À La Méaugon, construire dans le respect de l’environnement, ça rapporte ! (22)

Gestion intégrée des eaux pluviales avec massif d'infiltration sur parcelle privée, valorisation des chênes existants au sein d'une bande boisée, talus séparatifs pré-plantés, pas d'éclairage public mais un balisage lumineux.... Le lotissement de Vau Lorgan à la Méaugon a d'indéniables qualités environnementales. « À l'heure du Zéro artificialisation nette, ce lotissement appartient peut-être déjà au passé, indique, modeste, Jean-Marc Labbé, le maire. Mais on a poussé loin la réflexion et osé des choses plutôt innovantes à notre échelle. » La commune de 1 300 habitants, située dans l'agglomération de Saint-Brieuc n'en est pas à son coup d'essai en faveur de l’environnement : un arrêté anti-phyto dès 2008, une politique de rénovation énergétique des bâtiments publics, l'optimisation de son réseau d'éclairage public, un réseau de chaleur...

Comment inciter à construire plus vertueux ?

La commune lance en 2017 la réflexion sur ce lotissement, après avoir optimisé le foncier encore disponible en dents creuses : « On a fait du ZAN bien avant l'heure ! » Elle travaille le projet avec la Société publique locale (SPL) Baie d'Armor Aménagement, missionnée pour commercialiser ces nouvelles maisons, sans urgence à livrer car un lotissement privé est déjà en cours de construction : « On avait déjà ouvert deux classes d’école en 2018, on ne voulait pas aller trop vite et saturer nos équipements publics ». Le permis d'aménager est déposé en 2020, juste avant la crise Covid. « En poursuivant la réflexion, on s'est demandé comment on pouvait inciter les futurs acheteurs à privilégier des solutions écologiques pour construire leur maison. » Plutôt que de contraindre, La Méaugon opte pour un principe de commercialisation à points, qui récompense celles et ceux choisissant de penser ou d'équiper leur maison de dispositifs bénéfiques pour l'environnement et le climat.

Un dispositif pensé avec l'ALEC du Pays de Saint-Brieuc

Pour construire son projet, la mairie se rapproche de l'Agence locale de l'énergie et du climat (ALEC) du pays de Saint-Brieuc, qui conseille les particuliers sur les questions énergétiques. « Ensemble, nous avons imaginé une grille autour de 7 thèmes, qui accorde des points en fonction de l'équipement installé ou de la structure choisie. » Avant même la conception de la maison, la grille accorde 3 points à chaque ménage qui prend rendez-vous avec l'ALEC et 15 points aux primo-accédants, cible privilégiée du lotissement. Aménagement extérieur, thermique, énergies renouvelables, structure du bâtiment, biodiversité sont les 5 autres items. Les acheteurs collectent 3 points avec l’installation d’une cuve de récupération d'eau de pluie de 1 000 litres, un dispositif de programmation du chauffage ou bien un test d'étanchéité intermédiaire à l'air, des options peu coûteuses. 15 points pour des panneaux ou un chauffe-eau solaire, une ossature bois, des équipements plus coûteux et même 40 points si l'on construit une maison passive. Au total, l'acheteur peut se voir restituer jusqu'à 8 500 euros, soit 17 % du prix moyen du terrain. « Ce montant permet de compenser l'installation d'une centrale photovoltaïque en autoconsommation par exemple », indique le maire.

Objectif atteint pour la sensibilisation

Tous les lots commercialisés trouvent preneurs en quelques mois : « Nous avons proposé un prix attractif de 110 euros du m² contre 170 euros pour des lotissements privés dans le secteur ». La SPL informe chaque acquéreur du dispositif de commercialisation à points : signature d'une convention, rétrocession du montant a posteriori, sur la base de factures ou d'attestations. Tous les acquéreurs sont entrés dans la démarche qui leur était proposée en prenant un premier rendez-vous avec l'ALEC. « L'objectif de sensibilisation et d'incitation est déjà atteint, se réjouit le maire. Cet accompagnement permet de se poser les bonnes questions avant de construire, sans démarche commerciale car l’ALEC est un interlocuteur neutre ». Plusieurs familles ont ainsi modifié le mode de chauffage prévu ou opté pour des équipements plus sobres sur le plan énergétique.

Un impact limité par la hausse du prix des matériaux

Alors que 7 des 23 maisons ont été livrées, la mairie peut commencer à dresser un premier bilan du dispositif. « Sur ces 7 projets, 3 sont très vertueux et 2 se sont vraiment enrichis avec la démarche, avec des reversements entre 4 000 et 8 000 euros. 2 malheureusement n'ont rien fait pour améliorer la qualité environnementale de leur projet. On est incitatif, on ne peut pas empêcher certains d'acquérir pour investir et revendre ensuite. » Le dispositif a aussi pâti de la hausse du coût des matériaux après le Covid : « Les devis ont explosé et certains primo-accédants n'ont pas pu opter pour autant de solutions écolos qu'ils l'auraient voulu. »

Et si c'était à refaire, faudrait-il changer quelque chose au dispositif ? « On aurait pu contraindre en inscrivant ces règles de construction dans le permis d'aménager. Mais quelqu'un de contraint adhère-t-il vraiment au dispositif ? En incitant, on peut faire passer beaucoup de choses : on crée une prise de conscience des acheteurs, c'est peut-être plus efficace à long terme », conclut le maire.