E-administration - La DGME veut accélérer le passage des expérimentations à la généralisation
C'est une évolution à défaut d'être une révolution. Depuis 18 mois, la direction générale de la modernisation de l'Etat (DGME) a mis en œuvre un nouveau dispositif pour accélérer la dématérialisation des procédures administratives en direction des particuliers, des entreprises, des associations et des collectivités territoriales. "Il s'agit d'un dispositif d'écoute de l'usager pour optimiser et améliorer le service", a répété Nicolas Conso, chef du service Innovation. "Mettre l'usager au centre", en faire le "moteur principal" des réformes n'a pourtant rien de neuf dans le discours. C'est même une constante depuis le ministre à la Réforme de l'Etat Michel Sapin dès 2000. "C'est dans la méthode et l'axe d'analyse que nous avons innové", a poursuivi Nicolas Conso. Pour éviter de raisonner "en silo", la démarche administrative n'est plus prise en tant que telle et dématérialisée de bout en bout (avec les retards et les points de rematérialisation obligé désormais bien connus) mais en tant qu'événement de vie déclencheur de service administratif : "je me marie, je déménage, je perds un proche...". Une logique que la DGME applique non seulement au grand public mais aussi aux collectivités.
Ensemble simplifions !
Pour identifier les services à dématérialiser en priorité, la DGME s'est ainsi appuyé sur une étude menée auprès de 800 collectivités interrogées, "de tout type et de toute taille : régions, départements, villes...". Elle a ensuite constitué un réseau de collectivités volontaires qui se sont déjà réunies au moins trois fois. Ce réseau s'organise en cinq à sept groupes de travail thématiques qui rassemblent les associations d'élus et des collectivités. "C'est ainsi que nous avons identifié la déclaration d'intention d'aliéner (DIA) comme une démarche prioritaire qui concerne près de 500.000 échanges par an entre les collectivités et les notaires", a expliqué le chef de service. Autre outil de consultation, le site participatif "Ensemble simplifions". Lancé au début de l'année, il offre de voter sur les propositions existantes de simplification ou d'en soumettre de nouvelles. "200 suggestions sont ainsi remontées des particuliers et des entreprises et quelques dizaines des collectivités", a reconnu Nicolas Conso. Mais sa fréquentation aurait doublé depuis septembre (20.000 visites).
Mon service public
"Au deuxième semestre 2009, nous avons écouté et agi !", a lancé Arnaud Lacaze, chef du service Projets. Cette démarche pragmatique a conduit aux annonces des services disponibles au niveau électoral, pour le recensement, et les demandes de subvention, du 19 octobre dernier. Il reste désormais à convaincre les Français à davantage utiliser ces nouveaux services notamment au travers du portail unique sécurisé "Mon service public". Selon Arnaud Lacaze, plus de 300.000 comptes auraient été créés à la mi-décembre ce qui pourrait laisser présager "3 millions d'inscrit en 2010". D'après les données d'usage, le rythme moyen des visites est mensuel ce qui semble logique au vu des services actuellement disponibles : essentiellement les relevés de paiement des prestations sociales. Dans une logique de guichet unique, les collectivités peuvent demander à être raccordées à ce service, en lien avec les éditeurs de progiciels pour les inscriptions à la crèche, à la cantine scolaire, etc.
Inscription électorale, recensement citoyen, demande de subvention
Trois communes pilotes expérimentent déjà l'inscription en ligne sur les listes électorales : Le Havre, Issy-les-Moulineaux et Aixe-sur-Vienne. "Elles seront rejointes début janvier par Marcq-en-Baroeul. Nous avons recueilli une centaine d'adhésion de communes au dernier Salon des maires et des collectivités locales. Il nous faut désormais attirer des communes plus peuplées", a indiqué Arnaud Lacaze. Des contacts seraient bien avancés avec Lyon, Paris et Marseille. Ce service concerne potentiellement les 2 millions de personnes qui déménagent chaque année. Il s'agit pour le moment de l'envoi de la demande par e-mail à la commune via un point d'entrée unique mais "nous pouvons nous adapter à ce que fait la commune en utilisant un flux XML", a précisé le chef du service Projets.
Avec le service de recensement dématérialisé, "nous avons bien conscience de cibler les citoyens que les maires ont le plus envie de choyer", a reconnu Arnaud Lacaze. Ce service devrait d'ailleurs être le premier disponible sur mobile prochainement avec celui de la démarche d'embauche simplifiée pour les entreprises.
Autre démarche qui devrait concerner à terme les collectivités, le développement "en trois mois" d'une nouvelle version du service de demande de subvention en ligne pour les associations qui vient d'être lancée, ce 17 décembre.
Raccourcir les cycles et proportionner la sécurité
"Nous sommes dans une logique pragmatique : nous identifions les besoins ; nous lançons un cycle de développement court puis une expérience pilote ; nous améliorons éventuellement le service puis le généralisons", a résumé Nicolas Conso. Ainsi la nouvelle version du changement d'adresse en ligne devrait être disponible début 2010. "Un système pourrait proposer en parallèle, l'inscription automatique sur les listes électorales de la communes d'emménagement", évoque Arnaud Lacaze. Mais pour entrer dans une véritable gestion de la relation citoyenne, il reste encore à donner confiance. "L'idée est d'avoir une approche proportionnée de la sécurité informatique. Trop souvent, les services bâtissent des murs, des fossés, des coffres et ce demandent après ce qu'il y a de si précieux à protéger", a témoigné Arnaud Lacaze. Si la DGME qui dépend du ministère de l'Economie a dans ce domaine une approche mesurée, ce n'est pas le cas d'autres ministères comme celui de l'Intérieur ou de la Justice ce qui ralentit les processus de changement. Même Jean Dionis du Séjour, député-maire d'Agen et président de la commission TIC de l'Association des maires de France, le confiait récemment à Localtis : "Désormais, il faut oser : oser le côté électronique dans des situations bien définies, oser la carte d'identité et la signature électroniques..." Les décrets d'application du référentiel général de sécurité (RGS) - dont la dernière version sert déjà dans les cahiers des charges des appels d'offres des administrations locales et nationales - seraient enfin à la signature sur le bureau du Premier ministre.
Luc Derriano / EVS
La France juste dans la moyenne au niveau européen
Selon la huitième étude comparative de la Commission, rendue publique à l’occasion de la conférence européenne de l’administration en ligne de novembre dernier à Malmö (Suède), la France se classe à la dixième ou onzième place en matière de services en ligne (suivants les critères retenus). Le taux d’utilisation de l’administration électronique est de 43% pour les particuliers, au-dessus de la moyenne européenne (28%), et de 75% pour les entreprises, contre 68% en moyenne au niveau de l’Union. Ces moyennes cachent cependant une réalité moins flatteuse. L'étude pointe notamment un déficit d'offre de services et des sites souvent beau mais pas assez efficace ! "L'étude a été conduite début 2009, alors que 'Mon service public' était encore balbutiant et que seulement la moitiés des téléprocédures étaient disponibles", a justifié Arnaud Lacaze.
L.D.