Décentralisation - La loi Mapam publiée au JO... et maintenant ?
On parlera désormais de la "loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles". Neuf mois après sa présentation en Conseil des ministres, le premier des trois textes portés par Marylise Lebranchu, dit loi Mapam, a été publié au journal officiel ce 28 janvier. Cette publication était imminente depuis que le Conseil constitutionnel avait validé le 23 janvier la quasi-totalité des dispositions du texte.
Le ministère en charge de la décentralisation a profité de la décision du Conseil constitutionnel pour mettre en avant les points saillants de cette loi qui constitue désormais selon lui "la première étape" d'une "réforme territoriale d'envergure" : "détermination par la loi de collectivités territoriales chefs de file", création des conférences territoriales de l'action publique, création de trois métropoles dotées d'un statut particulier (Grand Paris, Lyon, Aix-Marseille-Provence), nouveau statut de métropole pour les grands pôles urbains, création de "pôles d'équilibre territoriaux et ruraux", instruments d'un aménagement équilibré du territoire, création de la compétence "gestion des milieux aquatiques", dépénalisation du stationnement payant. On remarquera que le ministère n'insiste pas en revanche sur l'article 1er venu rétablir la clause générale de compétences…
Seul petit bémol du Conseil constitutionnel : celui-ci a jugé que la loi "ne pouvait (...) autoriser de façon pérenne" le cumul du mandat de maire d'une commune de la métropole avec celui de président du conseil de la métropole. Elle n'a pas censuré la disposition attaquée, mais a fait une "réserve de constitutionnalité" en déclarant que ce cumul ne pourra perdurer au-delà du premier renouvellement des conseils municipaux suivant la création de la métropole. Conséquence concrète : s'il a la majorité dans l'agglomération lyonnaise lors des municipales de mars prochain, Gérard Collomb pourra à la fois diriger la ville de Lyon et la métropole jusqu'en mars 2020. Le Conseil constitutionnel a en revanche écarté tous les autres griefs portés par les parlementaires de l'opposition qui avaient déposé le recours.
Nouvelles "orientations" : les élus locaux se positionnent
Le lendemain de cette décision, l'Association des maires de France (AMF) s'est exprimée, non pas directement sur ce texte… mais sur l'étape suivante, autrement dit sur le nouveau cap donné depuis peu par l'exécutif en matière de décentralisation (voir nos articles ci-contre). Rappelons que l'on sait désormais que les deux autres projets de loi qui avaient été préparés en même temps que la loi Mapam et bel et bien déposés au Parlement (le "projet de loi de mobilisation des régions pour la croissance et l'emploi et de promotion de l'égalité des territoires" et le "projet de loi de développement des solidarités territoriales et de la démocratie locale") resteront finalement lettres mortes. Et qu'un nouveau texte, dont la présentation en Conseil des ministres est annoncée pour début avril, viendra les remplacer. Un texte qui viendra entre autres mettre l'accent sur la régionalisation… et qui pourrait fort faire marche arrière sur la clause de compétence générale rétablie par la loi qui vient tout juste d'être publiée !
"Prenant acte" de ces nouvelles "orientations", l'AMF espère que le futur projet de loi sera un "texte court et clair", une "loi-cadre concentrée sur l'essentiel". Sur ce point, cela colle à peu près avec ce que Marylise Lebranchu a eu l'occasion de dire : la ministre espère que l'on fera court et simple.
Les représentants des maires demandent également que le gouvernement tienne compte "des projets de loi en cours de finalisation", citant à ce titre le projet de loi Alur de retour au Sénat en deuxième lecture, le projet de loi Lamy sur la politique de la ville qui doit prochainement passer en commission mixte paritaire…
L'AMF souligne aussi qu'il faudra évaluer "l'impact financier du nouveau texte". On n'en est pas encore là : "Franchement, personne aujourd'hui n'est en mesure de vous dire 'voilà, on va faire tant d'économies'", déclarait Alain Vidalies le 22 janvier. Et qu'il faudra prendre "enfin en compte" les propositions de l'association.
Enfin, les maires et présidents d'intercommunalité font valoir qu'ils "vont avoir besoin de lisibilité" - et ce, "dès le lendemain des élections municipales". Un vœu qui ne semble guère évident… On a notamment entendu Marylise Lebranchu évoquer "de nouveaux seuils pour l'intercommunalité" alors même que la carte intercommunale née de la loi de 2010 n'est pas encore totalement digérés, que pas mal de territoires sont en plein chantier de mutualisation, que le plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi) dessiné par le projet de loi Alur crée des crispations…
Autre association d'élus à se mettre en ordre de marche pour être entendue dans le cadre de la préparation du futur projet de loi de décentralisation, l'Assemblée des départements de France (ADF), qui vient de décider la mise en place d'un groupe de travail dédié, coprésidé par André Viola et Charles Buttner, présidents du conseil général de l'Aude et du Haut-Rhin. Ouvert à tous les départements qui le souhaitent, ce groupe de travail, dont la première réunion doit avoir lieu le 5 février, devra préparer une "plateforme commune de propositions concrètes". En sachant qu'il n'y a pas eu de sollicitation gouvernementale en ce sens : "Les associations d'élus, on sait déjà par cœur ce qu'elles veulent", a récemment déclaré à la presse Marylise Lebranchu...
Le gouvernement, de son côté, semble avancer sur le sujet puisqu'après une réunion à l'Elysée la semaine dernière, une autre réunion de travail sur la décentralisation avait lieu ce 28 janvier, cette fois à Matignon sous la houlette de Jean-Marc Ayrault. De tels rendez-vous devraient se succéder "toutes les trois semaines", indique Marylise Lebranchu.