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Finances locales - Fiscalité économique locale : les régions marquent leur impatience

Les régions rêvent de retrouver leur autonomie fiscale. Le gouvernement n'y est pas défavorable. Sauf que la discussion sur le projet de loi de finances s'apparente pour elles à une occasion manquée.

Le 10 octobre dernier, les présidents de régions arboraient une mine réjouie. Le Premier ministre promettait, lors de leur congrès à Toulouse, que leurs collectivités bénéficieraient d'une "redéfinition de leurs ressources" et disposeraient d'une "fiscalité économique" (voir notre article ci-contre). Ce 13 novembre, soit à peine plus d'un mois plus tard, l'Association des régions de France (ARF) se voit obligée de monter au créneau pour réclamer que les "engagements" soient "tenus".
En cause : le retrait à l'Assemblée nationale d'un amendement parlementaire déposé dans le cadre de l'examen du projet de budget pour 2015, qui prévoyait l'affectation progressive aux régions de nouvelles recettes de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) jusqu'à atteindre un taux de 70% en 2017. Une telle évolution devait se faire aux dépens des départements, qui perçoivent aujourd'hui 48,5 % des quelque 16 milliards d'euros du produit de cet impôt.
Le gouvernement n'a pas apporté son soutien à l'amendement. Non parce qu'il y était hostile, mais parce qu'il le jugeait "prématuré". La répartition des ressources fiscales (…) "dépendra de l'avenir que le Parlement réservera aux départements [dans le cadre de l'examen du projet de loi sur la nouvelle organisation territoriale de la République]", a déclaré le secrétaire d'Etat en charge du budget. Qui n'a pas fermé la porte à la discussion. "Ce sujet d'importance fera probablement l'objet de débats dans le cadre d'une prochaine loi de finances", a-t-il ajouté. Une phrase qui n'a pas rassuré l'ARF.
Le transfert aux régions de ressources fiscales "est d'autant plus nécessaire qu'[elles] sont les plus pénalisées par la baisse des dotations de l'Etat", a-t-elle réagi dans un communiqué. Dépourvues quasiment de tout levier fiscal qui leur offrirait un terrain de compensation, les régions s'attendent à perdre au total 1 milliard d'euros de ressources financières d'ici à fin 2017. Un sort bien pire que celui que devraient connaître le secteur communal et les départements, dont les recettes devraient, sur la même période, augmenter respectivement de 1,4 milliard d'euros et 1,6 milliard d'euros, selon l'ARF.
Dans son dernier rapport sur les finances publiques locales, la Cour des comptes estime que, dans les prochaines années, les régions qui ne bénéficieront pas du "relatif dynamisme des ressources fiscales, et notamment de la CVAE", seront "contraintes d'infléchir plus sensiblement l'évolution de leurs dépenses". Elle plaide pour le transfert aux régions d'"une partie de la fiscalité directe des départements", citant les "taxes foncières ou la CVAE". Suite à sa présentation à la mi-octobre, l'ARF avait donc naturellement salué "ce rapport qui met bien en évidence la particularité des régions et les indispensables évolutions qu'elles doivent connaître sur le plan du modèle de financement".
Auditionné il y a quelques jours par la commission des Lois du Sénat sur le projet de loi relatif aux compétences des collectivités, le président de l'ARF, Alain Rousset, est longuement revenu sur cette question des ressources des régions, et notamment de la CVAE. Il s'agissait pour lui de souligner à quel point serait paradoxal "le fait que les régions aient la part la plus faible de la CVAE" et donc le fait "que le retour sur investissement ne retombe pas dans la collectivité qui fait le plus en matière d'économie et de soutien aux entreprises".
Le fait que l'Assemblée ait renoncé ce 14 novembre à créer, toujours dans le cadre du PLF, le versement transport "interstitiel" qui aurait dû bénéficier aux régions (voir notre article de ce jour) ne devrait guère contribuer à calmer l'impatience.

T.B. / Projets publics

Les députés adoptent la revalorisation des bases fiscales de 0,9 % en 2015
Tout en enregistrant le retrait de l'amendement sur la CVAE des régions, les députés ont voté le 13 novembre, dans l'hémicycle, la revalorisation en 2015 de 0,9 % des valeurs locatives servant de base aux impôts directs locaux. Ce taux correspond à l'inflation prévisionnelle. Sans augmenter leurs taux, les communes, EPCI et départements se partageront ainsi, l'année prochaine, un surcroît de recettes de quelque 450 millions d'euros. Les régions qui, depuis 2011, ne disposent plus de recettes de taxes foncières, n'en profiteront pas.
Tous les échelons de collectivités, à l'exception des régions, "ont obtenu des mesures compensatoires et/ou de nouvelles ressources fiscales dans ce projet de loi de finances pour 2015" se plaint l'ARF. Qui juge cela "incompréhensible".