Rentrée des classes 2017 - Jean-Michel Blanquer met en musique son "école de la confiance"
A entendre le ministre de l'Education nationale, la prochaine rentrée des classes se fera en musique et en confiance. Au menu de sa conférence de presse de rentrée : le dédoublement de toutes les classes de CP en REP+, le financement des activités périscolaires assuré pour encore une année, le dossier des contrats aidés à étudier "au cas par cas", l'ambition interministérielle d'une politique en faveur de la scolarisation des élèves handicapés et, pour 2018, de nouvelles conventions "ruralité" en perspective, avec des objectifs à discuter en concertation avec les élus. Et en confiance, naturellement.
Jean-Michel Blanquer s'est plié, mardi 29 août, à l'exercice de la traditionnelle conférence de presse de rentrée scolaire, six jours avant le jour J. Le ministre de l'Education nationale nommé il y a trois mois a voulu placer ce "rituel" sous la "devise" de "l'école de la confiance". L'année dernière, le précédent gouvernement était à cran par rapport à la menace d'attentats terroristes (voir notre article ci-dessous du 1er septembre 2016). Le nouveau ministre n'a consacré que quelques secondes de son discours à la sécurisation des écoles et des établissements scolaires (pour rappeler que les mesures sont indiquées dans l'instruction ministérielle du 12 avril 2017). Il a été plus prolixe sur ce "moment de joie" que sera "la Rentrée en musique", dans les écoles, collèges et lycées volontaires, annoncée en juin dernier (voir notre article du 27 juin 2017).
100% des 2.500 classes de CP de REP + seront dédoublées
Promesse de campagne d'Emmanuel Macron, le dédoublement des classes de CP et CE1 de REP et REP + a été le premier sujet abordé. A la rentrée prochaine, 100% des 2.500 classes de CP de REP + seront dédoublées. Elles seront de 12 élèves environ, "parfois jusqu'à 14", a précisé le ministre. Dans 86 % des cas, le dédoublement se fera dans deux salles de classe distinctes. Dans 14% des cas, les salles de classe seront "réorganisées" pour accueillir deux professeurs dans chaque classe.
Selon le calendrier gouvernemental, les CP des REP seront dédoublés à la rentrée 2018, ainsi qu'une partie des CE1 de REP + et de REP. A la rentrée 2019, ce sont tous les CP et tous les CE1 des REP et REP+ qui seront dédoublés.
Les aides au périscolaire sont assurées... cette année
Comme annoncé au début de l'été, 35% des communes auront en cette rentrée une organisation du temps scolaire sur quatre jours (voir notre article ci-dessous du 18 juillet 2017). Naturellement, pour elles, pas d'aides du fonds de soutien aux activités périscolaires. Les autres (1) y auront droit encore pour cette année au moins et "la Cnaf est très mobilisé sur cette question", a assuré le ministre qui compte également la Jeunesse dans son portefeuille. Mais pour les rentrées suivantes, Jean-Michel Blanquer n'a pu que promettre que, lui, y était "favorable" avant de passer très vite à la question de la "qualité" des PEDT (projets éducatifs territoriaux) qui, selon lui, sont "souvent superficiels", ou des "copier-coller". Son opinion sur la qualité des activités périscolaires est également faite : s'il reconnaît que certaines villes offrent des activités de qualité, il pointe des situations "à corriger", celles où les activités sont "pauvres", "payantes", "désorganisent les familles et les collectivités", suscitent du "gaspillage" et "la fatigue des enfants". La perspective d'une aide au périscolaire sous condition de qualité des activités et des PEDT ne semble donc pas exclue.
Le ministre a annoncé qu'il lancerait une concertation sur le thème plus général du temps et de l'espace de l'enfant au 21e siècle. Les rythmes seront abordés, ainsi que la relation au sommeil ou encore la relation aux écrans.
Contrats aidés des collectivités : les inspecteurs d'académies "au plus près"
Concernant la réduction annoncée du nombre des contrats aidés (voir notre article ci-dessous du 25 août 2017), Jean-Michel Blanquer a confirmé que 23.000 emplois seraient supprimés, précisant que ceux-ci étaient notamment dédiés à l'assistance des directeurs d'école, c'est-à-dire correspondant à des emplois "qui ne relèvent pas du contrat aidé". Pour eux, il envisage des CDD et des perspectives de formation.
Pour les communes qui y ont recours dans le cadre du périmètre scolaire, périscolaire et extrascolaire, le ministre se souvient bien de sa visite mi-août à la Réunion, où 19 des 24 maires de l'île avaient annoncé qu'ils reportaient la rentrée scolaire de cinq jours dans les écoles maternelles et élémentaires afin de trouver "le temps pour les recrutements nécessaires" sur les postes d'agents de restauration scolaire, d'entretien et de surveillance (voir notre article du 25 août). Une situation également d'actualité en métropole, comme à Valorbiquet, petite commune du Calvados, qui veut aussi repousser la rentrée d'une semaine. Alors que l'Association des maires de France a tiré la sonnette d'alarme (voir notre article dans l'édition de ce jour), le ministre annonce avoir "demandé aux inspecteurs d'académies d'être au plus près" des collectivités, et de travailler "au cas par cas" avec elles, dans un esprit de "coopération".
