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Attentats - L'état d'urgence est déclaré

Les attentats de ce vendredi 13 novembre, les plus meurtriers ayant jamais frappé la France, ont conduit l'exécutif à prendre des "mesures exceptionnelles" en décrétant l'état d'urgence sur l'ensemble du territoire. "Nous sommes en guerre", dit Manuel Valls. Fermeture de lieux publics, manifestations annulées... rappel des décisions prises ce week-end, y compris en région sous l'égide des préfets et des maires, et de ce qui est envisagé pour les jours à venir. Pour ce lundi, minute de silence, réouverture des écoles... Le congrès des maires est reporté au printemps.

Etat d'urgence, deuil national, écoles et équipements fermés, manifestations interdites, réunions de crise en préfecture... Le pays était samedi et dimanche en état de choc et réagissait par des mesures exceptionnelles, au lendemain des attentats les plus meurtriers de son histoire, qui ont fait au moins 129 morts et 352 blessés. "Nous sommes en guerre. Nous prenons donc des mesures exceptionnelles", a justifié samedi le Premier ministre.

L'état d'urgence pourrait être prorogé

C'est dès vendredi soir que François Hollande a décrété l'état d'urgence sur l'ensemble du territoire, soutenu par la classe politique qui a suspendu la campagne des régionales. "L'état d'urgence sera décrété, ce qui veut dire que certains lieux seront fermés, la circulation pourra être interdite et il y aura également des perquisitions qui pourront être décidées" dans toute la région parisienne, avait résumé le chef de l'Etat dans une courte allocution télévisée avant un conseil des ministres extraordinaire.
L'état d'urgence, que le conseil des ministres a ensuite décrété, est une procédure rarissime instaurée en 1955 lors de la guerre d'Algérie, et qui a été utilisée lors des émeutes dans les banlieues en 2005. Il permet aux autorités "d'interdire la circulation des personnes" et d'instituer "des zones de protection ou de sécurité". Un second décret est en outre venu instaurer dans l'ensemble des communes d'Ile-de-France des "mesures renforcées" permises par l'état d'urgence : assignation à résidence de toute personne "dont l'activité est dangereuse", fermeture provisoire des salles de spectacles et des lieux de réunion, et "remise des armes" par leurs propriétaires, a indiqué la présidence. Le décret permet aussi "la possibilité de procéder à des perquisitions administratives" en Ile-de-France.
La prorogation de l'état d'urgence au-delà de douze jours ne peut être autorisée que par une loi, votée par le Parlement, qui en fixe la durée définitive. Or François Hollande a précisément indiqué dimanche aux responsables parlementaires et de partis reçus à l'Elysée qu'il souhaitait que l'état d'urgence dure trois mois "au minimum" et voie son "périmètre" modifié, ont déclaré à l'AFP plusieurs sources parlementaires. Le conseil des ministres examinera ainsi mercredi un projet de modification de la loi de 1955. Dans le délai actuel de 12 jours, les deux commissions des lois de l'Assemblée et du Sénat travailleront ensemble pour "adapter" cette loi à la situation créée par les attentats, selon Gérard Larcher, le président du Sénat. En sachant que le chef de l'Etat s'adressera au Parlement réuni en Congrès à Versailles ce lundi "pour rassembler la Nation dans cette épreuve". C'est la première fois que le Congrès est convoqué depuis le début du quinquennat de François Hollande. Cette possibilité pour le président de la République de s'adresser directement aux parlementaires a été créée par la révision constitutionnelle de 2008.

"L'état d'urgence, c'est la volonté, à travers la prorogation et la révision de la loi de 1955, de pouvoir de façon ferme et déterminée procéder à l'expulsion de ceux qui doivent être expulsés", a pour sa part déclaré Bernard Cazeneuve dimanche soir sur France 2, annonçant qu'une disposition pour la dissolution des mosquées radicales sera étudiée prochainement en conseil des ministres.
Le ministre de l'Intérieur avait adressé ce week-end à l'ensemble des préfets des instructions pour leur rappeler les conditions d'application de cet état d'urgence. S'exprimant samedi pour exposer les principales mesures, il a précisé que les préfets de départements peuvent notamment mettre en place un "couvre-feu dans les secteurs qui leur paraîtraient exposés à des risques importants de trouble à l'ordre public". Une décision que le préfet du Rhône, Michel Delpuech, avait déclaré samedi ne pas exclure sur le territoire de la métropole lyonnaise "si des confrontations ou des allégeances au terrorisme se produisaient". Les préfets peuvent également "établir des périmètres de protection autour des bâtiments publics et d'édifices privés qui seraient susceptibles de faire l'objet de menaces", a expliqué Bernard Cazeneuve. Enfin, "dans les zones prévues par décret" – à savoir en Ile-de-France -, les préfets peuvent "ordonner la fermeture provisoire des salles de spectacle, des débits de boissons et divers lieux de réunion, et interdire toute manifestation susceptible de représenter un risque pour les participants".

