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Environnement - L'Agence française pour la biodiversité amplifie son action auprès des collectivités

Ce jeune établissement public créé par la loi pour la reconquête de la biodiversité prône une stratégie d'ouverture, d'implication citoyenne et fait monter en puissance son action auprès des collectivités. Deuxième grand opérateur de l'Etat en matière d'environnement avec l'Ademe, il ne prétend pas vouloir tout faire et multiplie les partenariats pour renforcer l'appropriation locale. Un an après sa création, le 29 janvier, sa direction est revenue sur 2017 et a évoqué 2018. Avec pas mal de nouveautés en vue intéressant les acteurs locaux.

Où en est l'Agence française pour la biodiversité (AFB) ? Le 29 janvier, cet opérateur de l'Etat a fait le point après une année d'existence officielle. Référence institutionnelle de la loi pour la reconquête de la biodiversité (voir notre article dans l'édition du 4 janvier 2017), cet établissement public fort de 1.300 agents et d'un budget annuel stabilisé pour l'heure autour de 225 millions d'euros avait déjà dressé en novembre dernier le bilan des dix ans d'activités de ses quatre structures constituantes (voir son rapport d'activité).

Diversité d'actions

Ce bilan donnait à voir l'étendue des actions de cet opérateur de l'Etat, souvent menées en interaction avec les acteurs locaux, les services de l'Etat et agences de l'eau, par exemple sur l'enjeu de continuité écologique des cours d'eau. La moitié de ses effectifs sont des inspecteurs de l'environnement répartis sur tout le territoire et effectuant 20.000 contrôles par an sur des sujets à enjeux voire parfois risqués (lutte contre le trafic d'espèces protégées). Plus de 20% de leurs contrôles concernent des collectivités.
Autre mission, celle de garantie d'une solidarité financière entre les bassins de métropole et d'outre-mer, où les départements et territoires font face à d'importants problèmes d'accès à l'eau potable, de qualité, de gestion ou de salubrité. "L'AFB agit un peu en la matière comme le font les agences de l'eau en métropole, elle anime la solidarité interbassins, un dispositif qui s'étend également à la Corse", explique Christophe Aubel, directeur général de l'agence.
Par ailleurs, la loi pour la reconquête de la biodiversité a confié à l'établissement de nouvelles missions, par exemple pour faire des parcs nationaux, qui lui sont désormais rattachés, des "laboratoires vivants d'innovation et d'expérimentation", ou encore pour muscler la surveillance sur les espèces exotiques envahissantes (création d'un centre de ressources) et le suivi des mesures de compensation des atteintes à la biodiversité (création d'un portail documentaire ERC).
Quant à la mise en œuvre de la directive cadre stratégie sur le milieu marin, elle nécessite de réaliser des évaluations, dont une est en cours sur les eaux françaises métropolitaines et des usages auxquelles elles sont soumises, "sorte de bilan de santé des écosystèmes marins".

Sauver le soldat SNB

L'agence est aussi chargée d'orchestrer la relance de la stratégie nationale pour la biodiversité (SNB 2011-2020). Sa montée en puissance n'est pas aussi rapide qu'escompté. A mi-parcours, le dispositif est en pleine relance. Dès son lancement, près de 150 structures - entreprises, associations, collectivités - l'avaient signée. Un soufflé vite retombé. Rare collectivité avec Angers, Dunkerque, Le Havre et Grand Paris Seine Ouest, à avoir été labellisée SNB, la communauté d'agglomération Orléans Val de Loire y voit néanmoins un moyen de fédérer les énergies. "Mais le but est de mobiliser bien plus largement, de simplifier et rendre plus lisible le dispositif et de rallier plus de collectivités", motive Audrey Coreau, cheffe du département Stratégies nationales et européennes à l'AFB.
Pour ce faire, l'agence élabore un nouveau cadre avec le ministère de la Transition écologique, Régions de France et les agences de l'eau. Ce dispositif sera expérimenté cette année dans quelques régions sur le point d'être choisies. Il comprend un processus de labellisation des collectivités qui s'engagent, de l'accompagnement technique et un suivi des financements existants pour qu'ils gagnent en cohérence. Une subtilité perdurera, propre à la SNB, laquelle ne fonctionne pas comme un label classique : en effet, elle ne récompense pas des actions réalisées mais offre un cadre pour développer des projets nouveaux. Il s'agit donc bien d'une reconnaissance pour ce qu'on veut réaliser, cette adhésion, cet engagement, apportant un gage de sérieux et de pérennité dont les labellisés actuels estiment tirer des bénéfices, même s'ils sont parfois indirects. "Ce nouveau cadre en développement, cette initiative dénommée Territoires engagés pour la biodiversité, s'articulera avec l'opération existante récompensant les collectivités candidates pour être des capitales françaises de la biodiversité", précise Audrey Coreau.