Les 50.000 contrats aidés d'auxiliaires de vie pour les élèves handicapés sanctuarisés
Sur le possible impact de la réduction du nombre des contrats aidés sur l'accompagnement des élèves handicapés, le ministre a assuré que les 50.000 contrats aidés d'auxiliaire de vie scolaire seront sanctuarisés.
Dans une communication présentée lors de l'un des tout premiers conseils des ministres du nouveau gouvernement, le 7 juin dernier, Sophie Cluzel, secrétaire d'Etat auprès du Premier ministre chargée des personnes handicapées, avait déjà affirmé sa volonté de "mettre tout en œuvre pour apporter des solutions garantissant une rentrée scolaire fluide pour les enfants concernés en septembre 2017", tout en initiant "un chantier de rénovation de l’accompagnement" visant à "apporter des réponses aux ruptures de parcours" (voir notre article 7 juin 2017). Elle avait aussi souligné l'importance de l'accès "aux activités périscolaires ou extrascolaires".
Ouvrir le chantier de rénovation de la professionnalisation des accompagnants
Le 25 juillet, devant la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, elle avait fait part de son intention, une fois la rentrée passée, d'"ouvrir le chantier de rénovation de la professionnalisation des accompagnants" d'enfants handicapés. Interrogée le 28 août dur France Info, elle a annoncé que "8.000 nouveaux emplois d'accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) seront créés pour cette rentrée" (2). Ces 8.000 emplois s'ajouteront aux 25.000 emplois à temps plein d'AESH recensés en 2016.
Les deux ministres ont exprimé leur volonté de rouvrir ce chantier "car c'est un vrai besoin de pouvoir fluidifier le parcours des élèves handicapés qui sont des enfants avec des besoins d'accompagnement", estime Sophie Cluzel. Cette orientation devrait notamment passer par la poursuite de la transformation progressive des emplois d'AVS - recrutés en contrats aidés - en AESH sous contrat de droit public.
De nouvelles conventions "ruralité" en perspective
La "ruralité" fera partie des chantiers 2018 du ministre de l'Education nationale. Il a annoncé ce 29 août son intention d'"amplifier les signatures des conventions ruralité". Outils qui, selon le dossier de presse "permettent l'organisation scolaire dans le premier degré" dans le but de "maintenir et d'améliorer une offre éducative de qualité". Les conventions sont aujourd'hui une quarantaine. L'objectif est de toucher "la soixantaine de départements éligibles" et de renouveler celles qui arrivent à échéance.
Au-delà du chiffre, Jean-Michel Blanquer souhaite aller "plus loin dans l'innovation pédagogique en milieu rural" afin de "créer un nouveau type d'attractivité" pour ces territoires. Il n'est question ni dans son discours, ni dans le dossier de presse, du deal qui avait fondé l'esprit des précédents contrats à savoir : l'Etat s'engageait à ne pas (ou pas trop) baisser les effectifs des enseignants dans les territoires ruraux le temps que les élus réfléchissent aux regroupements pédagogiques à mettre en place.
Des établissements ruraux accueillant les enfants de la maternelle à la 3e ?
Trois objectifs sont esquissés à ce jour. Le premier porte sur "le développement des internats dans son volet rural", sachant que sur les 200.000 lits disponibles en France, 20% sont inoccupés "en majorité dans les territoires ruraux", indique le ministère. Mais attention, un internat, "ce n'est pas des murs et des lits, avant cela c'est un projet éducatif", prévient le ministre. Projet qui doit "donner aux élèves un cadre et une ouverture à la culture, au sport et à la nature". Le ministre prévoit de lancer une concertation avec les collectivités locales sur le sujet.
Un autre objectif serait de développer des classes de CM2-6e "expérimentales" afin d'"accueillir de nouveaux collégiens extérieurs au territoire et hébergés dans des internats aujourd'hui inoccupés".
Les conventions ruralité nouvelle formule devront enfin engager une "réflexion sur le bâti scolaire". La réflexion devra déboucher sur "la possible intégration de l'école et du collège rural d'une même commune dans un ensemble immobilier pour favoriser des parcours des élèves de la maternelle à la 3e et l'innovation pédagogique des équipes". Pas sûr que ces méga-établissements, dans lesquels les petits ruraux entreraient à l'âge de3 ans pour en ressortir à 14, fassent beaucoup rêver les élus, ni ne soient très attractifs pour les familles.
(1) 45% des communes auront une organisation du temps scolaire sur neuf demi-journées (communes "Peillon"), 11% auront une organisation dérogatoire sur neuf demi-journées (par exemple, classe le samedi matin au lieu du mercredi matin), 9% auront une organisation du temps scolaire comprenant huit demi-journées réparties sur cinq jours (par exemple, pas de classe le vendredi après-midi).
(2) Confirmé serait plus juste, dans la mesure où ces créations de postes avaient déjà été prévues et budgétées par le gouvernement de François Hollande.
Le 4 septembre prochain, 6 millions d'écoliers, 3,3 millions de collégiens et 2,6 millions de lycéens reprendront le chemin de l'école. La France compte 53.700 écoles et établissements du second degré dans le secteur public (8.900 secteur privé).
Les collectivités locales participent à hauteur de 23% à la dépense intérieure de l'Education (DEI) qui était de 147,8 milliards d'euros en 2015 (6,8% du PIB). La contribution de l'Etat est de l'ordre de 57%.