Congrès des maires – Efficacité énergétique : "trop" et en même temps "pas assez" d’aides ?
Au congrès des maires, le point info consacré ce 22 novembre à l’efficacité énergétique des bâtiments a donné lieu à de nombreuses critiques à l'encontre du dispositif d’aides de l’État, jugé par la salle "complexe" et "manquant de transparence" . Si les échanges ont permis d’éclaircir certains points, le saupoudrage et la territorialisation de leur attribution dans le cadre du fonds vert sont implicitement déplorées.
Et si à l'avenir les points infos du congrès des maires se tenaient à rebours ? Pour l'heure, le déroulé, immuable, veut que représentants de l'État, de l'AMF, d'associations enchaînent les présentations avant que la parole ne soit donnée à la salle. Le point info consacré à l'efficacité énergétique des bâtiment ce 22 novembre en a fourni une nouvelle illustration.
Trop de guichets tue le guichet
Alors que tout semblait sur les rails, les interventions de la salle vinrent quelque peu troubler le la tonalité positive ambiante. "Il faut un GPS pour se retrouver dans vos dispositifs !", tance ainsi une élue. Qui n'en souligne pas moins qu'il reste des trous dans la raquette : "L'Ademe ne finance pas les bâtiments passifs", déplore-t-elle. Simon Huffeteau, coordinateur interministériel du plan rénovation énergétique des bâtiments, en convenait d'emblée : "Notre volonté est de simplifier les dispositifs et d'améliorer leur coordination". Évoquant "10, 20, 30, 40… guichets", il met en avant la volonté de "clarifier par où commencer", avec l'institutionnalisation "d'un binôme comme point d'entrée : le sous-préfet et le cadre de la DDT". Reste que les élus semblent les premiers à demander de nouveaux dispositifs, regrettant ici que toutes les crèches ne soient pas éligibles, là que les constructions neuves soient exclues d’EduRenov, dispositif par ailleurs salué, "alors que parfois l’école est en trop mauvais état pour pouvoir être rénovée".
Inexorablement, les programmes semblent aller croissant, avec l'objectif louable de combler les trous précédemment regrettés. Dans le cadre de son programme Actee, la FNCCR espère ainsi lancer l'an prochain un nouveau sous-programme dédié à la rénovation des bâtiments patrimoniaux. "Si quelqu'un a déjà eu une expérience positive avec les architectes des bâtiments de France, serait-il possible de me la faire remonter ?", demande au passage à la salle Guillaume Perrin, coordinateur national du programme. Avec pour toute réponse point de main levée, mais quelques sourires narquois.
Des aides nombreuses, mais pas toujours cumulables
Pour être nombreuses, les aides n'en sont pour autant pas toujours cumulables. Un élu déplore ainsi que son projet ne puisse bénéficier "que de la DETR, ou que du fonds vert, mais pas des deux". "Il n'y a aucune règle interdisant ce cumul. On a même fait passer le message aux préfets qu'il était possible. Mais ces derniers ont pu arrêter un certain nombre de règles locales supplémentaires", explique Simon Huffeteau. "Où est l'égalité ?", murmure-t-on dans la salle. Prouvant que si en théorie déconcentration comme décentralisation comptent de nombreux partisans, en pratique les différences qu'elles entraînent sur le terrain continuent de heurter.
Un taux d'aide insuffisant
Dans la même veine, est déploré le taux d'aide finalement accordé, jugé insuffisant. "On a fait tout ce que l'on nous a demandé pour cocher toutes les cases : économie et production d'énergie, renaturation de la cour d'école, économie de la ressource en eau..., ce qui renchérit le coût du projet – 1 million d'euros pour une commune de 1.250 habitants ! Au final, on nous annonce une aide à hauteur de 20%. Mais à 20%, cela ne passe plus !" s'alarme un maire. Là-encore, Simon Huffeteau rappelle que "c'est le préfet qui détermine les taux de subvention du fonds vert" et qu' "il n'y a pas de règle nationale définie". Il aurait également pu rappeler que la volonté initiale de ce fonds était de le rendre accessible à toutes les communes, en sortant de la logique d'appel à projets qui favorisent les "grands projets" (voir notre article du 14 septembre 2022 — objectif qui ne serait parfois pas atteint : voir notre article du 22 novembre), ce qui peut induire le risque d'un saupoudrage. Faute de pouvoir donner beaucoup à beaucoup, il faut choisir entre donner peu à beaucoup, ou beaucoup à peu.
En pratique, l'élu n'entrevoit qu'une solution : saucissonner le projet, la mort dans l'âme. Une issue d'autant plus ubuesque que dans le point info suivant consacré au budget vert (voir notre article du 22 novembre), le chef du service des gestions publiques locales de la DGFiP, Guillaume Robert, déplore de la part des élus locaux "des décisions séquentielles qui entraînent des surcoûts" et souligne que "la bonne solution est de tout inclure dès le départ".
Manque de transparence
Parfois, c'est le choix même du projet qui heurte. Si Simon Huffeteau indique que "le message passé aux services instructeurs est de prioriser les projets les plus vertueux", un élu déplore qu'en pratique "le poids des élus locaux est plus important que le poids des projets". De manière générale, une plus grande transparence dans l'attribution du fonds vert est souhaitée. Christian Métairie, maire d'Arcueil et vice-président de l'AMF, plaide ainsi une nouvelle fois pour que des élus participent au choix des écoles à rénover, déplorant qu'il ne relève pour l'heure que du préfet et du Dasen (voir notre article du 14 septembre). Une vision contestée par Simon Huffeteau : "Non, les Dasen ne choisissent pas les écoles à rénover. Ils ont simplement leur mot à dire dans le cadre du fonds d'innovation pédagogique (voir notre article du 29 août 2022), mais pas au-delà. Ils n'interviennent nullement dans l'attribution du fonds vert ou de la DETR", assure-t-il.
On le sait, en 2024 le fonds vert verra sa dotation grossir de 500 millions d'euros, qui seront réservés à la rénovation des bâtiments scolaires (voir notre article du 14 septembre). Simon Huffeteau indique que quelques nouvelles règles s'appliqueront. Ainsi, le seuil d'éligibilité des projets est relevé au regard des gains énergétiques devant être engendrés par la rénovation : ils devront désormais être de 40%, et non plus 30%. Une dérogation est toutefois prévue pour les travaux visant exclusivement l'amélioration du confort d'été, qui deviennent éligibles. De même, les travaux visant à changer le système de chauffage ne seront plus éligibles dans le cas où le nouveau système serait "carboné". Le fonctionnaire confirme par ailleurs qu'une fois le projet éligible, les travaux de désamiantage, de déplombage ou encore de production d'énergie renouvelable peuvent également être financés par le dispositif. |