Très haut débit - Intention de déploiement de fibre optique : les collectivités demandent des garanties

"Le choix du gouvernement de privilégier l’intervention des opérateurs privés et de limiter les possibilités d’agir des collectivités publiques risque d’obérer gravement la perspective d’une couverture en haut débit, dans des délais et des coûts raisonnables, de l’ensemble de la Seine-et-Marne", alertent le président du conseil général, Vincent Eblé et Bertrand Caparroy, premier vice-président de Seine-et-Marne (77), chargé des réseaux numériques et du développement des nouveaux usages. Suite à l'annonce des modalités de mise en œuvre du programme national "très haut débit" sur le déploiement de la fibre optique fin avril (voir notre article ci-contre), ce département pionnier du déploiement des réseaux ouverts d'initiative publique avec Sem@phor77 souligne le manque de garantie apportée par les opérateurs dans leurs intentions d'investissement en matière de couverture du territoire.
En Seine-et-Marne, "les opérateurs ont fait connaître leur intention d’investir dans une soixantaine de communes, essentiellement dans sa frange ouest, aucune garantie n’est apportée sur le calendrier et les conditions de ce déploiement : tous les foyers de chaque commune seront-ils bien raccordés ? Quelles sanctions juridiques et/ou financières dans l’hypothèse où les opérateurs ne respecteraient pas leurs engagements ?", interrogent les élus dans leur communiqué commun.
De son côté, le commissaire aux investissements d'avenir, René Ricol, s'était dit positivement surpris par les intentions des opérateurs : pour mémoire, d’ici 5 ans, les déploiements sur plus de 3.415 communes regrouperaient, avec les 148 communes qui constituent les zones très denses, près de 57% des ménages. Devançant les actuelles critiques des collectivités, le ministre du Numérique, Eric Besson, avait d'ailleurs indiqué que les intentions d'investir n'était pas une garantie de couverture effective et donc, que le gouvernement veillerait "à ce que les opérateurs remplissent leurs engagements".
En outre, les présidents seine-et-marnais insistent sur une autre limite du plan national THD : "cantonner l’intervention publique dans les seules zones peu denses, pour lesquelles les coûts de raccordement seront nécessairement plus élevés, va conduire, en empêchant toute mutualisation des coûts entre zones denses et zones moins denses, à renchérir la couverture équitable de l’ensemble du territoire et à ralentir d’autant cette couverture pourtant essentielle à la cohésion et à la dynamique des territoires". Le risque est "grand qu’à l’issue de la période de cinq ans réservée aux initiatives privées, les collectivités publiques ne soient appelées à la rescousse pour venir suppléer les carences des opérateurs privés dans tel ou tel secteur supposé être couvert par ces derniers", lancent-ils, forts de leur expérience dans le déploiement du haut débit sur un département rural. La Seine-et-Marne est d'ailleurs l'un des premiers départements à avoir adopté son schéma directeur territorial d’aménagement numérique (SDTAN).
Vincent Eblé et Bertrand Caparroy demandent donc au gouvernement "qu’il précise rapidement ses intentions et apporte de véritables garanties sur les engagements de couverture des opérateurs qui ne peuvent se résumer à de simples déclarations d’intention" et " qu’il ouvre la faculté aux collectivités volontaires de mener à bien de véritables réseaux d’initiative publique ouverts et mutualisés". Une interpellation reprise et précisée, quelques jours plus tard, dans un communiqué de l'Association des villes et collectivités pour les communications électroniques et l'audiovisuel (Avicca). Face aux critiques, non seulement des collectivités investies dans l'aménagement numérique mais également des opérateurs de télécommunications eux-mêmes, l'Avicca demande à l'Etat de "ne plus faire la sourde oreille".