Logement des jeunes - La part des 18-29 ans habitant chez leurs parents augmente depuis 2000
Alors que le gouvernement affiche une politique volontariste en faveur de l’accès au logement des jeunes, l’Insee rappelle que depuis le début des années 2000 le taux de cohabitation des 18-29 ans chez leurs parents est en constante augmentation. Soit que les jeunes n’aient jamais quitté le domicile parentale (génération "Tanguy"), soit qu’ils y soient revenus après un accident de la vie (génération "Boomerang").
La députée LREM Fiona Lazaar a donné l’occasion à Jacques Mézard de présenter sa politique en faveur du logement des jeunes, le 31 janvier lors des questions au gouvernement. Le ministre de la Cohésion des territoires a rappelé l’objectif de construction de 80.000 logements sur le quinquennat ("c’est-à-dire un doublement de la production", a-t-il précisé) dont 60.000 pour les étudiants et 20.000 pour les jeunes actifs, avec des financements venant du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, des Crous, du Fnap (fonds national des aides à la pierre) et du ministère des Outre-Mer. Jacques Mézard a évoqué la convention 2018-2022 signée entre l’Etat et Action Logement le 16 janvier qui prévoit un cofinancement pour la réalisation de 40.000 logements sur cinq ans dont 20.000 pour les jeunes actifs et la pérennisation du dispositif de caution locative Visale.
Le ministre a enfin cité le futur projet de loi Elan ("Evolution du logement et aménagement numérique") pour les mesures visant à faciliter la colocation. Il n’a pas mentionné la création du "bail de mobilité professionnelle", également annoncé dans Elan, peut-être pour ne pas prêter le flanc à la polémique (initialement présenté comme un dispositif visant à faciliter la mobilité des étudiants et des personnes en mobilité professionnelle, en contrat d'apprentissage ou en stage, il serait finalement ouvert à tous les publics).
"La face cachée des 'Tanguy'"
"Depuis 2000, la part des 18-29 ans habitant chez leurs parents augmente à nouveau", titre un numéro d’Insee Première daté de janvier 2018. Le phénomène n’est pas nouveau, et d’ailleurs les chiffres avancés s’appuient sur l’enquête Logement 2013. Dans une étude intitulée "La face cachée des 'Tanguy' : les jeunes en hébergement contraint chez leurs parents" et publiée fin 2015, la fondation Abbé-Pierre avait déjà fait parler les chiffres de l’ENL 2013 pour alerter les pouvoirs publics sur la nécessité d’une politique en faveur de l’accès au logement spécifique aux jeunes (voir notre article ci-dessous du 10 décembre 2015).
En 2013 donc, près d’un jeune adulte de 18 à 29 ans sur deux (46 %) habitait chez ses parents tout ou partie de l’année. Dans les DOM (hors Mayotte), le taux de cohabitation monte même à 63,3%. "Après une diminution amorcée au milieu des années 1990, le taux de cohabitation avec les parents a de nouveau augmenté depuis le début des années 2000, poussé par la hausse du chômage et de la population étudiante", commente l’Insee. Les taux de cohabitation sont en effet de 58,5% pour les jeunes chômeurs et de 69,2% pour les étudiants. L’Insee remarque également que les jeunes travailleurs qui vivent toujours chez leurs parents sont moins bien insérés dans l’emploi : "moins souvent cadres ou professions intermédiaires, ils occupent plus fréquemment des emplois à durée limitée".
Autonomie résidentielle n’est pas synonyme d’indépendance financière
Même pour ceux qui n’habitent plus chez leurs parents, "autonomie résidentielle n’est pas synonyme d’indépendance financière", constate l’Insee en indiquant que "le plus souvent, les jeunes adultes qui ont quitté le domicile parental reçoivent une aide financière de leurs parents". Il peut s’agir d’une aide financière directe et régulière, d’une pension alimentaire ou du paiement du loyer. Sans surprise, parmi les plus jeunes, ce sont surtout les étudiants qui bénéficient de cette aide et chez les 25-29 ans, ce sont surtout les chômeurs.
Des retours pour cause de perte d'emploi, rupture conjugale, santé d’un des parents...
Parmi les 25-29 ans vivant chez leurs parents, un jeune sur cinq est parti puis revenu, et un sur quatre après 30 ans. Pour ces jeunes de la génération "boomerang", les raisons invoquées pour expliquer ce retour sont fréquemment associées à des accidents de la vie, comme la perte d’un emploi ou une rupture conjugale. Mais "d’autres raisons sont liées à l’âge, comme, par exemple, pour les plus âgés, la nécessité de revenir s’occuper d’un parent ou encore des problèmes de santé". Quoi qu’il en soit, "le souhait de partir est plus fort pour ceux qui sont revenus habiter chez leurs parents", souligne l’Insee. Et pour ceux qui n’envisagent pas de partir, c’est la plupart du temps par manque de moyens financiers nécessaires.
A noter que "les velléités de départ diminuent avec l’âge, à la fois peut-être par réalisme financier, mais aussi à cause de contraintes supplémentaires, telles que leur état de santé ou celui de leurs parents". Alors, la politique en faveur de l’accès au logement des jeunes rencontre celle du maintien à domicile des personnes âgées...