Sport - Encourager les pratiques sportives : les recettes du Centre d'analyse stratégique
Cibler les personnes les plus vulnérables, tenir compte de l'évolution des modes de vie et des disparités territoriales, préserver l'"espace de liberté" que constitue le sport de masse, tels sont les angles d'attaque prônés par la note n°217 d'avril 2011 du Centre d'analyse stratégique (CAS) consacrée à la pratique sportive et à l'activité physique.
Dans ce document, le CAS dresse d'abord un état des lieux : avec un taux de pratique sportive au moins hebdomadaire de 48% chez les plus de 15 ans, la France se situe dans la moyenne européenne. Cette activité se déroule pour 52% des Français en dehors d'infrastructures spécifiques, 23% pratiquant dans un club ou un centre sportif. La note conclut à une forte "individualisation de la pratique" et émet l'hypothèse d'une pratique organisée "jugée trop contraignante". Parallèlement, elle souligne qu'"en 2009, 15,5 millions de licences sportives ont été délivrées", un nombre qui "masque de fortes inégalités territoriales, socio-économiques et culturelles, d'âge et de genre". D'où une question centrale : "Comment inciter le plus grand nombre à pratiquer un sport ou une activité physique ?" Pour le CAS, "les politiques d'incitation doivent trouver le juste équilibre entre la promotion de l'offre d'équipements et de services, d'une part, et les actions relevant de la sensibilisation, c'est-à-dire celles qui jouent sur le développement de la demande, d'autre part".
Des équipements pour développer l'offre
Pour agir sur l'offre, les pouvoirs publics ont un rôle central à jouer en permettant l'accès aux équipements sportifs pour des pratiques non compétitives. Pour cela, "les travaux de recensement des équipements sportifs [actuellement en cours] devront faire l'objet d'une large diffusion. Ce sera l'occasion d'une réflexion visant à développer les partenariats existants entre l'Etat [via le Centre national de développement du sport, CNDS] et les collectivités locales […], voire à associer certains partenaires privés […]. Sur le plan local, cela pourra conduire à des 'rattrapages' en faveur de certains territoires moins bien dotés […]". (Lire l'encadré ci-dessous.)
Il faut ensuite faire évoluer l'offre des fédérations et des clubs. La note souligne en effet que "la tension entre la tradition compétitive et le développement du sport récréatif est une caractéristique du sport français". Alors que 7% des pratiquants seulement participeraient à des compétitions officielles, le CAS propose de développer dans les clubs "des activités non compétitives et une offre de service sportif pour tous les publics (notamment les seniors), […] en sensibilisant les bénévoles à cette dimension […], en assouplissant les horaires d'accès aux équipements".
La troisième proposition touche à l'aménagement de l'espace urbain. Il s'agit de rendre la ville plus accueillante aux pratiques sportives, en obligeant, par exemple, à la construction d'équipements sportifs ou de dispositifs d'incitation à l'activité physique dans les zones d'aménagement concerté (ZAC).
Du bien-être pour encourager la demande
Enfin, les trois dernières propositions se concentrent sur les leviers de la demande et mettent en avant le bien-être et la santé. Elles visent à encourager une communication incitant à la pratique d'une activité physique régulière privilégiant plaisir et bien-être ; à lancer un programme de définition des bonnes pratiques en médecine de ville permettant d'intégrer l'activité physique dans le traitement de certaines pathologies ; et à conduire, en lien avec les organisations patronales et syndicales, une étude relative aux bénéfices de l'activité sportive sur le bien-être et la santé des salariés en entreprise.
Le Centre d'analyse stratégique est une institution d'expertise et d'aide à la décision placée auprès du Premier ministre. Il a pour mission d'éclairer le gouvernement dans la définition et la mise en oeuvre de ses orientations stratégiques en matière économique, sociale, environnementale et technologique. A ce titre, il préfigure les principales réformes gouvernementales.
Jean Damien Lesay
Des diagnostics territoriaux au service de la stratégie
Lors de sa première rencontre avec les directeurs régionaux de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale (DRJSCS), les 1er et 2 décembre 2010, Chantal Jouanno, ministre des Sports, avait exprimé son souhait de faire de la France "une grande nation sportive", en s'appuyant notamment sur des diagnostics territoriaux approfondis (DTA), Une ambition réaffirmée lors de ses vœux à la presse, le 18 janvier 2011 : "Nos équipements ont été uniquement conçus dans une logique de compétition. Il faut inverser cette logique : d'abord les sportifs, ensuite les compétitions. […] Nous allons lancer un diagnostic de l'offre et surtout de la demande sportive à l'échelle nationale." Le 8 avril, les DTA étaient à nouveau à l'ordre du jour de la réunion des DRJSCS au ministère des Sports. Ces outils pourraient être les compléments logiques du recensement des équipements sportifs afin d'approfondir la réflexion, comme le prône le Centre d'analyse stratégique.
De son côté, la DRJSCS du Nord-Pas-de-Calais a mis en ligne une présentation du DTA sur son site internet (voir lien ci-contre). Elle rappelle qu'il s'agit d'"une démarche d'analyse de l'offre et de la demande sportive locale, impulsée par la DRJSCS et proposée aux collectivités" dont "l'objectif est d'aider un territoire à la prise de décision à travers une méthode concertée de diagnostic".
Le document détaille le rôle d'accompagnement de la DRJSCS auprès de la collectivité maître d'ouvrage et les étapes du DTA, notamment la sélection d'un organisme de conseils et d'expertise dans la sphère publique ou privée. Il insiste également sur le fait qu'"il s'agit de qualifier la demande sportive de la population" mais aussi de rechercher "l'expression des attentes des non-usagers".
Pour la DRJSCS du Nord-Pas-de-Calais, la réussite du DTA repose sur :
- La qualité du recueil de l'information de terrain et son analyse.
- Le souci d'un véritable travail en partenariat tout au long de la démarche.
- Un délai de réalisation court.
- La détermination collective à agir en s'appuyant sur les conclusions du diagnostic.