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Logement - HLM : une proposition de loi pour déchoir de leur bail les locataires auteurs de violences conjugales

Philippe Goujon, député de Paris, et une quarantaine de députés UMP - dont Nathalie Kosciusko-Morizet, Bruno Le Maire et Valérie Pécresse - ont déposé une proposition de loi visant à déchoir de leur bail les locataires sociaux 
auteurs de violences conjugales. La question des violences conjugales et du logement n'est pas nouvelle mais, jusqu'à présent, les mesures s'orientaient plutôt vers la mise à l'abri de la femme victime de telles violences. Le récent appel à projets en faveur du logement accompagné (voir notre article ci-contre du 18 mars 2015) et le pacte parisien de lutte contre la grande exclusion 2015-2020 (voir notre article ci-contre du 19 février 2015) prévoient ainsi des mesures de ce type.

Un transfert du bail à la victime des violences

La proposition de loi se veut très consensuelle. Elle rappelle l'ampleur de ce "fléau silencieux" : une enquête nationale - remontant à quinze ans - estimait à 10% le pourcentage de femmes victimes de violences au sein du couple et, en France, une femme meurt tous les deux jours et demi sous les coups de son conjoint.
L'exposé des motifs rappelle un certain nombre de mesures déjà prises, comme la disposition introduite en 2009 par amendement dans le Code de la construction et de l'habitation et qui range les personnes mariées, pacsées ou vivant en concubinage, victimes de violences, au sein des publics prioritaires pour l'attribution d'un logement social. De même, la loi du 9 juillet 2010 relative aux violences faites aux femmes prévoit la passation de conventions avec les bailleurs sociaux en vue de réserver des logements d'urgence aux femmes victimes de violence dans chaque département.
Mais la proposition de loi va plus loin que cette protection "passive", en permettant de déchoir le conjoint violent - lorsque celui-ci est titulaire du bail du logement social occupé par le couple - de son droit au maintien dans les lieux, pour transférer ce droit à sa conjointe victime de violences et permettre ainsi d'engager contre lui une procédure d'expulsion.

Les gardiens aussi

Pour justifier cette mesure, l'exposé des motifs rappelle qu'"il est en effet injuste que les femmes soient victimes d'une 'double peine' en se trouvant contraintes de quitter le domicile familial lorsque celui-ci avait été attribué par le bailleur social au conjoint violent et en devant recommencer à zéro leurs démarches de demande de logement, dans un contexte marqué par la pénurie d'hébergements dédiés".
A noter : la proposition de loi comporte un second article donnant au bailleur social la possibilité d'exercer les droits reconnus à la partie civile au lieu et place de la victime ou de se constituer partie civile à ses côtés, "en cas d'infraction pénale commise par un locataire au préjudice d'un autre locataire, d'un préposé ou d'un prestataire de service du bailleur, dans le périmètre d'application du règlement intérieur de l'immeuble où ils résident". Il ne sera toutefois possible de se porter partie civile qu'avec l'accord de la victime ou, si celle-ci est un mineur ou un majeur protégé, avec celui de son représentant légal.
Contrairement au premier, ce second article va ainsi au-delà du seul cas des violences conjugales. Il couvre notamment les violences envers les gardiens, dont un récent arrêt de la Cour de cassation montre qu'elles peuvent être poussées assez loin avant de justifier une éventuelle résiliation du bail (voir notre article ci-contre du 11 mars 2015).

Jean-Noël Escudié / PCA

Référence : proposition de loi visant à déchoir de leur bail les locataires sociaux 
auteurs de violences conjugales (enregistrée à la présidence de l'Assemblée nationale le 25 mars 2015).