Journée nationale contre la précarité énergétique 2024 : plus de 160 événements locaux au programme

L'édition 2024 de la Journée nationale contre la précarité énergétique, coorganisée par 23 associations, va donner lieu à un peu plus de 160 événements locaux partout en France pour alerter opinion et décideurs sur un phénomène qui ne cesse de prendre de l'ampleur depuis la crise énergétique.

Conférences, visites de chantiers, ateliers de sensibilisation, actions militantes… : sur tout le territoire, plus de 160 événements figurent déjà au programme de la quatrième Journée nationale de la précarité énergétique qui se tiendra le 12 novembre prochain. Coorganisée par 23 associations, parmi lesquelles la fondation Abbé-Pierre, le réseau Action Climat, les collectif Rénovons et Stop à l'exclusion énergétique, Amorce, le réseau Cler, la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR), l'édition 2024 bénéficie pour la première fois de l'appui d'un comité de soutien dans lequel figurent notamment Régions de France et plusieurs grandes villes et métropoles (Aix-en-Provence, Besançon, Paris, Métropole européenne de Lille, Métropole Grand Lyon, Nantes Métropole, Strasbourg Eurométropole). L'objectif de cette journée est d'alerter une nouvelle fois sur un fléau qui n'a cessé de s'étendre ces dernières années, soulignent les associations, en s'appuyant sur les derniers chiffres publiés par le médiateur de l'énergie dans son baromètre 2024 (lire notre article).

Une précarité qui s'aggrave

"La précarité énergétique concerne les 30% de ménages les plus fragiles en termes de revenus qui déclarent souffrir du froid chez eux ou ont un taux d'effort excessif de leurs dépenses énergétiques", a rappelé ce 5 novembre Christophe Robert, délégué général de la fondation Abbé-Pierre, lors de la conférence de presse de présentation de la prochaine Journée nationale. "Elle est à la fois une cause et une conséquence de la pauvreté et va souvent de pair avec d'autres formes de précarité", a-t-il souligné. Sur les 12 millions de personnes souffrant de précarité énergétique, 60% sont locataires. Mais ce chiffre des 12 millions n'a pas pu être actualisé depuis la dernière enquête nationale logement, datant de 2012, a relevé Christophe Robert et tout porte à croire que les indicateurs se sont aggravés, estime-t-il, en citant les chiffres du médiateur de l'énergie pour 2024. 30% des ménages ont ainsi déclaré avoir souffert du froid pendant au moins 24 heures dans leur logement l'an dernier contre 14% en 2020, et 42% de la chaleur (+26% en 10 ans). 75% des foyers réduisent leur chauffage pour ne pas avoir leurs factures trop élevées (6 points de plus qu'en 2022) tandis que le cap du million d'interventions pour impayés de factures d'énergie - dont 178.000 coupures d'électricité – a été franchi en 2023 (+49% depuis 2019).

Conséquences sur la santé

En cause, pour les associations : la hausse des prix de l'énergie et la baisse des niveaux de protection, avec la fin des boucliers tarifaires, et la mauvaise qualité des logements. Le nombre de passoires thermiques (classes F et G) est ainsi évalué à 4,8 millions. Une situation qui a un impact direct sur la santé, relèvent-elles. 48% des adultes exposés à la précarité énergétique souffrent de migraines et 22% de bronchites chroniques contre 32% et 10% des personnes qui n’y sont pas exposées. Les enfants exposés, quant à eux, souffrent à 30% de sifflements respiratoires, contre 7% chez les autres. Selon une étude du ministère de la Transition écologique, la rénovation des 1,7 million de passoires énergétiques du parc locatif privé d’ici à 2028 et des 1,9 million de logements dont le diagnostic de performance énergétique (DPE) est classé E d’ici 2034 permettrait de prévenir le décès de 10.000 personnes. Une étude de France Stratégie, en 2022, a estimé que 30% de la surmortalité hivernale serait due à l’inefficacité énergétique des logements, soit 10.350 décès par an. Selon la même source, le coût moyen annuel de santé pour les ménages vivant dans des logements concernés par le risque de températures intérieures basses s’élèverait à 7.500 euros. Ce coût atteindrait même 33.000 euros pour les ménages en dessous du seuil de pauvreté.

Inquiétudes sur le projet de loi de finances pour 2025 

L'éradication des passoires thermiques en 10 ans ferait économiser 700 millions d'euros chaque année sur le système de soin, mettent encore en avant les associations qui s'inquiètent des orientations du projet de loi de finances (PLF) pour 2025 en matière d'aides aux ménages et de soutien de la rénovation énergétique. Elles réclament à la fois le triplement du chèque énergie, soit un montant moyen de 450 euros, et l’élargissement de ses conditions d’éligibilité, pour concerner les 30% des ménages les plus modestes particulièrement affectés par la hausse des prix de l’énergie. "Cela viendrait en remplacement d’un bouclier tarifaire inéquitable qui a déjà coûté 100 milliards d’euros depuis 2021", arguent-elles. Elles jugent également "impératif" de conserver le seul critère du revenu fiscal de référence pour obtenir un chèque énergie, en attendant qu’une solution d’identification par logement soit trouvée. Les associations redoutent tout particulièrement les effets d'éviction induits par la décision du gouvernement de généraliser en 2025 la plateforme en ligne sur laquelle les nouveaux ayants droit doivent s'inscrire pour recevoir leur chèque, les services fiscaux ne pouvant plus se fonder sur le fichier associé de la taxe d’habitation pour les résidences principales pour les repérer. Cette année, font-elles valoir, il n'y a eu via la plateforme que 120.000 demandes et 32.000 chèques délivrés, sur un million d’ayant-droits potentiels.

Ne pas oublier les bouilloires thermiques

Autre revendication chère à la fondation Abbé-Pierre : coupler politique de rénovation énergétique et lutte contre l'habitat indigne. Le collectif Rénovons défend, notamment, la nécessité de continuer à orienter vers le parcours accompagné la politique publique de rénovation énergétique et à maintenir les crédits qui lui ont été alloués, menacés de coupes d'1,5 milliard d'euros dans le PLF. Les associations soulignent aussi la nécessité de s'attaquer aux "bouilloires thermiques" et à la précarité énergétique d'été. Elles demandent en ce sens au gouvernement d'adopter une "loi de programmation de la rénovation performante des bâtiments et des quartiers, intégrant pleinement les critères de l’habitabilité en été des logements (isolation thermique performante, installation de protections solaires et de vitrages à contrôle solaire, ventilation adéquate, couleurs claires pour les murs, brasseur d’air…) et la réduction des îlots de chaleur en milieu urbain (végétalisation, désimperméabilisation des sols, ombrage des voies piétonnes, brumisation, réseaux d’eau glacée urbains, etc.)".