Nantes Métropole réduit la place de la publicité en ville (44)
En juin 2022, Nantes Métropole a approuvé son Règlement local de publicité métropolitain. Il permet de limiter la place de la publicité dans le paysage. La métropole a également renégocié son marché de mobilier urbain, afin de diminuer son impact publicitaire dans la ville. La démarche, construite avec les communes, a associé un panel citoyen et élargi le sujet au-delà des seules obligations réglementaires.
Dans la nuit du 4 au 5 janvier 2023, 19 équipes se sont déployées dans Nantes pour retirer 116 panneaux de mobilier urbain de 8 m2. Cette opération « coup de poing » a marqué les esprits et incarne la volonté concrète de diminuer la place de la publicité en ville sur le territoire de Nantes Métropole. « Ce qu'on ne voit plus, on l'oublie rapidement, note Pascal Pras, vice-président à l'urbanisme durable à Nantes Métropole. Aujourd'hui, avec le règlement local de publicité, nous disposons d'un outil efficace pour réduire la place de la publicité et son impact visuel, libérer le paysage urbain, l'apaiser et le rendre plus qualitatif. »
Traiter les espaces de manière qualitative
En 2010, la loi Engagement National pour l’Environnement (ENE - Grenelle II) a obligé les collectivités ayant un Plan local d'urbanisme métropolitain (PLUm) à adopter un Règlement local de publicité métropolitain (RLPM), sous peine de basculer dans la règle générale du code de l'environnement. À Nantes, les élus métropolitains ont fait le choix du RLPM, partageant le constat d'une présence invasive de la publicité en ville et d'une règle nationale trop permissive. « Nous avons adopté notre PLUm en 2019. 14 communes sur 24 disposaient alors d'un règlement de publicité municipal, dont 13 devaient être mis à jour, indique le vice-président. Après un inventaire cartographique exhaustif de la publicité sur notre territoire, nous avons prescrit le lancement du RLPM en octobre 2020 pour s'assurer de protéger équitablement tout notre territoire. » Si Nantes n'a pas été la première métropole française à se lancer, elle l'a fait avec une originalité : elle a mobilisé un panel citoyen, au-delà de la concertation préalable obligatoire.
28 citoyens qui questionnent la place de la publicité en ville
« En parallèle du dialogue avec les acteurs économiques et de protection du paysage et du patrimoine, nous avons réuni un panel citoyen de 28 habitants sur un sujet plus large que le seul règlement de publicité, indique Laure Charrier, coordinatrice du RLPM. La question que nous leur avons posée était : quelle place pour la publicité en ville ? » Au-delà des enjeux de paysage que peut régir le RLPM, cela permettait aussi d'aborder les enjeux de transition écologique et énergétique, d’éthique et d’économie publicitaire. « Les citoyens nous ont remis leur avis au printemps 2021, nous y avons répondu point par point, souligne le vice-président. Ils ont insisté par exemple sur l'importance d'éviter la publicité aux abords des lieux d'enseignement, ou fait part de leur préoccupation concernant l'éthique du message publicitaire : sexisme, produits addictifs, incitation à la consommation… ». Nantes Métropole a ensuite lancé la construction de la règle, en étroite relation avec ses communes membres et arrêté son projet fin 2021.
