Environnement - Du Grenelle 1 au Grenelle 2 : place aux travaux pratiques
Près de deux ans après le Grenelle de l'environnement, la première loi traduisant ses engagements a été publiée au JO du 5 août. Définitivement adopté le 23 juillet 2009 à la quasi-unanimité - le PCF s'est abstenu et les Verts n'ont pas pris part au vote - au terme d'un véritable marathon parlementaire entamé en octobre 2008, ce texte fixe les grandes orientations de la France en matière de transport, d'énergie et d'habitat afin de préserver l'environnement.
Il cible en priorité la lutte contre le changement climatique et la division par quatre des émissions de gaz à effet de serre entre 1990 et 2050. Pour y parvenir, il impose notamment d'atteindre une part de 23% d'énergies renouvelables dans la consommation d'énergie finale en 2020 et une stricte maîtrise de celle-ci dans le bâtiment. Ainsi, à partir de 2012, les constructions neuves devront présenter une consommation d'énergie primaire inférieure au seuil de 50 kWh/m2/an. Dans le domaine des transports, la loi Grenelle 1 prévoit la construction de 2.000 km de lignes ferroviaires nouvelles à grande vitesse d'ici 2020 et la mise en place d'une "éco-redevance" pour les poids lourds à compter de 2011. Elle impose en outre un plus grand respect de l'environnement dans les politiques publiques : pour les décisions susceptibles d'incidence "significative" sur l'environnement, les procédures devront privilégier les solutions respectueuses de l'environnement, "en apportant la preuve qu'une décision plus favorable à l'environnement est impossible à un coût raisonnable". La loi prévoit aussi l'élaboration d'une "trame verte" - corridor écologique facilitant la circulation des espèces animales et végétales - qui devra être "prise en compte" dans les documents d'urbanisme et les schémas d'infrastructure. Elle retient également le principe de "compensation" de la perte de biodiversité visant à "rétablir les effectifs des espèces ou variétés menacées et les superficies des milieux auxquels il a été porté atteinte". Dans le domaine des déchets, le texte prévoit une réduction de la production d'ordures ménagères de 5 kg par personne et par an pendant cinq ans et une diminution de 15% d'ici 2012 de la quantité de déchets résiduels à incinérer ou stocker.
Avant d'être finalement avalisées, plusieurs mesures introduites par les parlementaires de la majorité ont suscité des remous. Cela a été le cas de celle prévoyant le lancement d'une étude gouvernementale sur l'autorisation de circulation de poids lourds jusqu'à 44 tonnes (contre 40 actuellement), de l'allègement des procédures de protection du patrimoine ou encore de l'exonération du chauffage électrique des nouvelles normes thermiques dans le bâtiment.
Taxe carbone et Grenelle 2 pour animer la rentrée
La contribution climat énergie ou taxe carbone inscrite elle aussi dans Grenelle 1 a également alimenté les débats en juillet. Le rapport remis par Michel Rocard, président de la commission des experts chargés de réfléchir aux conditions de sa mise en oeuvre, marque une première étape : il appartient maintenant aux pouvoirs publics de décider du sort de cette nouvelle taxe qui a déjà suscité de vives critiques de la part de responsables politiques, d'associations de consommateurs, de responsables syndicaux et patronaux et même de certaines associations écologistes. Entre l'impératif d'efficacité environnementale et le degré d'acceptabilité sociale, les arbitrages risquent donc d'être difficiles tant les écueils sont nombreux, surtout en période de crise économique.
La rentrée de septembre sera aussi largement marquée par l'examen du projet de loi Grenelle 2 au Sénat d'abord puis à l'Assemblée nationale. L'urgence a été déclarée sur ce texte très touffu (plus de 100 articles) qui est la déclinaison pratique du Grenelle 1. La discussion s'engagera donc sur la base du texte adopté début juillet par la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire du Sénat qui a consacré pas moins de 35 heures à l'examen de plus d'un millier d'amendements. Les débats en séance promettent d'être longs et animés car il s'agit cette fois d'un projet de loi à finalité opérationnelle. Ses conséquences pratiques seront importantes pour les collectivités. Du toilettage du Code de l'urbanisme aux transports en passant par l'extension des plans Climat territoriaux, la préservation de la ressource en eau, la lutte contre les multiples pollutions (air, sols, etc.) ou la réforme des enquêtes publique, ce projet de loi d'"engagement national pour l'environnement" prévoit des mesures ambitieuses. Il aura donc valeur de test décisif pour le passage à une société plus verte.
Anne Lenormand