Factures des boulangeries : gouvernement et régions se mobilisent
Report des impôts et cotisations sociales, résiliation sans frais des contrats "prohibitifs", cumul des aides de l’Etat : l’exécutif a fait feu de tout bois, ce mardi 3 janvier, pour tenter d’éteindre la grogne des boulangers frappés par la hausse des matières premières et l'envolée des factures d'énergie. Il rappelle aussi les fournisseurs d’énergie à leurs responsabilités. Certaines régions proposent des aides complémentaires.
S’affichant sur les réseaux sociaux en rentrant à Paris, lundi, avec une biographie de Marylin Monroe dans les mains, le ministre de l’Economie Bruno Le Maire semblait savourer un rare moment de calme. C’était sans compter sur la grogne des boulangers qui, confrontés à une hausse des matières premières et à la flambée de leurs factures d’énergie, ont appelé à manifester le 23 janvier. Branlebas de combat mardi à Bercy où le ministre a reçu coup sur coup les boulangers puis les fournisseurs d’énergie dont il a rappelé les responsabilités. "Ceux qui ne respectent pas cette charte (qu’ils avaient signée cet automne, NDLR) dans les jours qui viennent, verront leur nom divulgué publiquement, de façon à ce que chaque client sache qui se comporte bien et qui ne respecte pas les règles", a menacé le ministre à l’issue de sa rencontre avec les énergéticiens. Ces derniers ont pris trois engagements, a-t-il annoncé. Le premier sera de faire figurer sur leurs factures des PME de janvier (émises courant février) "le bénéfice de l’amortisseur qui pourra représenter en moyenne une réduction de 20% de la facture". "J’invite donc toutes les PME éligibles à cet amortisseur (…) à se faire connaître sans délai, le plus vite possible, auprès des fournisseurs d’énergie", a signalé le ministre, entouré d’Agnès Pannier-Runacher (Transition énergétique), d’Olivia Grégoire (PME, Commerce et Artisanat) et de Roland Lescure (Industrie).
Les fournisseurs se sont par ailleurs engagés à "donner des facilités de paiement" aux TPE et PME qui auraient des difficultés de trésorerie. Ce qui se fera avec la garantie de l’Etat votée dans le budget 2023 et qui sera "effective dans les tout prochains jours", après le feu vert de la Commission européenne, a précisé le ministre.
Résiliation exceptionnelle des contrats
Enfin, une "mesure exceptionnelle" sera accordée exclusivement aux boulangers qui pourront résilier sans frais leur contrat lorsque les prix ont explosé de manière "prohibitive et insupportable". Sous la pression du Rassemblement national qui, le jour même, a adressé une lettre aux boulangers, proposant de sortir des règles européennes de fixation des prix de l’électricité (indexé sur le prix du gaz), le gouvernement compte aussi faire œuvre de communication. Il entend ainsi envoyer dans les prochains jours un courrier "personnalisé" aux boulangers pour les inciter à se saisir des aides déjà existantes : l'amortisseur électricité et le guichet d'aide au paiement des factures de gaz et d'électricité (ils ne bénéficient pas en revanche du "bouclier tarifaire"). Dispositifs complexes et trop souvent méconnus, reconnaît l’exécutif. "Il y aurait un véritable paradoxe à ne pas soutenir un corps de métier dont la baguette de pain vient d’être inscrite au patrimoine immatériel de l'Unesco", a soutenu Bruno Le Maire à l’issue de sa rencontre avec les boulangers. Le ministre a rappelé qu’en cumulant ces deux aides, les artisans boulangers pouvaient obtenir une réduction de 40% sur la totalité de leurs dépenses d’énergie. "L’enjeu aujourd’hui c’est que ces entreprises qui ont accès à beaucoup des dispositifs de soutien de l’Etat puissent en bénéficier concrètement et le voir dans leurs factures", a explicité Agnès Pannier-Runacher. La ministre s’est aussi voulue rassurante. L’augmentation très forte des factures est selon elle conjoncturelle et liée au pic de consommation hivernale. Les prix devraient revenir à la normale au printemps, assure-t-elle. "Cela ne représente pas la réalité des factures sur l’ensemble de l’année", a-t-elle souligné, évoquant une "déformation des factures qui donnent le sentiment d’une augmentation très forte". Un sentiment qui a pourtant déjà conduit pas mal d’artisans à mettre la clé sous la porte.
Aides d'urgence régionales
L’Etat entend aussi se montrer conciliant. Les boulangers pourront demander le "report du paiement de leurs impôts et cotisations sociales" pour soulager leur trésorerie, a également annoncé sur Franceinfo la Première ministre Elisabeth Borne, mardi matin. Si les aides ne sont pas réclamées, "c'est qu'on doit encore simplifier les choses", a-t-elle aussi souligné. Des points d'accueil devraient être mis en place dans chaque préfecture, en plus du numéro vert existant (0806 000 245).
Alors que les collectivités avaient alerté sur la situation des boulangers au mois de décembre, deux régions - Paca et Auvergne-Rhône-Alpes - ont annoncé ce mardi avoir débloqué des aides complémentaires. La région de Laurent Wauquiez évoque un fonds d’aide d’urgence de 6 millions d’euros "auquel pourront se joindre les collectivités territoriales de la région". Celle-ci se donne "une semaine pour cadrer, avec les fédérations et les réseaux consulaires, un plan d’aide simple et rapide afin d’éviter les fermetures". De son côté côté, Renaud Muselier a présenté un "chèque urgence énergie" pour les boulangers et pâtissiers avec une enveloppe de 3 millions d'euros immédiatement débloquée.