Paris : les équipements municipaux rouvrent ce lundi

La préfecture de police de Paris a effectivement pris un arrêté étendant l'interdiction de manifester sur la voie publique à l'ensemble de l'Ile-de-France jusqu'à lundi. Les départements de la Seine-et-Marne, des Yvelines, de l'Essonne et du Val-d'Oise étaient donc également concernés. Pour Paris et les départements de la petite couronne - Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val-de-Marne -, l'interdiction de manifester court jusqu'à jeudi. "Ces mesures seront réévaluées et adaptées au fur à mesure de l'avancement des enquêtes qui sont en cours", a précisé le préfet de police de Paris.
Dans la capitale on le sait, tous les équipements municipaux - jeunesse, sportifs, musées et monuments... – sont restés fermés durant tout le weekend. La mairie de Paris a ensuite fait savoir dimanche après-midi que "l'essentiel des équipements publics parisiens rouvrira ses portes lundi : les crèches, les écoles, les collèges et lycées municipaux, les équipements sportifs, les établissements culturels, les monuments ou encore les espaces verts".
L'interdiction des manifestations sur la voie publique jusqu'à jeudi devait initialement concerner y compris les marchés alimentaires découverts, brocantes et autres animations. Finalement, la ville de Paris permet "la reprise, dès lundi, des marchés alimentaires", invitant toutefois ses agents à y exercer "une vigilance particulière". En revanche, "les manifestations festives et revendicatives sur l'espace public" restent bien interdites "jusqu'au 19 novembre" tandis que "certaines activités prévues cette semaine peuvent être suspendues et certains horaires peuvent être aménagés".
A l'échelle francilienne, les musées, salles de spectacles et autres établissements publics culturels de la région rouvriront eux aussi lundi à 13h, a annoncé dimanche la ministre de la Culture à l'issue d'une réunion avec l'ensemble des dirigeants de ces établissements. La réouverture interviendra "après la tenue le matin même d'un comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) exceptionnel, et après la minute de silence". Fleur Pellerin a par ailleurs annoncé que "le ministère accompagnerait les établissements au cas par cas dans l'adaptation de leur dispositif de sécurité" et a rappelé "le renforcement des mesures du plan Vigipirate, à son niveau maximum".

En région, les préfets s'adressent aux maires

En dehors de l'Ile-de-France, les consignes ou recommandations des préfets aux maires ont connu des nuances selon les départements. En tout cas, la plupart d'entre eux ont adressé une circulaire ou un message aux élus locaux et, pour certains, ont réuni les maires des principales villes. "Chaque préfet a la latitude de mettre en œuvre les pouvoirs qui lui sont confiés dans le cadre de l'état d'urgence, selon l'appréciation qu'il porte sur la situation de son département et les moyens les plus adaptés pour répondre à la menace", a ainsi rappelé aux élus le préfet du Vaucluse. Celui-ci n'a pour sa part émis "aucune objection à caractère général à la tenue des manifestations sportives, des spectacles ou autres rassemblements", appelant à une "vigilance renforcée" tout en évoquant l'importance de "continuer à vivre, aussi normalement que possible".
Dans l'Ain, le préfet a laissé les maires décider du maintien ou non des manifestations prévues. Dans le Tarn, le préfet a fait savoir aux maires que "les manifestations de soutien et d'hommage sur la voie publique ne sont pas encouragées dans cette période où les forces de l'ordre et de sécurité, déjà fortement employées, ne sauraient être distraites ou détournées de leurs missions prioritaires". En Charente-Maritime, pas d'"annulation systématique" des divers événements organisés pendant le week-end même si "le respect dû aux nombreuses victimes" plaidait en faveur d'un report "à l'initiative des organisateurs", indiquait le courrier du préfet.

