Handicap - La France condamnée pour le manque d'intégration des enfants autistes
Dans une décision rendue publique le 5 février, le comité des droits sociaux du Conseil de l'Europe condamne la France pour sa politique à l'égard de l'intégration des enfants autistes. Le comité avait en effet été saisi d'une réclamation présentée par Action européenne des handicapés (AEH), estimant que la France ne respectait pas la charte européenne des droits sociaux, et plus particulièrement ses articles 10 (droit à la formation professionnelle) et 15 (droit des personnes handicapées à l'autonomie, à l'insertion sociale et à la participation à la vie de la communauté).
Condamnation à l'unanimité sur l'intégration scolaire
La décision du comité commence par procéder à un - très - long exposé de la situation, avec présentation détaillée des arguments de l'AEH et arguments en défense du gouvernement français. A l'issue de cette phase contradictoire, le comité européen des droits sociaux conclut néanmoins, à l'unanimité, qu'il y a violation de l'article 15 (paragraphe 1) : "en ce qui concerne le droit des enfants et adolescents autistes à la scolarisation en priorité dans les établissements de droit commun ; en ce qui concerne le droit à la formation professionnelle des jeunes autistes ; en ce qui concerne l'absence de prédominance d'un caractère éducatif au sein des institutions spécialisées prenant en charge les enfants et les adolescents autistes".
De façon plus serrée (9 voix contre 4), le comité conclut également qu'il y a violation par la France de l'article E (interdisant toutes les discriminations) combiné avec l'article 15 (paragraphe 1), "parce que les familles n'ont pas d'autre choix que de quitter le territoire national aux fins de scolarisation en milieu scolaire spécialisé de leurs enfants autistes, ce qui constitue une discrimination directe à leur encontre".
Enfin, par 8 voix contre 5, le comité conclut "qu'il y a violation de l'article E combiné avec l'article 15 (paragraphe 1), en raison du contexte budgétaire restreint appliqué au plan Autisme concernant la scolarisation des enfants et adolescents autistes qui désavantage indirectement ces personnes handicapées".
Marie-Arlette Carlotti se défend
A peine la décision du comité rendue publique, Marie-Arlette Carlotti a réagi par un bref communiqué. Comme il est de règle, la ministre déléguée chargée des Personnes handicapées et de la Lutte contre l'exclusion explique que "cette condamnation vient sanctionner des années d'immobilisme dans ce domaine". Si elle ne répond pas vraiment aux trois points soulevés par le comité - et notamment le dernier -, la ministre indique toutefois vouloir "que cette condamnation soit la dernière".
Elle met en particulier en avant la création de 700 places en unité d'enseignement en maternelle - avec l'objectif à terme d'une unité par département -, le recrutement de 10.000 AVS supplémentaires en deux ans et la proposition d'un contrat à durée indéterminée à 28.000 AVS déjà en place. Pour Marie-Arlette Carlotti : "La condamnation par le Conseil de l'Europe me conforte dans mes choix et dans ma détermination". Pas de réaction en revanche du côté du ministre de l'Education.
Jean-Noël Escudié / PCA
Référence : Conseil de l'Europe, comité des droits sociaux, décision du 11 septembre 2013 sur le bien-fondé de la réclamation n°81/2012 présentée par Action européenne des handicapés (AEH) contre la France (rendue publique le 5 février 2014).
Les Français acceptent l'autisme, mais le connaissent mal
Difficile de croire au hasard : l'Ifop publie, la 4 février, les résultats d'un sondage sur "Les Français et l'autisme", réalisé pour le compte de l'association SOS Autisme France. Menée auprès d'un échantillon de 1.002 personnes représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus, cette étude montre que 95% des répondants accepteraient que leur enfant soit en classe, en cours de sport ou de musique avec un enfant autiste. Mais au-delà de cette réponse encourageante, le sondage montre surtout une forte méconnaissance de l'autisme. Les Français ont ainsi de l'autiste la vision de quelqu'un "de très calme avec les yeux dans le vague" (53%) contre 26% qui le voient au contraire comme quelqu'un"de très agité et plutôt violent". Effet "Rain Man" oblige, 59% des répondants pensent qu'un autiste est quelqu'un "de plus intelligent que la moyenne", contre 10% qui pensent le contraire (31% ne se prononçant pas). Près de trois Français sur cinq (59%) disent pourtant avoir déjà rencontré, dans un lieu public ou dans leur entourage, une personne autiste.