Environnement - Grenelle 2 : une nouvelle flopée d'amendements en commission sur la partie "risques, santé et déchets"
Dans le cadre de la lecture du projet de loi Grenelle 2, la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire (CDD) de l'Assemblée nationale, saisie au fond, a adopté plusieurs amendements sur le titre V du texte relatif aux risques, à la santé et aux déchets. Alors que la commission des affaires économiques en a de son côté adopté plusieurs sur les titres III et IV (il lui en a été délégué l'examen préalable par la CDD, de même pour le titre I, sur le point d'être examiné), cette commission présidée par Christian Jacob a pris le texte à rebrousse-poil en commençant par son avant-dernier titre. La CDD prévoit ainsi d'examiner le titre IV la semaine prochaine, le titre II le 17 février, les titres III et IV la semaine suivante et terminera sur le titre VI portant sur la gouvernance. Aperçu des principaux amendements votés sur le titre V, essentiellement portés par un petit groupe de la commission incluant deux des rapporteurs du texte, les députés UMP Serge Grouard et Bertrand Pancher.
Un renforcement de la prévention des nuisances
Concernant la prévention des nuisances lumineuses, la définition des installations visées se précise et ne se fera pas qu'en fonction de l'équipement ou de la zone concernés, mais aussi selon la "puissance lumineuse totale" de l'installation, soit un critère "simple à calculer et à contrôler". Un autre amendement à l'article 66 a été pris et va dans le même sens. Concernant les nuisances aéroportuaires, la commission a adopté le fait qu'une commune ou un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) pourra saisir l'autorité administrative de contrôle qu'il est prévu d'instituer. Précisons que pour ce faire, ces collectivités devront être inclues "pour tout ou partie dans le périmètre d'un plan d'exposition au bruit ou de gêne sonore d'un aérodrome". Sur ce même article 68, trois autres amendements de Didier Gonzales, député du Val-de-Marne, ont fait mouche et précisé le cadre de recommandations que formulera cette autorité, ainsi que la concertation à renforcer sur l'enjeu plus ciblé des vols de nuit. Concernant le bruit d'origine ferroviaire, un article additionnel à l'article 69 a été adopté. Il vise à inciter les entreprises ferroviaires à atténuer les bruits dus au freinage, "mal tolérés des riverains" et ce en cohérence avec la loi Grenelle 1 qui incite au renouvellement des flottes.
Qualité de l'air : des zones d'actions à expérimenter
En termes d'évaluation de la qualité de l'atmosphère, le rôle de surveillance assumé par le réseau des associations agréées de surveillance de la qualité de l'air (AASQA) a été introduit dans le texte. "La loi doit continuer d'affirmer le rôle de ces associations et ne pas induire de confusion sur le périmètre d'action de chacune d'elles" a-t-il été précisé, et ce a fortiori à l'heure où le Sénat propose de les régionaliser et d'y faire participer les collectivités, ce qui va "dans le bon sens". Dans la foulée, un autre amendement a été voté et vise à "aller au-delà des décrets inscrits aujourd'hui dans le Code de l'environnement", en confiant à l'Ademe une mission d'appui et de contribution auprès du ministère de l'Ecologie, et ce en vue de développer les mesures de prévention et de réduction de la pollution atmosphériques.
En renfort à l'une des mesures phares du plan particules du Grenelle 1, un article additionnel est venu s'ajouter à l'article 71. Il concerne directement les collectivités et propose, dans celles "de plus de 100.000 habitants où une mauvaise qualité de l'air est avérée", de rendre possible "à titre expérimental" la création de "zones d'actions prioritaires pour l'air" dont l'accès serait interdit aux "véhicules les plus polluants". Les collectivités auraient deux ans pour pouvoir se lancer et bâtir leur dossier de projet à soumettre au préfet de département. Elles pourraient mener une telle expérimentation durant trois ans. Charge au Parlement d'en dresser en fin de course un bilan global. L'article précise par ailleurs le cadre dans lequel cette expérimentation peut se dérouler. A noter : cette mesure s'inspire de retours d'expériences européens, où une soixantaine de zones de ce type existent.
Déchets : une quinzaine d'amendements adoptés
Côté déchets, un amendement est passé en vue de faire supprimer une disposition adoptée par le Sénat dans l'article 77 ter. Selon les membres de la commission, cet article "vise à étendre la possibilité de transfert du pouvoir de police dans le domaine des déchets aux groupements intercommunaux qui ne sont pas à fiscalité propre lorsque ces groupements sont compétents en matière d'élimination des déchets ménagers". Mais cela introduirait "une multiplication des structures intercommunales qui seraient compétentes" en la matière et à "un morcellement des pouvoirs de police qui serait contre-productif".
L'article 78 a aussi été fortement amendé en vue de mieux prendre en compte la réduction des déchets à la source dans les plans départementaux, lesquels devront recenser les programmes de prévention "mis en œuvre par les collectivités responsables de la collecte ou du traitement des déchets ménagers et assimilés". Il a aussi été modifié afin de mieux distinguer prévention et recyclage, d'inciter les collectivités à privilégier le transport des déchets par voie fluviale ou ferrée, de renforcer la collaboration entre collectivités dans la mise en place des plans départementaux d'élimination (dont les dates de révision ont par ailleurs été modifiées pour être compatibles avec l'entrée en vigueur de la loi) et de leur permettre d'expérimenter l'introduction d'une part variable dans la taxe d'enlèvement des ordures ménagères (Teom). L'obligation de collecte et de recyclage de produits chimiques appliquant les principes de responsabilité élargie du producteur (REP) a été repoussée à 2011, le temps qu'un éco-organisme puisse être créé. Concernant la valorisation des déchets organiques, il a été ajouté au texte que l'Etat prendra les mesures nécessaires "pour en développer les débouchés et pour promouvoir la sécurité sanitaire et environnementaliste des composts". Pour ne pas "favoriser le seul point de vue des collectivités", un amendement a supprimé le projet de conférence départementale de gestion des débouchés des composts, redondant selon ses défenseurs avec l'un des engagements du Grenelle 1. Un article additionnel à l'article 80 bis rend obligatoire, à compter du 1er janvier 2011, l'impression ou réimpression de livres scolaires à partir de papier recyclé ou issu de forêts gérées durablement.
Enfin, un amendement défendu par des députés socialistes vient modifier le code de l'environnement en vue de permettre aux collectivités, et non plus seulement aux préfets, d'élaborer des schémas de prévention des risques naturels. Le même groupe a par ailleurs fait passer le projet de structuration d'ici 2011 d'une filière de coopération interrégionale pour gérer les déchets des régions et départements d'outre-mer.
Morgan Boëdec / Victoires-Editions