Les diverses consignes n'ont pas empêché plusieurs milliers de personnes de se rassembler spontanément non seulement à Paris mais aussi dans de nombreuses villes de province en hommage aux morts des attaques de vendredi, donnant parfois lieu à des tensions avec des poignées militants d'extrême droite venus perturber le recueillement, comme à Lille ou à Metz.
A Poitiers, rare ville à avoir organisé une communion populaire, quelque 5.000 personnes se sont réunies, et des roses ont été déposées sur le parvis de la mairie. A Saint-Quentin (Aisne), où le rassemblement était également à l'initiative de la municipalité, 1.500 personnes se sont rassemblées. Un millier de personnes se sont aussi regroupées devant la mairie de Bayonne. D'autres rassemblements ont été constatés à Quimper (700 personnes), Arras (500), Nantes (450), Limoges (300), sur la place Stanislas de Nancy (200), sous la statue de Jeanne d'Arc d'Orléans (200 à 300), à Tours (300 personnes), Cherbourg, Caen ou Laval. A Toulouse, 200 personnes environ se sont recueillies devant le Capitole dans un silence quasi absolu,

Deuil national et minute de silence

Le deuil national annoncé samedi par François Hollande pour une durée de trois jours est également une décision exceptionnelle en France. C'est en effet la sixième fois seulement qu'une telle mesure est décrétée sous la Ve République. Durant le deuil national, les drapeaux sont mis en berne et hissés à mi-mât sur les édifices publics - ils le seront jusqu'à mardi, donc - et les administrations peuvent être fermées.
Le dernier deuil national en France remonte au début de l'année, le 8 janvier, qui avait été déclaré "jour de deuil national" en hommage aux victimes de l'attentat contre Charlie Hebdo. Il faut remonter au 14 septembre 2001, trois jours après les attentats aux Etats-Unis, pour retrouver une mesure identique. Ce deuil avait été observé dans toute l'Union européenne, qui avait demandé aux Etats membres d'observer trois minutes de silence.
Aujourd'hui aussi, l'Union européenne invite "tous les Européens" à observer une minute de silence ce lundi à 11h GMT en hommage aux victimes des attentats de Paris, dans une déclaration des dirigeants des pays membres et des institutions de l'UE publiée par la Commission européenne.
Partout en France, c'est à 12h que sera observée cette minute de silence. Une circulaire en ce sens a été signée samedi midi par Manuel Valls. Cette circulaire a été envoyée aux "ministres, secrétaires d'Etat et directeurs d'administrations". Elle prévoit que "l'ensemble de nos concitoyens doit pouvoir se joindre à cet hommage". "Les employeurs ont été invités à permettre à leurs salariés d'y participer" et les responsables d'administration sont invités à organiser un "moment de recueillement".

Ecoles ouvertes, sorties annulées

Cette minute de silence concernera également les établissements scolaires. Najat Vallaud-Belkacem "laisse le soin aux équipes pédagogiques d'adapter ce moment de recueillement à l'âge des élèves", soulignant qu'il est "important que ce moment puisse être précédé de ces temps d'échanges avec les élèves".
"Des consignes complémentaires ont été envoyées à tous les recteurs et rectrices et vont parvenir à vos directions", précise la ministre dans un courrier à la communauté éducative. Les enseignants pourront avoir recours à des ressources pédagogiques mises en ligne sur le site Eduscol pour "accueillir les élèves, les accompagner et nourrir les discussions". Des cellules psychologiques "sont déployées dans les écoles, collèges, lycées et établissements d'enseignement supérieur, en Ile-de-France (...) mais aussi ailleurs à la demande des directeurs d'école et chefs d'établissement".
Toutes les écoles et universités franciliennes - académies de Paris, Créteil et Versailles - fermées samedi devaient bien rouvrir leurs portes ce lundi matin. Les voyages scolaires, qui avaient été annulés sur tout le territoire métropolitain pour ce week-end, sont finalement annulés jusqu'au dimanche 22 novembre. "Pour les élèves en déplacement actuellement, un recensement a été réalisé. Ils reviendront dans les conditions prévues initialement", indique la rue de Grenelle.
Sont aussi annulées cette semaine les sorties scolaires occasionnelles (cinéma, musées). Les sorties régulières (cantine, gymnase) sont elles maintenues tant qu'elles n'impliquent pas de déplacement en transport en commun public.

