Attentats - François Baroin : "Il importe de préciser rapidement" le pacte de sécurité
2.000 maires ceints de leur écharpe tricolore, debout, entonnant la Marseillaise : le rassemblement des maires de France, organisé le 18 novembre au palais des Congrès à Paris, en remplacement de leur congrès annuel annulé à cause des attentats, s'est terminé par un geste fort témoignant de la volonté d'œuvrer avec l'Etat à la sécurité des Français. Enterrée la hache de guerre sur les dotations : l'heure se voulait à l'union nationale au lendemain d'échanges houleux à l'Assemblée. "Nous serons pleinement à vos côtés", a lancé le président de l'Association des maires de France (AMF), François Baroin, à François Hollande venu clore l'événement, en présence du Premier ministre, Manuel Valls, et de ses ministres "régaliens".
De nouveaux moyens pour les contrats locaux de sécurité
Après avoir rappelé les mesures annoncées lundi devant le Parlement réuni en Congrès à Versailles (projet de loi sur la prolongation et la clarification de l'état d'urgence, renfort des effectifs des forces de l'ordre et de la justice, révision constitutionnelle sur l'état de siège et les pleins pouvoirs...), le président de la République a répondu à l'appel de ceux qu'il a appelés "cette belle et grande avant-garde nationale". Il faut "réfléchir sur ce qu'on peut faire avec les collectivités", a-t-il déclaré, disant pouvoir "compter sur les 3.900 polices municipales de France". Mais pour le détail, il s'est montré assez vague. Evoquant le sort de Clarissa Jean-Philippe, policière municipale tuée à Montrouge, le 8 janvier 2015, il a indiqué que le gouvernement allait aider "à mieux protéger nos policiers municipaux en finançant leur équipement et en apportant aux maires qui le souhaitent les armes qui seront prélevées sur les stocks de la Police nationale". Difficile à ce stade de savoir s'il s'agit de nouvelles mesures ou bien de celles déjà prises après les attentats de janvier, comme la mise à disposition de 4.000 revolvers, le financement de gilets pare-balles ou l'interopérabilité des réseaux de radiocommunication avec ceux de la police et de la gendarmerie. "Les contrats locaux de sécurité seront renforcés par des moyens supplémentaires", a-t-il ajouté. "J'attache une grande importance à la participation des maires de France aux actions engagées, notamment dans le cadre de l'état d'urgence", avec "l'interdiction de circuler pour les personnes et les véhicules" dans des lieux précis. "Seuls les maires peuvent nous donner les renseignements" sur les "lieux sensibles", a-t-il dit, renvoyant aux réunions conduites par les préfets prévues avec les maires dans chaque département d'ici la fin de la semaine pour préciser les modalités de mise en œuvre de l'état d'urgence. L'un des enjeux de ces réunions sera notamment de recenser toutes les manifestations pour décider de leur maintien ou non.
François Hollande a aussi rappelé que les maires étaient "partie prenante des cellules de suivi et de prévention de la radicalisation créées dans chaque département". Une participation pourtant très inégale à ce jour, comme le pointe le guide sur la radicalisation tout récemment publié par le SG-CIPD et le Courrier des maires.
Le chef de l'Etat a ensuite indiqué que la dissolution des groupes ou lieux faisant de "l'apologie de terrorisme" serait facilitée par le projet de loi sur l'état d'urgence. "Ils le seront immédiatement", a-t-il assuré.
Enfin, dernier chapitre : l'accueil des 30.000 réfugiés pour les deux prochaines années. Le président a remercié les maires qui "ont créé des places d'hébergement".
La radicalisation amenée à devenir une priorité des CLSPD
Des déclarations qui ne répondent que partiellement aux nombreuses interrogations des maires sur le "pacte de sécurité" évoqué par François Hollande lundi à Versailles. "Au-delà du nombre supplémentaire de policiers et de gendarmes et de la préservation des effectifs des armées, il importe d'en préciser rapidement les contours et le contenu. Les communes doivent prendre toute leur part", a déclaré François Baroin. Le président de l'AMF a formulé des propositions concrètes comme "le recueil d'informations sur les risques et les menaces". "La lutte contre la radicalisation est à nos yeux l'une des missions prioritaires des CLSPD (conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance, ndlr) dans le cadre de ce pacte de sécurité", a-t-il souligné, insistant sur l'importance de la formation des membres de ces conseils. Il a également insisté sur "l'action de coordination des polices municipales avec la police et la gendarmerie nationales" et le développement du dispositif de "participation citoyenne" mis en œuvre dans le cadre d'un partenariat entre l'AMF et le ministère de l'Intérieur. Une pratique née dans les pays anglo-saxons ("neighbourhood watching") et apparue en France dans les Alpes-Maritimes en 2007. Elle consiste pour les habitants à surveiller leur quartier, repérer les incivilités… Plusieurs centaines de communes se sont lancées en France.
Etre mieux informés de la présence d'individus dangereux
Approuvant la démarche des réunions avec les préfets sur l'état d'urgence, François Baroin a estimé que "certains enjeux cruciaux pour la sécurité nécessitent de faire plus". Il souhaite en particulier que les élus soient "mieux informés de la présence dans [leur commune] des individus présentant une forte présomption de dangerosité" et associés "au suivi indispensable des foyers de radicalisation et d'endoctrinement que constituent certains lieux de culte". "Nous attendons de la fermeté sur la dissolution des associations ou des groupes animés par des prédicateurs", a-t-il lancé. Plus généralement, il souhaite que les élus soient tenus au courant des décisions et des mesures prises sur leur territoire.
François Baroin a aussi demandé plus de fermeté dans le contrôle des migrants. Le "principe d'humanité" et "l'accompagnement" des réfugiés supposent "que l'organisation des sites de regroupement, le contrôle précis de l'identité des personnes et la gestion de leurs déplacements soient nettement améliorés".
Enfin, les 500.000 élus locaux qu'il a qualifiés de "fantassins de la République" doivent être associés à une "définition plus large" de la "garde nationale" évoquée par François Hollande lundi. Une garde qui serait essentiellement composée de réservistes de l'armée...