Habitat - Laurent Wauquiez propose d'utiliser le grand emprunt pour développer le logement des saisonniers

Le secrétaire d'Etat chargé de l'emploi a visité, le 26 juillet, une maison de saisonniers à Villers-sur-Mer (Calvados, 2.600 habitants hors saison). Baptisée résidence Malpelo, celle-ci propose 21 logements à des travailleurs saisonniers, à des tarifs attractifs (155 euros de loyer mensuel et 90 euros de charges pour un F1 de 21 m2 entièrement équipé), sans rapport avec les prix pratiqués sur le marché libre touristique de la côte normande (Villers-sur-Mer se situe à quelques kilomètres de Deauville et Trouville). Les logements étant conventionnés à l'APL, les saisonniers peuvent également - en fonction de leurs revenus - bénéficier de cette prestation versée par les caisses d'allocations familiales, ce qui réduit d'autant le coût effectif du logement et le ramène en dessous de 20% du Smic.

Lancée il y a trois ans par la commune de Villers-sur-Mer et Calvados Habitat, l'opération vise un double objectif : améliorer les conditions de vie des travailleurs saisonniers - souvent logés dans des conditions très précaires et/ou très coûteuses - et, du même coup, permettre aux entreprises touristiques locales (hôtels, restaurants, activités de loisirs...) de recruter plus facilement durant la saison. La région Basse-Normandie compterait ainsi environ 15.000 travailleurs saisonniers durant la période touristique. Au niveau national, le secrétaire d'Etat à l'emploi estime le nombre des saisonniers à environ 600.000, mais la CFDT - qui mène chaque été une campagne pour la défense des droits des saisonniers - les évalue de son côté à 800.000 dans l'agriculture et 400.000 dans les hôtels, cafés et restaurants. Dans le cas de Villers-sur-Mer, la résidence présente en outre l'originalité d'accueillir à la fois des travailleurs saisonniers et des jeunes en apprentissage.

Dans son intervention, Laurent Wauquiez a indiqué qu'"il existe peut-être une vingtaine de maisons de ce type en France" et a présenté celle de Villers-sur-Mer comme "un modèle à suivre, que j'aimerais voir se développer un peu partout. Car les travailleurs saisonniers, il ne faut pas se raconter d'histoire, travaillent encore trop souvent sur le fil du rasoir". Vantant les emplois saisonniers comme un tremplin vers des emplois plus pérennes, le secrétaire d'Etat a affirmé ne pas vouloir "qu'il s'agisse de jobs précaires ou de petits jobs, ni que les hébergements se limitent à du camping faute de moyens". Il a donc avancé une idée originale : "utiliser le grand emprunt, dans lequel on a de l'argent, pour apporter des solutions de ce type, à la fois, aux saisonniers et aux apprentis". Laurent Wauquiez n'a toutefois avancé aucun chiffre, ni indiqué comment cet usage du grand emprunt - qui n'était pas prévu à l'origine - pourra être mis en place. L'insistance du secrétaire d'Etat chargé de l'emploi sur la nécessité d'associer dans un même ensemble de logements travailleurs saisonniers et jeunes en apprentissage laisse toutefois augurer de la solution. Le grand emprunt prévoit en effet une enveloppe de 250 millions d'euros destinée à consolider ou développer des solutions d'hébergement pour les jeunes en alternance (voir notre article ci-contre du 6 mai 2010). Celle-ci pourrait permettre la création d'environ 18.000 places d'hébergement.

 

Jean-Noël Escudié / PCA

 

 Des saisonniers dans les lycées

Autre initiative pour développer le logement des travailleurs saisonniers : celle de la région Aquitaine. L'idée consiste à utiliser les résidences lycéennes - autrement dit les internats appartenant à la région - vidées de leurs occupants durant l'été, pour accueillir des saisonniers. Compte tenu de la nature de l'hébergement et de la durée limitée de disponibilité des lieux, l'opération s'adresse en priorité aux jeunes disposant de ressources modestes et qui exercent les traditionnels "jobs d'été". Depuis le 15 juillet, la région mène une première expérience sur le bassin d'Arcachon. L'opération est pilotée par l'association "Habitat jeunes bassin d'Arcachon", qui assure l'attribution des logements, les états de lieux, la facturation et l'organisation de la vie collective. La prestation va au-delà du simple hébergement, puisqu'elle comprend aussi un service de petit-déjeuner et la mise à disposition de réfrigérateurs et de fours à micro-ondes dans les espaces communs. Pour leur part, la Maison des saisonniers et le Crous de Bordeaux-Aquitaine se chargent de diffuser l'information et de proposer des offres combinées "emploi et hébergement". Les tarifs pratiqués sont de 9 euros pour une nuit, 60 euros à la semaine et 200 euros pour un mois, toutes charges comprises. On observera qu'ils ne sont guère inférieurs à ceux pratiqués à Villers-sur-Mer (200 euros contre 245 euros), pour un logement en internat nécessairement plus spartiate qu'un F1. Si l'expérience se révèle concluante, le dispositif sera étendu dès 2011 à d'autres sites touristiques de la région.