Une "réunion exceptionnelle" en lieu et place du congrès des maires

L'une des plus importantes manifestations publiques programmées la semaine prochaine dans la capitale... n'était autre que le congrès des maires qui devait se tenir de mardi à jeudi à Paris. Il a finalement été annulé et reporté "à la demande de l'Etat et en accord avec celui-ci" en raison des "impératifs de sécurité", après les attentats. Le report a été décidé à la suite d'un entretien entre les dirigeants de l'Association des maires de France – François Baroin et André Laignel - et Manuel Valls. Dans un communiqué diffusé samedi en fin de journée, l'AMF précise que le congrès est reporté au printemps, du 31 mai au 2 juin. Couplé au Salon des maires et des collectivités, l'événement devait accueillir 60.000 personnes pendant 3 jours à la porte de Versailles.
L'AMF exprime avant tout "sa vive émotion, son immense tristesse et son entière solidarité à l'égard des familles des victimes et des blessés de ces actes de barbarie" et souligne que "les maires de France soutiennent pleinement, dans un cadre d'union nationale contre le terrorisme, les mesures annoncées par le président de la République portant sur l'état d'urgence et le rétablissement des contrôles aux frontières pour assurer la sécurité de nos compatriotes".
L'AMF a néanmoins décidé d'organiser, mercredi 18 novembre, une "réunion exceptionnelle des maires". "Dans un cadre d'union nationale contre le terrorisme, ce rassemblement témoignera de la mobilisation des maires et des présidents d'intercommunalité, aux côtés de l'Etat, pour assurer la sécurité de nos compatriotes et de leur engagement pour les valeurs de liberté, d'égalité, de fraternité et de laïcité qui font la force de notre République", a indiqué dimanche l'association. Celle-ci souhaite aussi "rappeler le rôle essentiel de la commune et des maires, en tant que premier pilier de notre démocratie, qui œuvrent quotidiennement et au plus près des populations pour tisser les liens de solidarité et pour le bien vivre-ensemble". Rendez-vous est donné au palais des Congrès, porte Maillot à Paris, de 10h à 13h, aux maires invités à arborer ce jour-là leur écharpe tricolore.
On notera que le Salon de l'éducation, qui se tient lui aussi chaque année à la porte de Versailles au même moment que le congrès des maires et intéresse par exemple les responsables éducation des villes, est lui aussi reporté "à une date ultérieure".

Enfin, la question du maintien de la plus grande conférence que la France ait jamais organisée s'est naturellement posée ce week-end. La COP21. Près de 120 chefs d'Etat attendus, 40.000 visiteurs quotidiens, des manifestations... Les attentats de Paris font plus que jamais de la sécurité de la conférence climat un défi. Mais le gouvernement compte bien maintenir cet événement mondial qui doit s'ouvrir le 30 novembre par le sommet de chefs d'Etat et de gouvernement. Selon une source proche du dossier, les autorités "réfléchissent à la possibilité de réduire les risques en interdisant les manifestations. Mais aucune décision n'est prise à ce stade, c'est encore prématuré".

Claire Mallet

S'agissant du déploiement des forces de sécurité, Bernard Cazeneuve a souligné samedi que "l'ensemble des forces" sont "en alerte maximale" - "tous les policiers, les gendarmes, les sapeurs-pompiers et les militaires". On saura ainsi entre autres que "la DCSP assure le contrôle des gares RER, et la DCPAF celle des gares frontalières et des lignes transnationales", que "les ports font l'objet de mesures de sûreté particulières", que "les gares parisiennes internationales sont prises en compte par la préfecture de Police", et que "les axes routiers et notamment les autoroutes sont pris en charge par la DCSP et les CRS". "Les armées ont dégagé 1.000 militaires supplémentaires, essentiellement en Ile-de-France". "L'ensemble de ces renforts vient en appui des 30.000 policiers, gendarmes et militaires engagés depuis plusieurs mois à la protection de 5.000 lieux sensibles sur l'ensemble du territoire, dans le cadre du plan Vigipirate", a rappelé le ministre de l'Intérieur. 

 

 

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