Audiovisuel - France 3 envisage d'ouvrir sa gouvernance aux régions
Dans une interview au quotidien Le Monde du 20 avril, Rémy Pflimlin a fait une annonce qui ne devrait pas manquer de faire réagir les présidents de conseils régionaux. Le président de France télévisions n'exclut pas en effet d'ouvrir la gouvernance de France 3 aux régions. Cette possible évolution s'inscrit dans le cadre de la réforme - en cours de préparation - de la chaîne des régions, qui devrait être annoncée à l'automne. Rémy Pflimlin compte en effet, "après la rentrée, transformer France 3 et proposer un projet qui permettra d'installer plus fortement encore la chaîne dans la proximité". Tout en conservant, au moins pour un temps, son antenne nationale, France 3 devrait ainsi voir sa vocation régionale et locale très nettement renforcée.
Pour cela, le projet de réforme envisage, au stade actuel, un découpage en une douzaine de chaînes régionales, mesure d'organisation qui ne ferait pas nécessairement disparaître les éditions locales. Dans cette nouvelle configuration, le président de France télévisions ne cache pas son intention de solliciter davantage les régions pour participer au financement de ces chaînes. Le principe n'a rien de nouveau, puisque de nombreux départements ou régions participent déjà au financement d'émissions ou de productions régionales ou locales, notamment dans le secteur du documentaire. Mais France télévisions semble tabler désormais sur une participation financière à la fois plus conséquente et plus structurée. Pour inciter les régions à franchir le pas, Rémy Pflimlin entend donc les associer à la gouvernance des chaînes, selon des modalités sur lesquelles il s'est pour l'instant bien gardé de lever le voile.
Des problèmes juridiques et déontologiques
Lors de ses récentes auditions par les commissions de la culture de l'Assemblée et du Sénat - dans le cadre du suivi de l'exécution du contrat d'objectifs et de moyens (COM) de France télévisions -, Rémy Pflimlin avait certes évoqué "davantage de syndication et des frontières régionales mobiles", mais n'avait pas été aussi loin que dans son interview au Monde (voir notre article ci-contre du 15 décembre 2011).
L'accélération de cette réforme n'est évidemment pas sans rapport avec le net recul (et le vieillissement) de l'audience de France 3, qui risque d'être encore aggravé par l'arrivée de six nouvelles chaînes gratuites sur la TNT (voir notre article ci-contre du 20 avril 2012). En février, l'audience moyenne de la chaîne s'est ainsi encore rapprochée un peu plus du plancher de 9%. En outre, les nouveaux programmes régionaux lancés par la nouvelle équipe affichent des audiences très moyennes, malgré un budget qui dépasserait les 400 millions d'euros (voir notre article ci-contre du 14 octobre 2011). Selon les jours, l'audience de ces nouveaux rendez-vous régionaux varie ainsi entre 2,5 et 5% de part d'audience. Les tranches régionales du samedi matin et après-midi, moins concurrencées, ne font guère mieux avec des taux d'audience oscillant entre 4 et 6%.
Si une réforme d'ampleur de France 3 paraît inéluctable face à l'effritement de l'audience - comment justifier autrement 6.000 salariés et 800 millions d'euros de budget ? -, la voie choisie s'annonce ardue. Outre les relations parfois très tendues entre les stations régionales de France 3 et les élus locaux, il faudra aussi résoudre des questions juridiques et déontologiques plus que délicates : quel serait le pouvoir réel des régions au sein des nouvelles entités ? Comment concilier cette présence et ces financements croissants avec la nécessaire indépendance de la ligne éditoriale ?...
On rappellera aussi que les annonces de Rémy Pflimlin ne sont pas la première tentative de réforme de France 3. Pour s'en tenir aux années récentes, la commission Copé sur l'avenir de la télévision publique avait ainsi proposé de réorganiser la chaîne en sept entités régionales (voir notre article ci-contre du 13 juin 2008), tandis qu'un an plus tard - après l'abandon des conclusions de la commission Copé - France télévisions envisageait à son tour d'organiser sa chaîne régionale en quatre "pôles de gouvernance" (voir notre article ci-contre du 11 septembre 2009).