Hausse des loyers bloquée dans 28 agglomérations pour les passoires thermiques
Un décret est venu bloquer, depuis le 1er janvier 2021, toute possibilité de hausse des loyers des passoires thermiques dans 28 agglomérations connaissant une situation tendue en matière d'habitat. Il précise que "l'augmentation de loyer n'est possible que lorsque la consommation en énergie primaire du logement est inférieure à 331 kWh par mètre carré et par an". Et ce n'est qu'une étape dans le volet coercitif des dispositifs sur la rénovation énergétique des logements.
En même temps qu'il renforce les dispositifs de financement de la rénovation énergétique des logements, le gouvernement accroît les contraintes sur les propriétaires bailleurs de passoires thermiques. Côté "incitatif" : la généralisation et le renforcement des crédits de MaPrimeRénov' (voir nos articles du 6 octobre et du 4 décembre 2020) et la mission confiée à Olivier Sichel, directeur général délégué de la Caisse des Dépôts et directeur de la Banque des Territoires, en vue de proposer des solutions innovantes de financement de la rénovation énergétique (voir notre article du 8 janvier 2021). Côté "coercitif", un décret du 30 décembre 2020 bloque, à compter du 1er janvier 2021, toute possibilité de hausse des loyers des passoires thermiques dans 28 agglomérations connaissant une situation tendue en matière d'habitat(*).
Une mesure centrée sur les zones tendues en matière de logement
Ces 28 agglomérations sont évidemment loin d'être les seules à compter des logements susceptibles d'être qualifiés de passoires thermiques (classés en F ou G après un diagnostic de performance énergétique, sur une échelle allant de A à G). Mais ce sont les seules à pouvoir faire l'objet d'un contrôle renforcé de l'évolution des loyers sur la base de la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs.
Son article 18 prévoit en effet, dans sa rédaction consolidée, que "pour chacune des zones d'urbanisation continue de plus de 50.000 habitants où il existe un déséquilibre marqué entre l'offre et la demande de logements, entraînant des difficultés sérieuses d'accès au logement sur l'ensemble du parc résidentiel existant qui se caractérisent notamment par le niveau élevé des loyers, le niveau élevé des prix d'acquisition des logements anciens ou le nombre élevé de demandes de logement par rapport au nombre d'emménagements annuels dans le parc locatif social, un décret en Conseil d'État, pris après avis de la Commission nationale de concertation, fixe annuellement le montant maximum d'évolution des loyers des logements vacants et des contrats renouvelés. Ce décret peut prévoir des adaptations particulières, notamment en cas de travaux réalisés par les bailleurs ou de loyers manifestement sous-évalués. Ces adaptations particulières ne s'appliquent pas lorsque les logements ont une consommation énergétique primaire supérieure ou égale à 331 kilowattheures par mètre carré et par an" (ce qui correspond au cas des logements classés F ou G).
Une augmentation encadrée, une procédure assouplie
Ce lien avec la consommation énergétique a été introduit par la loi du 8 novembre 2019 relative à l'énergie et au climat (article 19). Celle-ci a également fixé au 1er janvier 2021 la date d'entrée en vigueur de cette mesure.
Pour sa part, le décret du 30 décembre 2020 modifie le décret du 27 juillet 2017 relatif à l'évolution de certains loyers dans le cadre d'une nouvelle location ou d'un renouvellement de bail. Il précise que "l'augmentation de loyer n'est possible que lorsque la consommation en énergie primaire du logement est inférieure à 331 kWh par mètre carré et par an, telle que calculée par une évaluation énergétique réalisée par une personne satisfaisant aux conditions prévues à l'article L.271-6 du code de la construction et de l'habitation [personne présentant des garanties de compétence et disposant d'une organisation et de moyens appropriés, ainsi que d'une assurance, ndlr]. et établie selon les méthodes de calcul conventionnel [...]. Cette condition est présumée remplie pour un logement pour lequel une consommation en énergie primaire inférieure à 331 kWh par mètre carré et par an a été constatée par un diagnostic de performance énergétique établi moins de quatre ans auparavant". Ce dernier point introduit une certaine souplesse dans le dispositif.
Une simple étape avant 2028
La disposition prévue par le décret du 30 décembre 2020 ne constitue qu'une étape dans le volet "coercitif" de la lutte contre les passoires thermiques. En effet, la loi du 8 novembre 2019 relative à l'énergie et au climat (article 22) prévoit, à compter du 1er janvier 2022, l'obligation de faire figurer, dans les publicités relatives à la vente ou à la location d'un bien immobilier à usage d'habitation dont la consommation énergétique excède 330 kilowattheures d'énergie primaire par mètre carré et par an, l'obligation de respecter ce seuil. Ce rappel obligatoire doit figurer également dans les actes de vente ou les baux concernant ce bien.
À partir du 1er janvier 2028, la contrainte se durcit encore, puisqu'il faudra mentionner cette fois-ci, dans les différents documents mentionnés ci-dessus, le non-respect de l'obligation relative au seuil de performance énergétique (ce qui rendra la vente ou la location quasi impossible de fait). En effet, l'article 22 de la loi Énergie-climat de 2018 prévoit qu'"à compter du 1er janvier 2028, la consommation énergétique, déterminée selon la méthode du diagnostic de performance énergétique, des bâtiments à usage d'habitation n'excède pas le seuil de 330 kilowattheures d'énergie primaire par mètre carré et par an". Entretemps, les mesures issues de la mission confiée à Olivier Sichel devraient permettre d'accélérer fortement le rythme de la rénovation énergétique des passoires thermiques.
(*) Ajaccio, Annecy, Arles, Bastia, Bayonne, Beauvais, Bordeaux, Draguignan, Fréjus, Genève-Annemasse, Grenoble, La Rochelle, La Teste-de-Buch-Arcachon, Lille, Lyon, Marseille-Aix-en-Provence, Meaux, Menton-Monaco, Montpellier, Nantes, Nice, Paris, Saint-Nazaire, Sète, Strasbourg, Thonon-les-Bains, Toulon, Toulouse.
Références : décret n°2020-1818 du 30 décembre 2020 relatif au critère de performance énergétique conditionnant l'évolution de certains loyers dans le cadre d'une nouvelle location ou d'un renouvellement de bail pris en application de l'article 18 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 (Journal officiel du 31 décembre 2020) |