Accès aux soins - La franchise sur l'aide médicale va être supprimée
Le long feuilleton de la réforme de l'aide médicale de l'Etat (voir nos articles ci-contre) se prépare à connaître un nouvel épisode. A l'occasion d'une table ronde consacrée à "La lutte contre l'exclusion", le 2 juillet 2012, Marisol Touraine a en effet annoncé la suppression prochaine de la franchise médicale de 30 euros instaurée l'an dernier dans le cadre de la réforme de l'AME. La ministre des Affaires sociales et de la Santé a précisé que cette mesure "fera l'objet d'un texte de loi qui sera présenté dans les prochains jours".
La franchise a elle-même été mise en place par la loi de finances pour 2011 du 29 décembre 2010. Celle-ci prévoit que l'accès à l'AME est conditionné par le versement d'un "droit annuel" de 30 euros par bénéficiaire majeur. L'apport financier de cette mesure devait être très limité (environ 6 millions d'euros, à comparer aux près de 600 millions de dépenses annuelles), mais le gouvernement de François Fillon en attendait à la fois un effet dissuasif et de responsabilisation (sur le modèle du ticket modérateur d'ordre public).
L'annonce faite par Marisol Touraine n'est pas une surprise, car la mesure figurait dans le programme présidentiel de François Hollande. La gauche s'était d'ailleurs vivement opposée à l'instauration du droit annuel de 30 euros, rejointe en cela par les inspections générales des affaires sociales (Igas) et des finances (IGF) qui, dans leur rapport sur le sujet, "ne [recommandaient] pas la mise en oeuvre d'un droit d'entrée pour l'AME" ou suggéraient, à tout le moins, la réalisation d'une étude d'impact (voir notre article ci-contre du 6 janvier 2011). En outre, le dispositif du "droit annuel" ne semble pas d'une grande efficacité au regard de ses objectifs initiaux.
Mais la décision de le supprimer laisse entières deux autres questions. La première concerne le sort des autres composantes de la réforme de l'AME. Seront-elle conservées ? Ceci vise aussi bien les autres dispositions figurant dans la loi de finances pour 2011 - comme l'accord préalable pour les soins hospitaliers lourds - que celles issues de la loi du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité (et notamment la question de la disponibilité ou non d'un traitement similaire dans le pays d'origine). Le projet de loi évoqué par la ministre devrait apporter les précisions nécessaires sur ce point.
Le seconde question concerne l'évolution des dépenses d'AME, qui est à l'origine des différentes réformes de ce dispositif mis en place en 2000. Le problème ne vient pourtant pas véritablement du montant de ces dépenses : selon le rapporteur des crédits de la mission Santé au Sénat pour le budget 2011, "l'augmentation des dépenses liées à l'AME au cours des huit dernières années, soit 43%, [n'est] pas disproportionnée par rapport à celle de l'objectif national des dépenses d'assurance maladie (Ondam), de 35%, d'autant que l'état de santé moyen des titulaires de l'AME est vraisemblablement moindre que celui de la population générale". En revanche, le montant de ces dépenses a été systématiquement sous-évalué dans les lois de finances initiales. Dans un contexte de forte contrainte budgétaire, il sera donc intéressant de connaître le montant inscrit à ce titre par le gouvernement dans le projet de loi de finances rectificative pour 2012 et de loi de finances pour 2013.