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Communication - La protection des noms de commune n'est pas sans limites

Le Code de la propriété intellectuelle est-il moins protecteur que le droit de l'internet ? Alors qu'un décret du 8 février 2007 vient renforcer la protection des collectivités territoriales et des élus dans l'enregistrement et la gestion de leurs noms de domaine en ".fr", une ordonnance du tribunal de grande instance (TGI) de Nanterre en date du 30 janvier 2007 rappelle au contraire que la protection des noms de commune n'est pas sans limites.
Dans cette affaire, la ville de Levallois-Perret (Hauts-de-Seine) avait assigné, devant le TGI de Nanterre, Loïc L., habitant de la commune et, par ailleurs, conseiller municipal d'opposition. La ville reprochait notamment à l'intéressé d'avoir mis en ligne un site intitulé "Levallois TV" et enregistré sous l'adresse www.levallois.tv. Elle estimait que l'intitulé du site était susceptible de créer "un risque de confusion avec son site internet et plus généralement avec la commune elle-même". La ville faisait notamment valoir que la page d'accueil comportait une photo de l'hôtel de ville, susceptible d'accroître encore le risque de confusion.
Appelée une première fois, l'affaire avait été repoussée de quelques jours après que le tribunal avait constaté que Loïc L. avait retiré de son site la photo de la mairie. Dans son ordonnance de référé du 30 janvier 2007, le TGI déboute la ville d'interdiction du site. L'ordonnance rappelle à la fois que "les noms de commune comme, de manière plus générale, les noms géographiques ne font pas l'objet d'une protection particulière". S'appuyant sur le Code de la propriété intellectuelle, le TGI considère néanmoins que "le nom officiel Levallois-Perret ou même le nom d'usage courant Levallois constitue un signe distinctif essentiel pour la commune demanderesse qui doit pouvoir être identifiée sans risque de confusion". Mais, en l'espèce, le tribunal observe que "le titre Levallois TV est associé à une photographie identitaire de Loïc L. ainsi qu'à son nom et son adresse e-mail, de telle sorte que l'internaute d'attention moyenne comprend immédiatement qu'il se trouve sur un site créé par un particulier". L'ordonnance de référé relève également que le site incriminé ne reprend pas la couleur bleue et le personnage de l'abeille, caractéristiques du site officiel de la ville. Le TGI de Nanterre en conclut que "la présentation du site www.ville-levallois.fr et celle du site www.levallois.tv sont très différentes visuellement de telle sorte que leur point commun se limite à l'emploi du terme Levallois, qui ne peut suffire à caractériser un risque de confusion". En refusant la demande reconventionnelle de Loïc L. et sa demande de publication du jugement, l'ordonnance de référé reconnaît toutefois que la version du site antérieure à l'assignation en justice - avec la photo de l'hôtel de ville en page d'accueil - a pu "amener la commune de Levallois-Perret à croire de bonne foi en la réalité d'un risque de confusion".

 

Jean-Noël Escudié / PCA

 

Référence : Tribunal de grande instance de Nanterre, ordonnance de référé du 30 janvier 2007, commune de Levallois-Perret c/ Loïc L., 1 & 1 Internet.