Environnement - Gaspillage alimentaire : l'Ademe en campagne contre le gâchis
Dix millions de tonnes de produits alimentaires, d'une valeur commerciale de 16 milliards d'euros, sont perdues ou gaspillées tous les ans en France, selon une nouvelle étude publiée le 26 mai par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe). Ces volumes représentent un impact carbone de 15,3 millions de tonnes équivalent CO2, soit 3% des émissions de gaz à effet de serre de la France, ajoute l'Ademe, qui lance une campagne nationale de mobilisation, "ça suffit le gâchis" , alors qu'une loi sur le sujet, inspirée du rapport du député Guillaume Garot, a été publiée le 15 février dernier.
Des pertes à chaque étape de la chaîne alimentaire
"On observe des pertes et gaspillages à chaque étape de la chaîne alimentaire", constate l'agence : au moment de la consommation (33% du total des pertes et gaspillages) mais aussi de la production (32%), de la transformation (21%) et de la distribution (14%). "L'ensemble du gaspillage et des pertes ne sont donc pas concentrés sur la phase de consommation, contrairement à l'idée largement répandue", souligne l'Ademe. Mais "plus de 40%" de leur valeur correspond à l'étape de consommation, car la valeur d'un produit augmente tout au long de la chaîne alimentaire, du fait du coût du transport, de la transformation, de la vente ou de la publicité, relève l'étude.
La part des pertes et gaspillages varie pour chaque acteur de la chaîne alimentaire. Elle représente 7,3% du tonnage pour la consommation (au foyer et hors foyer), 4,5% pour la transformation, 4% pour la production et 3,3% pour la distribution. Chez lui, chaque consommateur gaspille 29 kg de nourriture par an. Cela représente "environ 34 g par repas et par convive", précise l'Ademe.
La restauration collective, championne du gaspi
En restauration collective et commerciale, les pertes et gaspillages sont "quatre fois plus importants", avec 138 g par repas et par convive. "Cela tend à montrer que ce sont davantage des contraintes qui conduisent aux pertes et gaspillages qu'un comportement 'non responsable'", estime l'agence. En effet, dans ce type de restauration, "le choix est imposé, il est difficile d'ajuster les portions à chacun et très rarement possible de conserver ce que l'on n'a pas fini".
Les fruits et légumes sont surtout perdus et gaspillés au niveau de la production (produits abîmés, surproduction, exigences du marché). Mais pour les salades, les pertes et gaspillages sont "importants à chaque étape", à cause de leur fragilité et des exigences des distributeurs et des consommateurs. Pour les produits des filières animales, les pertes et gaspillages sont "beaucoup plus faibles que pour les productions végétales", mais "les impacts économiques et carbone sont plus significatifs", indique l'Ademe.
Les restaurants scolaires incités à réduire le gaspillage
L'agence cite à la fin de son étude un certain nombre de bonnes pratiques pour lutter contre le gaspillage tout au long de la chaîne alimentaire. Parmi ces initiatives, elle évoque celle du conseil départemental de l'Isère qui a réussi un réduire d'un tiers les pertes et gaspillages alimentaires au sein de ses 96 collèges. Il estime avoir réduit sa facture d'achat d'1 million d'euros par an qu'il a pu réinvestir dans des produits de meilleure qualité. Selon l'Ademe, qui a publié en octobre dernier un guide méthodologique pour lutter contre le gaspillage dans la restauration collective, "les actions mises en place dans les restaurants scolaires montrent des résultats facilement atteignables autour de moins 30%". La rentabilité des actions est forte, assure l'agence, en s'appuyant sur des données fournies par le Wrap, son homologue britannique. Celui-ci estime que 1 euro investi dans la prévention génère 90 euros d'économies sur les coûts des aliments et la gestion des déchets. Dans un collège de taille moyenne, réduire de 30% les pertes et gaspillages permettrait de réaliser 10.000 euros d'économie en un an.
250 contrats de service civique
La loi de transition énergétique devrait inciter à accélérer la chasse au gaspi. A compter du 1er septembre prochain, elle a en effet fixé l'obligation pour les restaurations collectives publiques de mettre en place une démarche de lutte contre le gaspillage alimentaire. En outre, la ministre de l'Environnement a lancé le 24 février dernier un programme national de service civique "Transition énergétique, climat et biodiversité" reprenant les recommandations du rapport Garrot. Dans ce cadre, l'Ademe a signé une convention avec l'association Unis-cité pour soutenir le déploiement de 250 contrats de service civique sur le territoire afin d'accompagner certaines démarches des restaurations collectives publiques. Les volontaires en service civique seront à la disposition des établissements scolaires pendant une année pour réaliser des pesées et aider l'équipe de cuisine, les gestionnaires et les convives à réduire le gaspillage. 100 jeunes devraient être opérationnels auprès de 200 établissements pour l'année scolaire 2016-2017 et 150 autres en 2017-2018 pour couvrir ainsi près de 500 établissements.