Les AME, ce vent frais venu des îles

Autre dynamique territoriale appuyée par l'AFB, celle de déploiement des aires marines éducatives (AME). Ce label récompense les écoles qui conduisent un projet pédagogique de connaissance et de protection du milieu marin, autour d'une zone littorale de petite taille, gérée de manière participative par les élèves et enseignants (voir notre article dans l'édition du 9 juin 2017). Concept né en Polynésie, coqueluche un temps des cabinets ministériels, son extension à des écoles primaires en métropole et outre-mer s'est à tel point bien passée qu'au moins une cinquantaine d'établissements se sont appropriés la démarche ! Ces projets viennent du terrain, sont portés par les enseignants avec des associations environnementales ou d'usagers, suivis par des élus locaux et épaulés par l'AFB, qui compte bien mobiliser encore plus d'établissements. "Nous réfléchissons à adapter le concept aux espaces naturels terrestres", annonce Christophe Aubel.

Les ABC, un outil plébiscité

C'est aussi dans un objectif de déploiement - et de retard à rattraper - que la réalisation d'atlas de la biodiversité communale (ABC) va s'accélérer. Le but est d'en élaborer 500 nouveaux en trois ans. D'où l'appel à projets (AMI) doté de cinq millions d'euros, annoncé l'été dernier (voir notre article dans l'édition du 25 juillet 2017). Christophe Aubel croit beaucoup au potentiel de cet outil qui ne constitue pas qu'un inventaire des habitats, de la faune et de la flore, mais "bien d'une cartographie des enjeux de biodiversité à l'échelle communale". Pour les collectivités, c'est à la fois un outil d'aide à la décision et de sensibilisation. Une quarantaine de dossiers ont été retenus à l'issue du dernier AMI, sur une centaine de candidatures. Le financement par projet est compris dans une fourchette allant de 10.000 à 30.000 euros. L'Agence lancera cette année un second appel à manifestation d'intérêt, qui sera lié au dispositif "Territoires engagés pour la biodiversité".

Bientôt six ARB

Quant aux agences régionales de la biodiversité (ARB), ces dynamiques locales qui appuient les politiques publiques au service de la biodiversité, elles sont le fruit de démarches constructives entre le conseil régional, les services de l'Etat, les agences de l'eau et les directions régionales de l'AFB. La première ARB à avoir vu le jour est celle d'Ile-de-France. "Des partenariats ont été signés pour créer de nouvelles agences dans six régions : Centre-Val de Loire, Bourgogne Franche-Comté, Bretagne, Normandie, Nouvelle-Aquitaine et Paca", indique Christophe Aubel. A Mayotte et en Occitanie, le processus partenarial est engagé avec la Région. Dans les Hauts-de-France, Pays de la Loire et Auvergne-Rhône-Alpes, aucun processus de création n'est engagé. Mais Christophe Aubel ne leur en veut pas, "les régions sont maîtres de leur destin et explorent d'autres voies pour mobiliser et quelles que soient ces voies, nous les suivons et les soutenons", conclut-il.