Handicap : Elisabeth Borne définit la méthode pour accélérer sur l’accessibilité
Un Comité interministériel du handicap "de méthode" a été présidé ce 6 octobre 2022 par la Première ministre, qui signe également une circulaire publiée ce jour sur la politique interministérielle en faveur de l’inclusion des personnes handicapées. Un délégué interministériel à l’accessibilité va être nommé pour accélérer sur le sujet, en particulier sur la dimension numérique et sur la transposition d’une directive européenne sur laquelle la France est en retard. Dans la perspective de la Conférence nationale du handicap qui aura lieu au printemps 2023, quatre groupes de travail sont mis en place sur l’accessibilité, l’école et l’université, l’emploi et la simplification des démarches. Les départements seront notamment mobilisés sur ce dernier sujet et l’ensemble des collectivités seront sollicitées par les sous-préfets référents handicap qui vont être nommés dans chaque préfecture.
C’est au campus Grands Moulins de l’Université Paris-cité que s’est tenu ce 6 octobre 2022 le premier Comité interministériel du handicap (CIH) de ce quinquennat. L’occasion pour la Première ministre de rencontrer "certains des 1.400 étudiants en situation de handicap" de cette université et de s’engager à "agir avec force pour que le handicap ne soit plus un frein aux études", selon les mots d’Elisabeth Borne sur Twitter. Sur ce sujet, la France est "encore en retard", admet Matignon qui estime à 50.000 le nombre actuel d’étudiants en situation de handicap. En mettant le projecteur sur cet enjeu, le gouvernement veut insister sur l’ambition d’atteindre une accessibilité "universelle", qui concerne tous les âges et les pans de la société.
Accessibilité : deux échéances avec la directive à transposer et Paris 2024
Ainsi, Elisabeth Borne a annoncé la nomination prochaine d'un délégué interministériel à l'accessibilité. Rattaché à la fois à la Première ministre et à la ministre déléguée chargée des Personnes handicapées, en lien avec le secrétariat général du CIH, ce délégué interministériel veillera à mobiliser le gouvernement en faveur de toutes les dimensions de l’accessibilité – accessibilité physique, en particulier celle des établissements recevant du public et des transports, mais également numérique, selon Matignon. Il assurera également le lien avec les collectivités, les associations et les entreprises sur ces sujets d’accessibilité.
Alors qu’une déléguée ministérielle à l’accessibilité, Carole Guéchi, est déjà chargée, sous l’autorité du ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, de faire avancer l’accessibilité physique (logement, ERP, transports, cadre bâti, voirie et espaces publics), le nouveau délégué interministériel devra notamment se concentrer sur la transposition de la directive européenne sur l’accessibilité. En juillet 2022, la France a été mise en demeure par la Commission européenne pour non-transposition de cette directive qui concerne en particulier les transports publics, les services bancaires et les magasins en ligne. Selon Matignon, la transposition aura lieu avant la fin de l’année.
L’accessibilité universelle sera également l’objet d’un groupe de travail interministériel de préparation de la Conférence nationale du handicap (CNH) qui aura lieu au printemps 2023. Pour rappel, la CNH est présidée par le président de la République et a lieu tous les trois ans – la dernière en date s’était tenue en février 2020, soit juste avant le premier confinement (voir notre article). Ce groupe de travail sera piloté par Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, et Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la Transition numérique et des Télécommunications, avec la participation des autres ministres concernés, précise l’entourage de la Première ministre. Ce dernier ajoute que les Jeux olympiques et paralympiques de 2024 constituent une échéance importante et l’occasion de mobiliser l’ensemble des collectivités sur l’accessibilité, avec l’ambition d’un Paris 2024 "exemplaire" sur le sujet.
Des groupes de travail et une circulaire pour cadrer la méthode et préparer la feuille de route
La préparation de la CNH donnera lieu à trois autres groupes de travail sur l’école et l’université inclusives, le plein emploi – le taux de chômage des personnes handicapées aurait baissé de cinq points mais serait toujours à 14% - et l’accès aux droits ou encore la simplification des parcours et de l'offre médico-sociale. Sur ce dernier sujet, un travail va être conduit avec les départements avec, en ligne de mire, la réduction de "l’inéquité" liée à "des droits différenciés selon les départements", explique Matignon.
La feuille de route handicap de ce deuxième quinquennat sera donc présentée lors de la CNH du printemps prochain et, d’ici là, la Première ministre appelle au "dialogue" et à la "co-construction avec la société civile". Réunissant 11 ministres et ministres délégués (Travail, Enseignement supérieur, Transition écologique et Cohésion des territoires, Culture, Santé, Solidarités, Sports, Formation professionnelle, Transports, Ville et Logement et Personnes handicapées), ce "CIV de méthode" a donc mis l’accent sur la mobilisation interministérielle du gouvernement. Une circulaire reprenant les composantes de ce pilotage interministériel des politiques du handicap est également publiée ce jour. Outre la création du poste de délégué interministériel, l’accent est mis sur la pérennisation du réseau de hauts fonctionnaires dédiés au handicap et à l’inclusion dans chaque ministère et de la constitution d’un réseau de sous-préfets référent handicap dans chaque préfecture. Ces correspondants dans les territoires permettront de "faire aboutir les réformes jusqu'au dernier kilomètre", indique Matignon.
Sur le volet co-construction, la circulaire prévoit d’"adresser au CNCPH [Conseil national consultatif des personnes handicapées] les projets de normes législatives et règlementaires pour avis et [de] veiller à bien renseigner les évaluations préalables associées à ces textes". Le gouvernement annonce la poursuite du rythme de deux CIH par an (CIH qui avait été mis en place par Jean Castex), où sont présents le CNCPH et le Collectif handicap, ainsi que des représentants d’élus locaux. En matière de "communication accessible", enfin, le gouvernement se veut "exemplaire", avec la rédaction en 2020 d’une charte et désormais d’un "schéma directeur de l’accessibilité de la communication".
Déconjugalisation de l’AAH : une entrée en vigueur dans un an
Ce CIH a aussi été l’occasion pour la Première ministre de faire valoir les avancées réalisées pendant le premier quinquennat d’Emmanuel Macron et le début du second, à commencer par la déconjugalisation de l’allocation adulte handicapé (AAH) qui a été votée cet été et entrera en vigueur au 1er octobre 2023. A l’école, "430.000 enfants en situation de handicap sont scolarisés en milieu ordinaire à la rentrée 2022" contre 321.000 en 2017, est-il mis en avant dans le dossier de presse du CIH. Au total, on compte en cette rentrée 132.000 accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH) ; Matignon affirme que la contractualisation est déjà en cours avec un CDI au bout de six ans et que la titularisation de ces personnels est en réflexion.
Autre progrès mis en avant : le repérage précoce et l’orientation vers une plateforme de coordination et d’orientation (PCO) de 30.000 enfants susceptibles de présenter un trouble du neuro-développement au 1er juillet 2022, contre 150 enfants en 2019. Dotée de 500 millions d’euros, la stratégie nationale pour l’autisme au sein des troubles du neuro-développement qui avait démarré en 2018 arrive à son terme fin 2022 et le gouvernement indique que des concertations ont commencé pour préparer la suite.