Des arbres et des vaches pour rafraîchir et relancer l’île d’Arz (56)
En 2011, l’Île d’Arz, commune du Golfe du Morbihan, lançait un appel d’offres pour ramener une activité agricole sur l’île. Treize ans plus tard, la commune a gagné des habitants et les espaces envahis de ronces ont laissé place à l’élevage, aux cultures de fruits et à de jeunes arbres.
Désireuse de relancer une activité agricole sur son territoire, la municipalité de l’Île d’Arz a amorcé en 2010 une démarche d’acquisition foncière. L’idée : devenir propriétaire de parcelles de taille suffisante pour favoriser l’installation d’une ferme, augmenter le nombre d’actifs sur l’île et entretenir le paysage. La réussite est telle que le projet s’est étoffé au fil des années.
Tout débute par l’achat d’une dizaine d’hectares par la commune. L’opération s’avère complexe, vu les nombreuses propriétés en indivision composées de petites bandes de terre. En 2011, la mairie lance son appel à projets pour installer une exploitation agricole. Elle reçoit une cinquantaine de dossiers, grâce à une diffusion de l’appel dans des médias nationaux. Accompagnée par la Chambre d’agriculture, elle sélectionne la candidature d’un couple d’agriculteurs orientés « bio », auxquels se sont associés par la suite deux nouveaux professionnels, dans le cadre d’un Groupement agricole d’exploitation en commun (Gaec).
Ce choix est décisif. Spécialisé dans l’élevage de vaches Pie noir et la transformation du lait en crème, fromages et crèmes glacées, le Gaec produit aussi des baies qu’il transforme en sorbets et confitures. Il vend ses produits sur place. La présence d’une cinquantaine d’animaux (veaux, génisses laitières et quelques bœufs) modifie le paysage. Servant de pâturages, les ronciers sont défrichés. D’autant que certains propriétaires privés ont, en plus, ouvert leurs propres parcelles pour offrir un pâturage aux animaux.
Un projet en entraîne un autre
En 2018, le Gaec se lance à son tour dans un projet : de l’agroforesterie impliquant à la fois la mairie et les riverains. « Cela ne génère pas d’activité économique, commente Clément Kouyoumdjian, conseiller municipal chargé de l’environnement et associé au sein du Gaec. Mais cela favorise la préservation des sols, limite l’érosion par le vent et la pluie... À terme, on espère plus de fertilité pour les sols, une production accrue et plus de biodiversité. » Durant l’hiver 2019-2020, 2 300 arbres ont ainsi été plantés. À terme, il s’agirait de planter quelque 4 000 arbres et arbustes.
Soutenu par les élus et des habitants de l’île, qui participent bénévolement aux plantations, ce projet suscite une dynamique. Si bien que la mairie s’est aussi engagée en 2021 dans un projet de reboisement via des chantiers participatifs menés dans le cadre de Breizh Biodiv, un fonds de la région Bretagne doté de 30 000 euros, destiné à replanter des arbres et lutter contre le recul du trait de côte.
« Sans le travail des élus en amont, il n’y aurait pas eu des porteurs de projet, insiste Clément Kouyoumdjian. L’investissement aurait été trop important, sachant qu’il y a des opportunités ailleurs, plus faciles d’accès. Pour l’équipe municipale de l’époque, cela a dû représenter environ cinq ans de travail. »
La démarche continue de porter des fruits. Trois nouveaux porteurs de projets agricoles se sont implantés sur l’île, grâce à de la mise à disposition de terres par des particuliers : un paysan boulanger, une paysanne brasseuse (dont l’objectif est de cultiver des céréales) et une cultivatrice de plantes aromatiques et médicinales. En parallèle de l’acquisition de parcelles, la commune a construit des bâtiments agricoles et un local de vente pour les producteurs de l’île. Le site est mutualisé entre les différents exploitants : Gaec, Paysan-brasseur, Paysan-boulanger. Pour l’île, l’arrivée des porteurs de projet signifie quatre familles supplémentaires et neuf enfants, soit près d’un tiers des effectifs de l’école. Autre impact non négligeable : cela a généré la création durant l’été d’un marché de producteurs, dont certains viennent du continent.
Les raisons du succès
Pour l’aider à enclencher ce cercle vertueux, la commune a bénéficié de financements via le projet alimentaire territorial (PAT) pour les études et pour les acquisitions foncières. De plus, la stratégie de la commune reste de préempter dès qu’une occasion se présente. Comme l’indique le site de la mairie , « en 2022-2023, la commune a acquis 13 hectares de terres, en plusieurs secteurs de l’île, permettant de conforter les installations agricoles. Les terres restent ainsi propriété de la commune qui les loue aux exploitants. Le coût total de l’opération est de 50 400,60 €, pour lequel le PAT interviendra financièrement à hauteur de 40 % pour les acquisitions parcellaires et 100 % pour les prestations intellectuelles. »
Au-delà des aspects financiers, « c’est beaucoup de communication, prévient Clément Kouyoumdjian. Il a fallu identifier les propriétaires, les contacter, les convaincre de la pertinence du projet et du sérieux des candidats retenus »… puis laisser la nature faire le reste !
Chiffres clés des installations agricoles sur l’île d’Arz
- 2010 : Rachat de parcelles par la municipalité en vue du projet de ferme
- 2011 : Appel à projets lancé par la commune de l’île d’Arz pour une installation agricole sur 30 hectares
- 2019 : Le Gaec est lauréat du concours Agriculteurs d’Avenir pour son projet d’agroforesterie intégré au programme Nature 2050. La 1re phase de plantation débute. Il obtient un financement de la Caisse des Dépôts (via le Fonds Biodiversité, mécénat)
- 2020 : deuxième phase de plantation
- 2021 : Plantation d’un verger de pommiers
- Jusqu’en 2050 : Plantation de 2 000 arbres en complément
Commune de l'Île d'Arz
Nombre d'habitants :
Clément Kouyoumdjian
Voir aussi
Pour aller plus loin
- L’agroforesterie du GAEC de l’île d’Arz, une fiche de présentation sur le site de l’Office français de la biodiversité
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