Logement social - Elections européennes : un manifeste du Cecodhas appelle à davantage de ressources pour le logement social
Le logement "adéquat et abordable" peut tout d'abord constituer un "levier pour l'emploi". Car là où il y a un stock de logements, l'activité économique est favorisée, observe le Cecodhas Housing Europe (Comité européen de coordination de l'habitat social) qui a publié le 2 avril, en amont des élections européennes, un manifeste détaillant neuf propositions.
Selon le Comité, l'Union européenne devrait livrer un stock suffisant de logements dans les zones à haute croissance économique pour y attirer les jeunes travailleurs. "En échange, nous [acteurs de l'habitat] pouvons utiliser la rénovation pour lutter contre le chômage", en mettant l'accent, lors des travaux, sur l'emploi local. "Il faut s'appuyer sur les bailleurs sociaux et leur lien avec les locataires qui sont au chômage, pour identifier les besoins en formation et les faire coïncider avec les besoins des chômeurs", explique Julien Dijol, coordinateur en charge des politiques publiques au Comité. Les bailleurs sociaux pourraient devenir des "partenaires" dans la mise en place de politiques de l'emploi en coopération avec les associations, mais pour ce faire ils devraient disposer de "moyens supplémentaires", poursuit-il.
Rénovation à bas prix : combler le "manque extrême" d'accès au financement
La coopération avec les associations avec "les bailleurs sociaux au centre" pourrait servir également la cause de la lutte contre l'exclusion et contre la précarité énergétique. Le Cecodhas relève en effet l'augmentation du nombre de personnes (migrants, sans-abris, personnes malades…) en situation de mal logement, et estime à 53 millions environ le nombre de personnes qui ne peuvent chauffer leur logement de manière adéquate et à 161 millions celles qui font face à des dépenses "disproportionnées" pour la maison. Il déplore en outre le "manque extrême d'accès au financement pour [procéder à] une rénovation à bas prix et sobre en carbone, ainsi qu'un manque d'infrastructures".
Le Cecodhas appelle par ailleurs à soutenir "la reprise dans les pays les plus frappés par la crise" afin qu'ils puissent accéder plus facilement aux fonds européens liés aux projets (souvent inaccessibles aux pays en difficulté financière du fait que les projets doivent à la base être financés par les pays porteurs).
Davantage de prêts de la Banque d'investissement européenne
La quatrième proposition invite d'ailleurs à "augmenter le soutien public pour fournir des logements adéquats et abordables". "Nous souhaitons que l'on augmente les prêts pour le logement de la Banque d'investissement européenne, pour construire et rénover. Mais peut-on demander cela sans une politique européenne du logement ? Nous pensons que oui, et que c'est dans l'intérêt de l'Europe de soutenir le logement social, car il fait partie de la notion de solidarité", précise Julien Dijol.
La définition des conditions pour bénéficier d'un tel logement resterait cependant l'apanage des États membres. "Cela n'empêche pas qu'il y a des règles européennes à respecter, des conditions de prêt communes", précise-t-il.
Autre solution évoquée : faire évoluer le cadre réglementaire pour "déverrouiller l'accès aux marchés [financiers] pour les infrastructures sociales", afin de combler leur besoin de financements.
Le manifeste du Cecodhas préconise aussi d' "assurer un environnement positif pour la rénovation de logements". "La rénovation dans le résidentiel a un potentiel important, mais pour rénover il faut des sommes que personne ne peut mettre sur la table : il faut donc développer les interactions avec des acteurs du marché qui trouvent un intérêt" à participer à de tels projets, explique Julien Dijol, en citant l'exemple des projets en tiers-investisseur.
Anticiper les futures bulles immobilières
Le Cecodhas recommande une "approche plus large, une façon plus flexible de voir la compensation pour obligation de service public" opérée par les États aux fournisseurs de services d'intérêt général, explique Julien Dijol. L'objectif étant que "davantage de monde puisse avoir accès à cette compensation, car il n'y a pas les mêmes critères pour définir le service public selon les zones", détaille-t-il.
Il est aussi proposé d' "assurer une surveillance économique plus équilibrée, dans l'Union européenne, vis-à-vis des marchés immobiliers". "Il faut s'assurer que l'Union européenne regarde non seulement l'évolution des prix dans le marché immobilier, mais aussi le nombre de sans-abri, par exemple", indique Julien Dijol. Et le manifeste d'insister : "L'Union européenne devrait demander aux États membres de s'occuper maintenant du risque de nouvelles bulles immobilières", et ce "à travers des investissements à long terme dans des logements adéquats et abordables".
"On pourrait mener un projet de recherche sur l'impact des investissements sur le logement abordable", selon Julien Dijol. "C'est notre dernière proposition : imaginer de nouvelles approches innovantes pour tester les nouvelles mesures."