Gestion forestière - Dominique Jarlier : "Renforcer le service public rendu par les forêts des collectivités"
Localtis : Porter la voix des communes forestières adhérant à cette association d'élus que vous présidez depuis le 25 octobre, est-ce une lourde responsabilité ?
Dominique Jarlier : J'en mesure l'importance et ferai fructifier, comme exprimé lors de mon élection au dernier congrès, l'acquis de Jean-Claude Monin qui présidait l'association depuis 2008. Celle-ci a beaucoup œuvré dans divers domaines, dont la mobilisation de la ressource qui reste une priorité. C'est une exigence économique, environnementale et territoriale. Renforcer les partenariats et développer les adhésions également, en se tournant vers les communes proches de forêts domaniales, vers les collectivités propriétaires de forêts, en progressant dans le quart nord-ouest, où il y a historiquement peu de forêts publiques, et en clarifiant les compétences dans les DOM et en Guyane. Nous poursuivrons aussi notre coopération avec le Québec. Et mettrons en ligne une boîte à outils pour aider les collectivités et leurs services dans leurs procédures, délibérations, formulaires et autres actes qui leur incombent dans le cadre de la gestion de la forêt communale. Pour les forêts privées, on parle toujours de morcellement mais rien n'est insoluble. Nous aiderons les élus à redéployer sur ces espaces une dynamique forestière et d'acquisition non pour étendre les forêts, mais pour les aménager et mobiliser du bois.
Quelles menaces planent sur le régime forestier dans les forêts des collectivités ?
La décision d'augmenter les frais de garderie et la taxe à l'hectare - retirée par le gouvernement suite à notre mobilisation et formulée sans concertation ni même information, alors que nous sommes cosignataires du contrat avec l’État et l'ONF - ne clôt pas l'affaire et l'objectif affiché reste une augmentation substantielle de la contribution des communes. Nous défendons le maintien à 2 euros de la taxe à l'hectare et des frais de garderie à 10% en zone de montagne et 12% en plaine. L'autre décision du gouvernement de mettre plus tôt un terme au contrat tripartite, un an avant l'échéance prévue, jette le trouble chez les maires de communes forestières mais nous avons accepté d'entamer dès maintenant la négociation, en vue d'un nouveau contrat signé au second semestre 2015.
Par où commencer pour redonner de la confiance, des couleurs, des perspectives au secteur ?
Cette négociation nous occupe pour l'instant quasi exclusivement. Elle doit se dérouler en toute transparence, entre tous les partenaires. Il nous faut travailler sur le contour des missions et prestations dues par l'ONF dans le cadre de la mise en œuvre du régime forestier. Nous n'instruirons pas davantage le procès de cet établissement public mais exigeons qu'il éclaircisse un problème récurrent, détermine et fasse connaître le coût de la gestion des forêts des collectivités. Ceci dit, nous connaissons les contraintes qui pèsent sur lui et l'aiderons dans la mesure du possible à remettre de l'ordre.
Une région comme l’Ile-de-France exploite peu son bois. Renforcer la filière bois, muscler son approvisionnement : cela fait-il partie de vos préoccupations ?
Bien sûr. Nous devons moderniser nos modes de vente, mieux nous regrouper pour gérer et vendre nos bois. Chaque maillon de la filière doit jouer son rôle. D'une région à l'autre, la diversité est de mise. Les communes forestières qui tirent de l'argent de leur bois sont peu nombreuses et plus dans le quart nord-est. Ces bénéfices dépendent de la superficie, des essences et résines présentes, de l'accessibilité. La tension sur les prix, l'inflation des coûts de gestion les ont réduits comme peau de chagrin. Mais les belles hêtraies et chênaies ont de la valeur. La Fédération a toujours défendu une hiérarchie des usages pour valoriser au mieux la structure du bois : en premier lieu le bois d’œuvre, puis le bois d'industrie et le bois énergie. Sur ce dernier, ONF Energie devrait se repositionner pour continuer à réguler le marché des plaquettes forestières, comme partenaire des grosses chaufferies, garantissant volumes et prix. Nombre de projets locaux de bois énergie ont dernièrement échoué dans le Limousin ou le sud du Massif central. Plus que l'approvisionnement, c'est leur rentabilité qui pose problème. Il faudrait mieux mobiliser le fonds Chaleur géré par l'Ademe, manifestement sous-utilisé et dont les moyens sont trop peu dédiés à l'animation, alors qu'il y a en biomasse forestière des besoins par exemple de chargés d'animation dans certains départements.