Environnement - L'avant-projet de loi Grenelle 2 examiné en comité de suivi
Avant d'être transmise prochainement au Conseil d'Etat, une version quasi définitive de l'avant-projet de loi Grenelle 2 a été examinée le 6 novembre par les acteurs du Grenelle de l'environnement, lors d'un premier comité de suivi consacré à ce texte. Etaient présents la totalité des représentants des principaux "collèges" (dont celui des collectivités) ayant contribué à la mise en oeuvre des dispositions de la loi d'orientation Grenelle 1, adoptée le 21 octobre par l'Assemblée nationale. Premier constat : le dialogue entre ces parties prenantes va donc être pérennisé au travers de réunions régulièrement orchestrées par ce comité de suivi. Un comité à vocation générale, transversale, qui tiendra autant compte de l'avancée des comités opérationnels (Comop) du Grenelle continuant pour certains leur travail, que du chemin qui reste à parcourir par ce projet de loi Grenelle 2. Un comité de travail donc, et non une instance amenée à formuler des avis, à l'instar du Conseil national du développement durable.
Adressé quelque peu à la hâte aux acteurs concernés juste avant cette réunion de suivi, ce texte décisif doit être présenté d'ici à la fin d'année en Conseil des ministres, avant de passer au Sénat pour une première lecture prévue en janvier. Si la seconde lecture ne prend pas trop de temps, le projet de loi Grenelle 2 sera définitivement validé au printemps 2009. D'ici là, cette "boîte à outils", qui vient mettre en musique et codifier l'application des principes et objectifs fixés dans le projet de loi Grenelle 1, doit encore être réactualisée à la lumière des avancées obtenues en octobre à l'Assemblée nationale.
A ce jour, l'avant-projet comporte 7 titres, 22 chapitres, 106 articles. Le sujet de la tarification incitative apposée à la gestion des déchets en est par exemple absent. "On doit encore avancer sur une vingtaine de points, ce qui ne représente qu'une infime partie du texte ; le principal donc y est", éclaire Arnaud Gossement, porte-parole de France Nature Environnement.
Sans élus, pas de Grenelle 2
Le schéma national des nouvelles infrastructures de transport sera élaboré en concertation avec les parties prenantes du Grenelle. Au sein du comité de suivi, un groupe de travail va pleinement s'y consacrer. Le ministre de l'Ecologie Jean-Louis Borloo espère faire valider ce schéma d'ici à la fin 2009. "Ce futur schéma est un bon exemple de mesure impactant directement les collectivités. Mais c'est aussi le cas des trois quarts des autres dispositions du Grenelle 2, qui concernent en première ligne les élus locaux", souligne Arnaud Gossement. Certes, certaines mesures ayant suscité une levée de boucliers de la part des élus, tel le projet d'instauration de péages urbains, ont été retirées du texte. Mais les autres exposent en effet les collectivités à de rapides changements. "Rapide, car la mi ou la fin 2009, c'est déjà demain ! Dès lors, je ne suis pas certain que tous les élus aient bien pris conscience de l'ampleur du changement qui les attend", ajoute Arnaud Gossement.
Tant pour la mise en place des trames bleue et verte sur les territoires que pour la procédure d'autorisation de démolir, amenée à intégrer la nécessité de disposer en amont de filières d'élimination des déchets dédiées, il persiste donc un certain flou du côté des élus. Pour eux, difficile d'appréhender l'impact et d'anticiper les effets qu'auront précisément ces mesures dictées au niveau national. Des effets pourtant notoires, puisque le Grenelle 2 va par exemple conduire à un toilettage du Code de l'urbanisme : parmi d'autres mesures parfois en deçà des objectifs fixés par le Grenelle 1, il est ainsi prévu qu'un bonus de 30% sur les règles d'urbanisme (gabarit du bâtiment, emprise au sol, hauteur) s'applique aux constructions vertueuses. En clair, un besoin se fait donc ressentir pour que le Grenelle se décline plus près du terrain, par exemple au travers d'instances de concertation locale. A titre de simple exemple, l'un des premiers sujets de débat qui pourrait y émerger pourrait être l'extension de la TGAP aux activités d'incinération. Et pour cause, c'est un point sur lequel les représentants d'élus ont déjà exprimé leur déception, car l'affectation des recettes de cette taxe ne reviendra pas aux collectivités et aux "bons élèves", mais uniquement à l'Ademe.
Sur son volet énergie, l'avant-projet de loi instaure comme prévu des plans Climat ou "schémas régionaux du climat, de l'air et de l'énergie". Charge au préfet de région et au président du conseil régional de les élaborer conjointement. Cet outil se substituera aux plans régionaux pour la qualité de l'air (PRQA) et devra être cohérent avec les zones de développement de l'éolien (ZDE). Sans plus de précision, on y apprend qu'au 1er janvier 2011, les collectivités de plus de 50.000 habitants devront réaliser leur propre bilan carbone public. Quant au projet de soumettre les éoliennes à la procédure d'autorisation des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE), il n'est pas exactement acté mais l'avant-projet de loi marque un premier pas dans ce sens, en indiquant que les éoliennes devraient à terme respecter les obligations relevant de la police des ICPE. A contrario, la procédure de classement des réseaux de chaleur devrait être allégée pour soutenir leur développement. Enfin, de nouvelles collectivités doivent être autorisées à produire des ENR limitées à leurs équipements et, côté transports, à organiser si elles le souhaitent un système de vélos en libre-service. Pour dégager plus facilement des emprises pour le transport urbain, il est prévu que le préfet puisse recourir à la procédure d'expropriation rapide. Mais rien n'est prévu pour les transports régionaux (article 15 et 17 du Grenelle 1)... Enfin, un manque évident de consultation des acteurs et organismes officiels est à l'origine des lacunes du volet eau. Quoi qu'il en soit, cet avant-projet devrait susciter dès la semaine prochaine des réactions de la part des acteurs concernés.
Morgan Boëdec / Victoires Editions