaucoup de maires y sont attachés, car ils y puisent la vérité du terrain, les 'cancans' du voisinage, et ce que les gens pensent d'eux-mêmes et en direct." Une des solutions avancées : développer de nouvelles activités, sources de marges financières. D'autres pays européens n'ont pas attendu pour se lancer dans ce genre de démarches. En Belgique par exemple, 680 points postes ont été mis en place dans des cafés (l'équivalent à l'échelle française de 30 à 35.000 points) proposant de plus en plus de services : envoi et réception de recommandés, bornes de paiement. Des points postaux qui ressemblent à ce qui est en train de se développer en France, les relais poste commerçants (RPC), en remplacement des bureaux de poste de plein exercice. On recense 1.750 RPC en France, dans des commerces, épiceries, presse, ou cafés. En Italie, ces points proposent des services encore plus larges : vente de produits bancaires, dans le cadre d'activités liées à la banque postale, ou bien possibilité d'ouvrir ou de fermer un compte bancaire.

Bornes de services interactifs

Autre exemple de service développé dans les cafés en Europe : la mise en place de bornes de services interactifs, comme en Suède ou en Allemagne, permettant d'effectuer des démarches administratives (demander un acte de naissance, de décès, obtenir un permis de pêche ou de chasse…). Etienne Wery, qui a étudié ces exemples étrangers, estime qu'il y a encore bien d'autres services qui pourraient être proposés par les cafés : services liés à la communication (vente de cartes téléphoniques ou internet prépayées, vente d'abonnements), services financiers (remise des cartes bancaires), services liés au commerce électronique, avec notamment une fonction de "consigne" créée au sein du village pour récupérer les colis commandés sur internet, services liés au commerce traditionnel (contrat énergie, gaz, eau…). "Nous souhaitons valoriser cette notion de services au public, avoir un lieu unique pour tous ces services qui disparaissent en ce moment, soit permanents, soit organisés par des rendez-vous", a expliqué Anne-Marie Escoffier, qui estime que l'on peut imaginer faire venir jusqu'au café du village la caisse locale de sécurité sociale, la caisse d'allocation familiale ou même la préfecture pour les questions de carte grise ! Une réflexion qui va dans le sens des travaux engagés à l'occasion des Assises des territoires ruraux organisées d'octobre 2009 à janvier 2010. Travaux qui doivent aboutir à une nouvelle charte des services publics en milieu rural, avec l'idée de mettre en place des socles de services au public et de les mutualiser. "Mais il va falloir être polytechnicien pour être cafetier si on veut assurer tous ces services", s'est toutefois interrogé Jean-Yves Pineau, directeur de Collectif Ville Campagne, une association qui lutte depuis quinze ans contre la désertion du monde rural. "On a des clients, des consommateurs, mais il ne faut pas être dupe ; aujourd'hui, à force de tirer sur la corde, elle risque de se rompre, a-t-il souligné, estimant quant à lui qu'il faut surtout "que le politique décide d'une posture : comment on construit la société, comment on organise la vie sur ces territoires ? Dans ce domaine, il nous faut un projet, un dessein…"


Emilie Zapalski