Panneaux réservés à la communication institutionnelle
Fixer une règle pour l'affichage publicitaire sur l'espace privé ne pouvait aller sans respecter la même pour le mobilier urbain (abri voyageur bus, panneaux…) implanté dans l'espace public qui porte aussi de la publicité commerciale. En parallèle à l’élaboration du projet de règlement, Nantes Métropole a donc renégocié son contrat de mobilier urbain, avec la volonté ferme d'aller le plus loin possible et en assumant une perte de recettes conséquente (Encadré chiffres clés). « Notre principal contrat avait été signé en 2017, se passant déjà des panneaux de 12 m2 », précise Amandine Gourlay, responsable de l’environnement urbain au service voirie et aménagement. « Cette nouvelle étape nous a permis de supprimer plus de la moitié des 210 panneaux de 8 m2, et de réduire de moitié la publicité en secteur sauvegardé. » Une vingtaine de panneaux ou d'abris voyageurs bus ont aussi été restreints à la seule communication institutionnelle ou sans publicité. Enfin, une dizaine de panneaux situés à moins de 50 mètres d'une école ou d'un collège a été déplacée. L’éclairage des mobiliers baisse d'intensité de 22 heures à minuit et de 6 heures à 7 heures, et est totalement éteint entre minuit et 6 heures (à l’exception des abris voyageurs bus qui restent allumés pendant toute la durée du service de transport, pour des raisons de sécurité). Petit plus notable : 20 % des emplacements supprimés ont été rendus à la « pleine terre » pour mieux absorber les écoulements d'eau.
Moitié moins de panneaux publicitaires à terme
Depuis l'adoption du RLPM en juin 2022, la publicité est interdite sur 70 % du territoire métropolitain nantais. Sur les 30 % restants, la règle varie selon les secteurs (zone d'habitat, mixte ou d'activité), avec la disparition attendue d'environ la moitié des 3 000 panneaux publicitaires existants. Des choix forts ont été faits : protection des secteurs d’habitat, à sensibilité patrimoniale ou paysagère (le long des cours d'eau, secteur sauvegardé de Nantes…), format maximum d'affichage de 8 m2 contre 12 m2 jusque-là et stricte limitation du numérique. « Sur ce point, la loi Climat et résilience d'août 2021, adoptée pendant notre travail, nous a permis d'aller assez loin », note la coordinatrice du RLPM. Désormais, les panneaux numériques, de 2 m2 maximum, doivent être éteints entre minuit et 6 heures, y compris lorsqu'ils sont placés derrière les vitrines des commerces. « Les publicitaires ont jusqu'au 19 juillet 2024 pour se mettre en règle, les commerces jusqu'au 19 juillet 2028 pour adapter leurs enseignes commerciales. »
Un document équilibré, garant d'une règle juridique stable
« Nous avons réussi à adopter notre RLPM à l'unanimité, avec une co-construction forte en amont avec les communes, se réjouit le vice-président. Le débat public avec les acteurs, très constructif, a permis de quasiment éviter les recours. Un seul recours a été déposé. C'est la preuve d'un document équilibré qui garantit une règle stable, va suffisamment loin dans la protection de l’environnement et du paysage, tout en préservant le droit d'affichage des acteurs économiques. » Pour assurer l'application effective du RLPM sur le terrain, Nantes Métropole opère en lien étroit avec les communes, avec un pouvoir de police de la publicité. Elle s'est aussi dotée d'un prestataire externe qui sillonne le territoire. Enfin, elle prévoit que tout citoyen puisse informer de la présence d'un dispositif ne respectant pas la règle, via l'application « Nantes dans ma poche ».
Les chiffres clés de l’opération
- 3 000 aujourd'hui, 1 500 demain : la baisse attendue du nombre de panneaux publicitaires avec l'application du RLPM
- 80 000 euros : le coût global de la démarche RLPM, avec notamment : diagnostic, cartographie des 3 000 dispositifs publicitaires et formalisation des enjeux (32 000 euros), rédaction du règlement (32 500 euros), mise au point du projet et accompagnement de l’enquête publique (16 000 euros). À noter aussi l'intérêt du recours à un registre dématérialisé d'enquête publique, pour un coût très modeste (300 euros). Lauréate de l’appel à projet « RLPi 2021 », Nantes Métropole a par ailleurs obtenu une subvention de 10 000 euros de la part de l’État.
- 3,5 millions d'euros par an : le montant des recettes dont se prive la collectivité, suite à la renégociation de son marché de mobilier urbain, soit une baisse de 46 %.
Nantes Métropole
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Pour aller plus loin
- Sur le site de la métropole de Nantes, le règlement local de publicité métropolitain
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