Social - Egalité hommes-femmes : l'expérimentation sur les pensions alimentaires va entrer en vigueur
Le Sénat et l'Assemblée nationale ont adopté définitivement, le 23 juillet après accord en commission mixte paritaire, le projet de loi pour "l'égalité réelle entre les femmes et les hommes". Ce texte un peu fourre-tout (voir notre article de ce jour) comporte notamment une disposition très attendue : le lancement à grande échelle d'une expérimentation visant à mieux protéger les femmes seules confrontées à des impayés de pensions alimentaires, en créant progressivement une garantie publique contre ces derniers. Ce dispositif doit permettre, à terme, d'améliorer la situation de nombreux parents isolés - essentiellement des mères -, dont toutes les études montrent qu'ils sont aujourd'hui l'une des catégories les plus fragilisées.
Un droit à une pension alimentaire minimale
Cette expérimentation s'appliquera aux bénéficiaires de l'allocation de soutien familial (ASF) et aux bénéficiaires de l'aide au recouvrement, résidant dans les départements expérimentateurs, aujourd'hui au nombre d'une vingtaine (voir notre article ci-contre du 12 février 2014). Si les femmes concernées doivent ainsi résider dans l'un des départements participant à la phase d'expérimentation, les débiteurs de pensions alimentaires pourront en revanche être sollicités quel que soit leur lieu de résidence.
L'article adopté par le Parlement prévoit plusieurs dispositions. Ainsi il indique qu'un décret viendra préciser "les conditions dans lesquelles le parent est considéré comme hors d'état de faire face à son obligation d'entretien ou au versement d'une pension alimentaire mise à sa charge par décision de justice". De même, il procède à plusieurs dérogations au Code de la sécurité sociale, afin d'instaurer des mesures plus favorables. Il met notamment en place une procédure de paiement direct, assurée par l'organisme débiteur des prestations familiales (CAF ou caisse de MSA). Ce dernier se charge ensuite de procéder au recouvrement de la créance auprès du débiteur défaillant.
Il prévoit aussi "d'ouvrir le droit à l'allocation différentielle de soutien familial au parent dont la créance alimentaire pour enfants est inférieure au montant de l'allocation de soutien familial, même lorsque le débiteur s'acquitte intégralement du paiement de ladite créance. Dans ce cas, l'allocation différentielle versée n'est pas recouvrée et reste acquise à l'allocataire". Dans ce cas de figure - qui crée de fait un droit à une pension alimentaire minimale -, cette allocation différentielle est à la charge de la branche Famille et est servie selon les mêmes règles que l'allocation de soutien familial.
Généralisation prévue pour 2016
La durée de l'expérimentation est fixée à 18 mois, à compter de la publication de l'arrêté fixant la liste des départements expérimentateurs, qui doit intervenir au plus tard le 1er octobre 2014. La loi prévoit la production d'un rapport d'évaluation au plus tard neuf mois avant le terme de l'expérimentation. Sont annexés à ce rapport une évolution comparée du taux de recouvrement de l'ensemble des CAF selon qu'elles participent ou non à l'expérimentation, ainsi qu'un diagnostic des disparités entre caisses. La généralisation de la mesure, à compter de 2016, ne fait toutefois guère de doutes. Pour mémoire, les CAF recouvrent aujourd'hui environ 15 millions d'euros sur 75 millions de créances à recouvrer.
Le lancement de cette expérimentation avait été très largement anticipé, puisque les départements participants sont connus depuis le mois de février (voir notre article ci-contre du 12 février 2014) : Ain, Aube, Charente, Corrèze, Côtes-d'Armor, Finistère, Haute-Garonne, Hérault, Indre-et-Loire, Loire-Atlantique, Haute-Marne, Meurthe-et-Moselle, Morbihan, Nord, Rhône, Saône-et-Loire, Paris, Seine-et-Marne, Territoire de Belfort et la Réunion. Le ministère des Droits des femmes a également mis en place, à la même date, un simulateur de pensions alimentaires. L'expérimentation devrait donc pouvoir se déployer rapidement.
Jean-Noël Escudié / PCA
Référence : projet de loi pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes (adopté, après accord en CMP, par le Sénat et l'Assemblée nationale le 23 juillet 2014).