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PLF 2019 - L'Assemblée veut relancer la réhabilitation du logement social outre-mer

Dans son rapport présenté au nom de la commission des finances de l'Assemblée nationale sur les crédits de l'outre-mer, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2019, Olivier Serva, député (LREM) de Guadeloupe, s'attarde sur la question du logement social. Le rapporteur spécial insiste notamment sur la nécessité de renforcer les outils pour la réhabilitation des logements.

Un dispositif chasse l'autre...

Ce focus sur le logement social vient notamment de l'inquiétude suscitée par l'extinction, dans les Drom (départements et régions d'outre-mer), de la réduction d'impôt sur le revenu (article 199 undecies C du CGI) et de la déduction de base fiscale de l'impôt sur les sociétés (article 217 undecies) pour son volet en faveur du logement social. Ces deux dispositifs propres à l'outre-mer sont progressivement remplacés par le crédit d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés, prévu par l'article 244 quater X.
Il s'agit en l'occurrence de lutter contre le phénomène, dénoncé par la Cour des comptes, d'"évaporation fiscale", qui voyait une part non négligeable de l'avantage fiscal captée par des investisseurs fiscaux dans l'Hexagone et par des intermédiaires spécialisés en défiscalisation. Le nouveau dispositif est donc ouvert uniquement aux contribuables locaux, mais ni dans les COM (collectivités d'outre-mer), ni en Nouvelle-Calédonie, du fait de l'autonomie fiscale de ces territoires.
Si le rapporteur spécial "n'a pas d'opposition de principe à la bascule dans les Drom des deux dispositifs les plus anciens en faveur du logement social vers le dispositif plus récent", il souhaite néanmoins, à travers des amendements, corriger certains "effets de bord négatifs" engendrés par ces nouvelles dispositions.

Maintien d'un dispositif spécifique pour la réhabilitation

Le rapporteur spécial propose notamment de maintenir, dans les Drom, un dispositif d'aide à la réhabilitation des logements des propriétaires occupants aux revenus modestes. Ce dispositif est actuellement possible grâce à un "montage spécifique" dans le cadre de l'article 199 undecies C, qui rend éligibles à la réduction d'impôt les acquisitions de logements achevés depuis plus de vingt ans et faisant l'objet de travaux de réhabilitation, dès lors qu'ils sont donnés en location à nue dans les six mois de leur acquisition et sont sous-loués pour une durée de cinq ans au moins à des personnes physiques qui en font leur résidence principale et répondent à des conditions de ressources. À l'issue de la période de location, les logements sont cédés à l'organisme locataire ou à des personnes physiques qu'il choisit.
Le problème est que cette disposition a, elle aussi, été détournée par des sociétés de services financiers à travers un processus qui s'apparente nettement, aux yeux du gouvernement, à un abus de droit.
Toutefois, "sans se prononcer sur le caractère abusif du procédé, le rapporteur constate simplement qu'il fonctionne, qu'il est utile et même indispensable, dans bien des cas, pour améliorer les conditions de vie des propriétaires modestes de logements achevés depuis plus de vingt ans".
Il propose donc, d'une part, la création d'un crédit d'impôt ouvert aux propriétaires occupants des Drom, au titre de la réhabilitation de leurs logements, et, d'autre part, d'augmenter les crédits de la ligne budgétaire unique (LBU) de l'action "Logement", afin de créer une dotation destinée au financement de ce type de travaux.

Extension aux COM et mesure pour les catastrophes naturelles

Le rapporteur spécial propose également deux autres mesures dans le même esprit. Il suggère ainsi d'étendre le nouveau dispositif de la réduction d'impôt aux travaux de réhabilitation dans les COM et en Nouvelle-Calédonie. Il fait notamment valoir que "ces territoires, dans lesquels la politique du logement ne peut pas bénéficier du crédit d'impôt en raison de leur autonomie fiscale, rencontrent des problèmes de réhabilitation. Les organismes de logement social ne peuvent pas être fiscalement soutenus pour réhabiliter leur parc ancien, alors que dans les Drom, l'utilisation de l'article 244 quater X ouvre cette faculté aux organismes locaux".
De même - et dans une logique sans doute inspirée des conséquences du cyclone à Saint-Martin -, le rapporteur spécial entend proposer un amendement ouvrant le bénéfice des aides fiscales à la réhabilitation aux travaux de réparation des dommages causés par les catastrophes naturelles, même si les logements concernés sont achevés depuis moins de vingt ans.

L'APL accession fait son retour en outre-mer
À l'occasion d'une audition devant la commission des lois sur le PLF 2019 à l'Assemblée nationale, le 23 octobre, Annick Girardin a annoncé que "le gouvernement rétablira en 2019, de manière transitoire et exceptionnelle, les APL accession en outre-mer afin de solder l'ensemble des opérations engagées qui n'ont pas pu être menées à terme en 2018". Ce cas de figure vise essentiellement la Réunion, où le nombre de projets engagés est évalué à un millier. Une enveloppe complémentaire de 17 millions d'euros sera ajoutée aux crédits relevant de l'action "Lutte contre l'habitat indigne" du programme "Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat" (135) de la mission "Cohésion des territoires".
Si ce rétablissement de l'APL accession - supprimée il y a un an par la loi de finances pour 2018 - n'est que "transitoire et exceptionnel", la ministre des Outre-Mer a néanmoins indiqué travailler à la mise en place d'un dispositif pérenne, qui devra être aussi "efficace ou au moins équivalent" à l'APL accession. Ce nouveau dispositif sera élaboré avec les parlementaires ultramarins, sur la base des conclusions de la mission d'analyse et d'expertise menée sur le sujet par le CGEDD (Conseil général de l'environnement et du développement durable). Ce nouveau dispositif pourrait être opérationnel dès 2019 - tout en sachant qu'"il faudra peut-être une nouvelle mesure législative" - ou en 2020.

Références : Assemblée nationale, projet de loi de finances pour 2019, rapport fait au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire sur les crédits de l'outre-mer.