Bastia analyse sa structure commerciale pour lui redonner vie (2B)

Pour revitaliser les commerces du centre-ville, un binôme élu référent-développeur économique et commercial mène un travail de terrain sur plusieurs fronts : identifier les propriétaires de cellules vacantes, accompagner les porteurs de projet, favoriser l’installation de certains types d’activité…

Des rez-de-chaussée vides qui s’étendent, et éteignent un à un les commerces environnants : cette problématique, la municipalité de Bastia la connaît bien. Depuis longtemps, elle se pose dans le centre-ville. La vacance commerciale est aussi très présente et plus concentrée sur les artères commerciales. En septembre 2018, la signature du programme Action Cœur de ville « nous a poussés à mettre en place une politique offensive face à la vacance commerciale », résume Emmanuelle de Gentili, première adjointe au maire de Bastia et chargée de la restructuration urbaine. 

Première mesure phare : le recrutement, en octobre 2021, d’un « développeur économique et commercial » pour trois ans. Avec des missions diverses à la clé : aller au contact des porteurs de projet et des propriétaires de cellules vides, analyser finement la vacance, mais aussi créer un observatoire du commerce, afin de disposer d’une photographie précise, presque en temps réel, des activités commerciales à Bastia.

Trois secteurs surreprésentés

Un diagnostic fouillé est ainsi réalisé par le développeur entre mai 2022 et septembre 2023 sur 36 rues du centre-ville. Résultat : l’offre commerciale est déséquilibrée. 60 % des commerces représentent seulement trois secteurs : le prêt-à-porter, la restauration et les services marchands (comme les tabacs-journaux). 

Des actions sont alors mises en place et portent rapidement leurs fruits. Pour diversifier la typologie des commerces, le principe de « sous-destination » a été inscrit dans le nouveau PLU, actuellement en phase de consultation en vue d’une adoption en fin d’année. « Cette mesure forte permet à la ville d’interdire certains types de commerces, explique la première adjointe. Il y a déjà bon nombre d’opticiens et d’agents d’assurances dans les rues principales, il est donc inutile d’en faire venir d’autres, au risque de créer de la concurrence. » Illustration : le propriétaire d’une ancienne boutique de chaussures sur le boulevard Paoli était prêt à céder son local à un assureur ; la ville est alors intervenue pour lui proposer de rencontrer des porteurs de projets. C’est finalement une libraire jeunesse qui s’est installée.

Sur le boulevard Auguste-Gaudin, la municipalité a remis en état un local qui lui appartient avant de le louer à un porteur de projet. La sélection s’est faite via un appel à projet qui a recueilli 18 candidatures variées. Le projet sélectionné est une permanence médicale ouverte 6 jours sur 7 sans rendez-vous, dans ce quartier où vivent de nombreux seniors. À distance de ce futur cabinet médical se trouve un autre local de la ville, où, après des travaux de réfection, la Croix-Rouge s’est réinstallée dans des conditions plus favorables pour le personnel aussi bien que pour les clients, avec une boutique de vêtements de seconde main.

Prévenir plutôt que guérir

Au-delà de la lutte contre la vacance et de la diversification des enseignes, il faut aussi agir avant qu’il ne soit trop tard. Ainsi, un exploitant qui était à deux jours de rentrer en liquidation judiciaire a été mis en relation avec un acquéreur : celui-ci a créé une enseigne de vêtements et de chaussures sportswear dans le local qui s’apprêtait à fermer.

Emmanuelle de Gentili et Julien Torre, le développeur économique et commercial Action cœur de ville, réalisent régulièrement des « marches exploratoires » qui leur permettent de mettre au jour des difficultés particulières. Ainsi, certains lots commerciaux sans propriétaire ont été repérés dans des copropriétés. Dans le cas des successions non réglées, un premier travail a été amorcé avec les mandataires judiciaires.

Taxe et préemption de baux commerciaux à l’étude

L’observatoire du commerce de Bastia a été officialisé en janvier 2024. Des pistes de progrès restent à explorer. La ville réfléchit à de nouveaux outils : une taxe sur les friches commerciales ou encore un droit de préemption des fonds de commerces (et pas seulement des murs). « Nous allons lancer une étude pour définir la structure juridique la plus adaptée à une structure foncière de redynamisation : société d’économie mixte, société publique locale… », ajoute Emmanuelle de Gentili. La foncière pourrait préempter des locaux mais aussi reprendre les baux commerciaux : de quoi réguler les prix des fonds de commerce. La foncière pourrait également intervenir pour les points de tension qui échappent à l’initiative privée.

Pour l’élue de Bastia, l’initiative est reproductible dans d’autres territoires ; « mais il importe de maîtriser au maximum les informations sur la composition de la structure commerciale de la ville ». Un poste de développeur économique et commercial est recommandé, travaillant de préférence en binôme avec un élu référent, et placé dans une direction de projet.

Portrait en chiffres

Vacance commerciale à Bastia : 12 % en moyenne, avec des pointes à 14 % ponctuellement.

Le diagnostic initial a porté sur 36 rues et artères principales de l’hypercentre. 972 locaux identifiés en pied d’immeuble, dont 847 actifs et 125 vacants. 60 % des commerces représentaient seulement trois secteurs : le prêt-à-porter (36 %), la restauration (13 %) et les services marchands comme les tabacs-journaux (11,5 %). 

80 propriétaires de locaux identifiés et contactés par courrier en 2023.

47 propriétaires de commerces en activité contactés par courrier en 2023.

6 porteurs de projet installés entre juin et décembre 2023 (libraire jeunesse, vêtements seconde main, cabinet médical, artiste plasticienne, boutique de loisirs jeunesse, enseigne de chaussures).

En janvier 2024, 30 porteurs de projets étaient accompagnés par le développeur économique et commercial.

La Banque des Territoires a accordé plusieurs aides dans le cadre d’Action cœur de ville : cofinancement du poste de développeur (à hauteur de 40 000 euros) ; diagnostic sur les commerces (19 740 euros) ; étude sur le marché alimentaire (6 000 euros) ; une aide à venir pour l’étude de faisabilité de la foncière de redynamisation.

Commune de Bastia

Nombre d'habitants :

48768
avenue Pierre Giudicelli
20 600 Bastia
mairie@bastia.corsica

Emmanuelle De Gentili

Première adjointe au maire, en charge de la restructuration urbaine

Voir aussi

Découvrez nos newsletters

  • Localtis :
    Propose un décryptage des actualités des collectivités territoriales selon deux formules : édition quotidienne ou notre synthèse hebdomadaire sur l’actualité des politiques publiques.

  • Territoires Conseils :
    Recevez tous les quinze jours la liste de nos dernières publications et l'agenda de nos prochains rendez-vous.

S'abonner aux newsletters