Environnement - Espèces et habitats rares globalement mal en point en France
"La part des habitats et des espèces d'intérêt communautaire en état de bonne conservation en France est faible", avec seulement 22% des habitats et 28% des espèces jugés en bon état de conservation, indique le ministère de l'Ecologie dans une étude datée de décembre 2014 qu'il vient de mettre en ligne. Cette estimation est le résultat d'un minutieux travail coordonné par le Muséum national d'histoire naturelle portant sur la période 2007-2012. Il s'inscrit dans le cadre de la directive Habitats de 1992 qui prévoit que chaque Etat membre procède à ce type d'évaluation tous les six ans. Le territoire européen est ainsi partagé en 14 régions biogéographiques, dont 6 couvrent la France métropolitaine. Celle-ci compte 312 espèces et 132 habitats considérés comme rares ou menacés par l'Union européenne, rappelle le ministère. Le principal outil mis en place par la directive pour répondre à l'enjeu de conservation des habitats et espèces d'intérêt communautaire est le réseau européen d'espaces naturels "Natura 2000" qui couvrait, en avril 2013, 12,6% du territoire métropolitain et 12,2% des eaux métropolitaines sous juridiction française.
Selon l'étude, si "des tendances positives" sont perceptibles pour certaines espèces grâce aux mesures de protection dont elles bénéficient, "elles restent moins nombreuses que les tendances négatives". En règle générale, les forêts sont en bien meilleur état que les prairies et les landes, et surtout que les écosystèmes marins et aquatiques qui sont les plus dégradés.
La biodiversité mieux préservée dans les forêts
L'état de la biodiversité des forêts est jugé meilleur surtout grâce aux espèces (38% dans un état favorable), qui ont bénéficié de la loi de protection de la nature de 1976. Certaines chauves-souris, le loup, le lynx, le chat sauvage, la genette, la martre, le chamois, l'isard et le castor sont ainsi considérés dans "un état favorable". La loutre d'Europe, qui se nourrit de poissons, reste menacée en raison de la pollution des cours d'eau et l'assèchement des zones humides, mais la tendance la concernant est positive. Il y aurait aujourd'hui entre 1.000 et 2.000 loutres dans l'Hexagone, contre 50.000 au début du 20e siècle.
C'est dans la région alpine, qui englobe aussi bien les Alpes que les Pyrénées que les prairies, les landes et les fourrés sont les mieux conservées, avec comme conséquence une raréfaction, voire une disparition, des espèces dans certains lieux marqués par l'urbanisation ou l'agriculture intensive. Dans ces cas-là, les papillons constituent de bons indicateurs de l'évolution de la biodiversité. La région continentale et plus encore la région atlantique présentent les moins bons résultats – les deux tiers des espèces sont dans un état de conservation défavorable.
Les écosystèmes marins et aquatiques très dégradés
Parmi les écosystèmes marins, littoraux, humides et aquatiques, "les habitats côtiers méditerranéens ainsi que les habitats dunaires, quelle que soit leur situation biogéographique (aires alpine, méditerranéenne, atlantique et continentale) sont particulièrement touchés", indique le ministère en mettant en avant "la forte urbanisation des côtes et une fréquentation touristique localement élevée". A l'intérieur des terres, lacs, cours d'eau et zones humides sont très fragiles, tout comme les tourbières, marais et prairies humides. Une observation également valable pour les espèces aquatiques, surtout pour certaines espèces migratrices de poissons (saumon atlantique, lamproie, esturgeon d'Europe notamment), l'écrevisse à pieds blancs ou les mollusques vivant dans ces habitats aquatiques. "Les fortes pressions" liés à "l'aménagement des vallées alluviales, le drainage des zones humides et les modifications des milieux aquatiques" sont mises en cause.
Face à un tel constat, Denez L'Hostis, président de France Nature Environnement (FNE), estime qu'il faut notamment "voter au plus vite le projet de loi pour la biodiversité", "finaliser et mettre en oeuvre la trame verte et bleue" et "relancer la stratégie de création d'aires protégées avec des moyens humains et financiers accrus".