Environ 10 millions de personnes sans transport en commun près de leur domicile, selon une nouvelle étude

Près d'un Français sur cinq n'a pas de transports en commun à moins de dix minutes de marche de son domicile, selon une étude publiée ce 26 novembre par l'UFC-Que Choisir. Face à cette situation qui laisse de nombreux habitants sans alternative à la voiture, l'association lance une campagne appelant à une refonte de la politique de mobilité.

"Au quotidien, prenez les transports en commun", clame l’un des messages promotionnels qui doivent obligatoirement être présents dans toute publicité en faveur de véhicules terrestres à moteur, en vertu de la loi d’orientation des mobilités (LOM) de 2019. "Afin de mesurer à quel point ce message (…) reste un vœu pieux pour de nombreux consommateurs", l’UFC-Que Choisir a cartographié la réalité de l’accessibilité aux transports en commun en France métropolitaine, dans une étude publiée ce 26 novembre. 

L'association a utilisé pour cela des données très variées incluant le réseau de voies de transport pédestre et cyclable, la localisation démographique issue du recensement de l’INSEE (2019), et les points d’arrêts de transports en commun, provenant de sources telles qu’OpenStreetMap et de la base nationale dédiée, hébergée par transport.data.gouv (février 2024). "Cela a permis de calculer la part de la population ayant accès aux arrêts de transport en commun, en simulant un trajet de moins de dix minutes à pied ou à vélo pour chaque arrêt", indique l'association.

Les petites communes particulièrement carencées

L’étude révèle ainsi qu’environ 17% de la population métropolitaine – soit plus de 10 millions de personnes – n’a aucun accès aux transports en commun dans un rayon de 10 minutes de marche, 32% des communes ne disposant d’aucun arrêt de transports en commun. L'absence d’arrêts de bus ou de gares est particulièrement frappante dans les petites communes puisque 45% des communes de moins de 1.000 habitants ne disposent d’aucun arrêt de transports en commun, relève l'association.

Les départements comme le Gers, la Dordogne et la Lozère sont parmi les moins bien lotis, avec des taux d’inaccessibilité aux transports en commun dépassant les 60%. L'étude de l'UFC Que choisir note par ailleurs des disparités "étonnantes" d'un département à l'autre. Par exemple, dans les Deux-Sèvres le taux d’inaccessibilité aux transports en commun est de 19,6%, tandis qu'en Charente, un département à la population similaire et proche géographiquement, le taux est bien supérieur, avec près de 39% de la population sans accès aux transports en commun.

Le train inaccessible sans alternative à la voiture pour une grande majorité des habitants

Alors que les transports ferrés (trains, métros, tramways) sont structurants pour la mobilité collective, l'étude montre que 85,3% de la population française n’a pas de gare à moins de 10 minutes de marche. "Si les grandes villes comme Paris et Lyon sont bien desservies, de nombreux territoires ruraux mais également périurbains manquent de ce type d’infrastructures, rendant l’alternative ferroviaire inaccessible pour la grande majorité des Français", souligne l'UFC Que choisir.

Quant à l’accès aux transports ferrés à vélo, l'étude révèle que 53% de la population française se trouve à plus de 10 minutes à vélo d’une gare. "Les disparités observées subsistent donc entre l’Île-de-France et les grandes villes d’un côté et le reste de la France de l’autre, constate l'association Le potentiel de développement de l’intermodalité entre vélo et transports ferrés reste tout de même important, actuellement entaché par des infrastructures cyclables insuffisantes."

Un modèle de financement "qui aggrave les inégalités territoriales"

L'UFC-Que choisir pointe "un modèle de financement qui aggrave les inégalités territoriales".  "Le financement des transports publics dépend aujourd’hui en grande partie des contributions des entreprises locales, concentrées dans les grands centres urbains, analyse-t-elle. Cette inégalité de financement pénalise les territoires moins urbanisés, où les autorités locales de mobilité n’ont pas les moyens de développer des services publics de transport adaptés aux besoins des habitants." Selon elle, un "rééquilibrage" s’avère donc "indispensable pour garantir un accès équitable aux transports en commun sur l’ensemble du territoire".

Campagne de terrain pour alerter sur les "zones blanches de desserte"

Parallèlement à la publication de son étude, l’UFC-Que Choisir lance avec ses associations locales une campagne de terrain #LaMobilitéUnePriorité. L'objectif est de "sensibiliser et mobiliser les habitants de nos territoires au sujet des zones blanches de desserte auxquelles ils sont confrontés", met-elle en avant.

Dans ce cadre, l'association appelle à une "refonte de la politique de mobilité permettant le développement d’une mobilité durable et équitable". Elle réclame ainsi "des investissements ambitieux dans les réseaux de transports en commun pour assurer une offre de qualité au-delà des seules zones urbaines afin de réduire la dépendance à la voiture", "une refonte du financement des autorités organisatrices des mobilités locales (AOML) leur garantissant les ressources nécessaires pour le développement des transports en commun, en particulier en zones rurales et périurbaines, ainsi qu'"une révision des règles d’aménagement du territoire qui soit basée sur l’intégration des transports en commun aux décisions d’urbanisme, en lien avec les besoins de logement, pour favoriser une réelle inclusion territoriale.

En outre, pour "décrire encore plus finement" les réalités auxquelles sont confrontés [les habitants] sur l’accès aux transports en commun", l'association demande une "fiabilisation des données officielles de localisation des arrêts de transports en commun", avec une prise en compte des aspects qualitatifs de l’offre (fréquence, ponctualité…).