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Insertion des jeunes : les missions locales appellent à réaffirmer la priorité donnée à la qualification

Sur la base d'une enquête menée auprès de 24.000 jeunes, l'Union nationale des missions locales demande ce jour de "sécuriser l'avenir des 16-25 ans en contexte de crise". Et propose des mesures immédiates pour répondre à l'urgence sociale, accompagner les jeunes mineurs dans le cadre de l'obligation de formation et étendre la garantie jeune. Alors que le décrochage concerne potentiellement un nombre important de jeunes dans le contexte post-confinement, le président de l'UNML appelle à une campagne nationale pour rappeler aux jeunes l'importance d'accéder à une qualification.

Un grand nombre de jeunes accompagnés par les missions locales ont perdu leur emploi ou ont vu leur formation interrompue pendant le confinement, d'après une enquête réalisée par l'Union nationale des missions locales (UNML) avec France stratégie et le Centre d'études et de recherches sur les qualifications (Cereq) entre le 15 et le 22 juin 2020. Parmi les 24.000 répondants âgés de 16 à 25 ans, 42% de ceux qui avaient un emploi avant le confinement (30% du total étaient en emploi) déclarent l'avoir perdu, tandis que 54% de ceux qui suivaient une formation (20% du total) ont dû interrompre leur parcours, principalement du fait de la fermeture de leur établissement. La priorité de ces jeunes est désormais de trouver un emploi (77% des répondants), de clarifier leur projet professionnel (67%) et/ou de reprendre une formation (44%). Pour leur insertion professionnelle, mais aussi au niveau financier ou encore sur les démarches administratives, ils souhaitent majoritairement (61%) être accompagnés.

Renforcer et simplifier l'allocation Pacea pour répondre aux situations d'urgence

"On est prêt, on est en ordre de bataille, on n'a pas tout à fait les crédits mais on a le personnel", assure Jean-Patrick Gille, président de l'UNML, interrogé par Localtis, à l’approche des annonces gouvernementales sur l’emploi des jeunes (voir notre article du 23 juin 2020). Sur la base de cette enquête et d'une consultation de ses membres, le réseau porte trois grands axes de propositions pour la période à venir. "La priorité immédiate est de répondre à l'urgence sociale et de sécuriser les parcours pour les plus fragiles", explique Sandrine Aboubadra-Pauly, déléguée générale de l'UNML. "Comme d'autres acteurs, les missions locales ont vu cette pauvreté, qui était déjà présente, s'amplifier avec cette situation. Il y a un besoin de renforcer absolument les aides d'urgence", poursuit-elle.

Aujourd'hui, c'est l'allocation Pacea (parcours contractualisé d'accompagnement vers l'autonomie) qui peut faire office d'aide d'urgence pour les missions locales, mais son attribution passe par un circuit administratif d'au moins un mois via l'agence de services et de paiement. L'UNML demande donc un "assouplissement des règles de gestion pour gagner en réactivité", ainsi qu'une augmentation et un doublement du plafond de l'allocation Pacea (soit 20 millions d'euros supplémentaires). Actuellement, l'allocation représente jusqu'à trois mois de revenu de solidarité active, mobilisables sur un parcours d'accompagnement qui peut durer deux ans. "Pour des jeunes qui sont dans des situations très difficiles, c'est insuffisant", estime Sandrine Aboubadra-Pauly.

"La Nation devrait dire aux mineurs : votre obligation, c'est de retourner en formation"

Deuxième axe résumé par cette dernière : "insister sur la nécessité pour les mineurs notamment, mais plus largement pour les jeunes, de retourner vers des parcours de qualification". Alors que les missions locales se préparaient à la nouvelle obligation de formation qui entrera en vigueur en septembre prochain pour les 16-18 ans (voir notre article du 29 mai 2020), la crise sanitaire a ajouté un niveau de complexité supplémentaire. "Force est de constater que beaucoup de jeunes sont un peu perdus de vue, en particulier les élèves des lycées professionnels. Comment repérer des décrocheurs dans un système où depuis plusieurs mois l'école est impossible ou facultative…", s'interroge Jean-Patrick Gille. Sur cette obligation de formation, l'UNML demande une campagne d'information nationale. "La Nation devrait dire aux mineurs : votre obligation, c'est de retourner en formation", selon le président de l'UNML. Son inquiétude porte sur ces jeunes "un peu perdus" qui peuvent être tentés de "trouver un petit boulot" puis de ne pas reprendre leur parcours diplômant.

Pour la mise en œuvre de cette obligation de formation jusqu'à 18 ans, l'UNML demande le doublement de l'enveloppe dédiée, qui passerait ainsi de 20 à 40 millions d'euros. Les missions locales aimeraient également accompagner un plus grand nombre de jeunes via la garantie jeunes, ce qui passerait à la fois par un assouplissement des critères d'éligibilité actuels et une rallonge de quelque 70 millions d'euros. "C'est un bon dispositif : le fait de mélanger sécurité financière, accompagnement et phases de formation collective et mise au travail, c'est quand même les clés de réussite d'une insertion", met en avant le président de l'UNML.

Apprentissage, IAE, partenariats avec des secteurs qui recrutent... des opportunités à multiplier

Le réseau appelle enfin à "multiplier les opportunités pour les jeunes", en particulier en ciblant davantage de Parcours emploi compétences (PEC) vers ce public. Mais tous les leviers doivent être mobilisés pour Sandrine Aboubadra-Pauly : l'apprentissage, l'emploi dans les entreprises de l'insertion par l'activité économique (IAE), ou encore des partenariats avec les secteurs qui recrutent. Le service civique est également "une très bonne formule" qui peut aider des jeunes peu qualifiés dans leur parcours, estime Jean-Patrick Gille.

Près d'1,3 million de jeunes sont en contact avec des missions locales chaque année. Alors que la moitié a des demandes ponctuelles, l'autre moitié entrera dans un parcours renforcé d'accompagnement. Sur les 600.000 jeunes suivis en Pacea, 100.000 sont dans le dispositif de la garantie jeunes. Si l'UNML anticipe une progression du nombre de jeunes qui pourraient solliciter l'aide des missions locales, il est encore trop tôt pour évaluer précisément l'ampleur de ce mouvement. Mais dans le contexte, il importe pour l'Union de "suspendre la réforme en cours des règles de calcul du chômage" ou, "a minima", de la reporter pour les jeunes de moins de 30 ans.