E-administration - La transmission dématérialisée de l'état civil entre en expérimentation
Seize communes de Seine-et-Marne (1), dont Melun et Meaux, expérimenteront dans les prochains mois la plateforme Comedec (communication électronique des données de l'état civil) pour gérer en mode dématérialisé les demandes de vérification d'actes de naissance. Ce dispositif porté par le ministère de la Justice et mis en œuvre par l'Agence nationale des titres sécurisés (ANTS) est pour l'instant limité à la réalisation des passeports et à l'usage des notaires. Mais il prélude au déploiement d'un chantier de longue haleine couvrant l'ensemble des données d'état civil (naissance, mariage, décès…), y compris la transmission des mentions marginales entre communes, prévue dans la version 2 de Comedec. Un premier essai concluant a été récemment réalisé en mairie de Melun avec l'envoi par un notaire de demandes de confirmation d'état civil. La ville a répondu dans les conditions de fonctionnement de la nouvelle procédure, par un flux de données (au format XML) et une signature dans l'application.
Une simplification immédiate pour l'usager
Ce premier échange - réalisé, il est vrai, près de huit mois après l'inauguration officielle du dispositif par le garde des Sceaux de l'époque, Michel Mercier, à Coulommiers - marque le coup d'envoi d'une nouvelle génération de téléservices destinée à simplifier la démarche de l'usager. Ici, plus de demande directe à effectuer auprès de sa mairie de naissance, mais une simple déclaration à l'organisme demandeur (une administration, un notaire ou un organisme social) qui se chargera des formalités de vérification auprès de la mairie concernée. La sécurité est également renforcée. Le remplacement de l'attestation papier par un flux de données devrait annuler les risques de fraude documentaire, qui restent le principal point faible des procédures actuelles. Autre intérêt, cette fois pour les administrations : une meilleure productivité et des économies de fonctionnement avec l'arrêt de la logistique "papier" qui comprend l'impression de l'acte, sa validation par l'officier d'état civil, l'envoi d'un courrier, sans oublier les coûts d'affranchissement.
Gestion des cartes de signature : un nouveau métier
Sur le plan des principes, l'adhésion des communes au nouveau dispositif demeure libre. Une convention signée entre chaque mairie, l'ANTS et le ministère de la Justice définit les modalités de fonctionnement et d'organisation. Les mairies devront être dotées d'un logiciel intégrant les fonctions de communication avec Comedec ou, dans le cas contraire, utiliser un portail en ligne dédié. L'accès au réseau est sécurisé par une carte d'authentification individuelle, fournie gratuitement aux communes, permettant aux officiers d'état civil de signer électroniquement la validation des demandes d'état civil. "Le passage en mode dématérialisé requiert des adaptations mais reste relativement aisé à maîtriser", estime un responsable ayant testé la procédure. En revanche, la gestion des cartes d'identification et de signature est plus complexe. De l'avis des promoteurs de Comedec, elle devient même "un métier à part entière". La sécurité repose en effet sur l'intégrité de la distribution et de la gestion de plusieurs dizaines de milliers de cartes. Chaque mairie aura la responsabilité de gérer l'habilitation ou la révocation de ses propres agents, notamment au moment des changements d'affectation. Cette gestion devrait comprendre deux étapes :
- la désignation d'un administrateur Comedec chargé de l'inscription des agents et de la déclaration de leurs droits,
- la création d'une autorité d'enregistrement déléguée relative à la gestion du processus d'obtention des cartes au niveau de chaque commune. Chaque maire pourra déclarer deux types de droits d'utilisateurs : ceux qui vérifient les données transmises et ceux qui vérifient et signent la réponse au moment de l'envoi.
Une première phase pour valider la plateforme et la procédure
Aujourd'hui, la plateforme Comedec est opérationnelle, sous réserve des modifications qui seront apportées à l'issue des six mois d'expérimentation prévus. Pour amorcer la conduite du changement et préparer les acteurs publics locaux à la nouvelle procédure, un accord a été conclu avec le CNFPT, qui va monter des formations sur la nouvelle procédure et sur la distribution et la gestion des cartes de signature. D'autres éléments également nécessaires semblent plus en retard par rapport à la feuille de route. La certification "RGS trois étoiles" des cartes de signature ne sera pas acquise avant la fin de l'année, ce qui impose aux expérimentateurs le maintien d'un double circuit électronique et papier. Quant aux principaux éditeurs, ils sont engagés dans l'adaptation de leurs applications au protocole d'échange Comedec mais seuls deux sont opérationnels et trois autres le seront d'ici la fin de l'année (2). Malgré ces décalages, l'expérimentation en Seine-et-Marne devrait permettre de valider le dispositif du point de vue des différents acteurs : à la préfecture de mesurer l'impact des remises de carte et les modalités de traitement d'un dossier avec réponse dématérialisée ; aux mairies de mesurer l'impact de la procédure électronique et de la gestion des cartes de signature ; aux notaires de valider techniquement la fourniture des actes en version électronique.
Risques de ralentissement
La gestion optimisée du temps demeure l'une des difficultés de ce chantier ambitieux. Or, les retards accumulés depuis le démarrage ralentissent le déploiement et pourraient se révéler coûteux. La dématérialisation représenterait une économie de plusieurs dizaines de millions d'euros et pourrait réduire sensiblement le taux d'usurpation d'identité. Qu'attendre maintenant de la Chancellerie pour faciliter les choses ? On peut espérer, par exemple, que la demande d'utilisation d'une carte de signature unique pour tous les échanges de données avec l'Etat, régulièrement réitérée par les associations d'élus, sera finalement entendue. Mais au-delà de la bonne volonté, les moyens mobilisés pour tenir les objectifs et les délais seront déterminants pour la suite.
(1) Meaux, Chelles, Coulommiers, Provins, Melun, Lagny-sur-Marne, Torcy, Bussy-Saint-Georges, Pontault-Combault, La Ferté-Gaucher, Lieusaint, Moissy-Cramayel, Dammarie-les-Lys, Montereau-Fault-Yonne, Saint-Mammès et Nemours.
(2) Opérationnels : Logitud et Digitech. En phase terminale d'adaptation : Berger-Levrault, Arpège et JVS.