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Environnement - L'ONF défriche son prochain contrat d'objectifs

C'est dans un contexte houleux, marqué par la publication le 24 septembre d'un rapport de la Cour des comptes pointant la lente dérive de l'Office national des forêts (ONF), et la gestion déficitaire des forêts des collectivités, que Jean-Yves Caullet, président de l'Office, a tenu à faire un point le 30 septembre avec la presse. Alors que la renégociation du contrat d'objectifs entre l'Etat, l'ONF et les communes s'apprête à débuter, il n'est pas opposé à une refonte du système.

Le 30 septembre, le député socialiste de l'Yonne et président de l'ONF, Jean-Yves Caullet, a indiqué à la presse que la renégociation du contrat d'objectifs entre l'Etat, l'ONF et les communes allait débuter en fin d'année, en vue d'un contrat signé d'ici la mi-fin 2015. Le ministère de l'Agriculture a en effet choisi d'anticiper d'un an la fin du précédent contrat Etat-ONF 2012-2016 qui, pour rappel, avait été le premier du genre à être signé par les communes forestières. Mais sa préparation débute dans un cadre houleux. L'ONF vient en effet de perdre la dotation de 20 millions d'euros, dont il avait jusqu'alors bénéficié de la part de l'Etat et qu'il ne percevra pas en 2015. Est-ce indolore sur son budget de 900 millions d'euros ? "Ce sera absorbé par nos recettes en hausse du fait du maintien à un bon niveau du prix du bois", rassure Jean-Yves Caullet. Qui remet du bois dans le fourneau : ses pistes pour redorer le blason de la filière bois et redonner à l'occasion de ce prochain contrat de l'avenir à la forêt sont multiples, et d'ailleurs en partie piochées dans son propre rapport, encore frais puisqu'il n'a qu'un peu plus d'un an.

Une situation préoccupante

Reste que même si l'ancien préfet en a vu d'autres, il ne peut que sourciller devant les sévères conclusions de la Cour des comptes, qui a publié le 24 septembre un rapport mettant à jour les quatre activités déficitaires de l'Office et sa situation jugée "très préoccupante" sur ses exercices 2009 à 2012. Ainsi, le déficit de la gestion des forêts des collectivités s'est creusé, atteignant 20 millions d'euros. Dépendant des interventions de l'Etat (versement compensateur), sans qui dès 2012 il n'aurait été en mesure de payer ses agents, l'établissement a recours à l'emprunt et supporte des charges croissantes, dues en partie à l'augmentation des travaux forestiers. La Cour l'enjoint de respecter les objectifs de production en volume fixés par les autorités de tutelle et l'incite à revoir ses recrutements à l'aune de son statut d'Epic. Elle souligne que depuis 2003, le versement compensateur ne suffit même plus à équilibrer l'activité et que la contribution des communes (frais de garderie), calée sur la vente de bois, continue de creuser les écarts dès lors qu'"une commune qui ne souhaite pas vendre de bois ne paiera rien à l'Office et bénéficiera, néanmoins, de ses prestations". En clair, un dispositif qui ne sanctionne donc pas les collectivités disposant d'une forêt productive pas ou peu exploitée.

Se recentrer

En complément, la contribution à l'hectare créée en 2012 a malgré tout bien fonctionné et dégagé une recette nouvelle de 4,7 millions d'euros. Mais selon la Cour, "la direction du budget estime qu'il est sans doute temps de revoir ce partage de l'effort financier entre l'Etat et les collectivités locales". Et de se recentrer sur son cœur d'activités, en cédant ses filiales dont la Cour dresse un panorama étonnant : l'Office dispose en effet de filiales à l'étranger et investit selon les Sages dans des projets farfelus (camping, projet de téléphérique). Même ONF Energie n'a à leurs yeux peu de raison d'être. Le rapport tient néanmoins compte du poids croissant de l'opposition sociale à la récolte des arbres et des contraintes environnementales qui pèsent notamment sur les forêts des collectivités, dont près de la moitié présentent un enjeu écologique élevé.

Plus de souplesse

Face à cela, Jean-Yves Caullet explore de nouvelles pistes pour que le prochain contrat d'objectifs pose les bases d'une gestion plus juste et équilibrée des forêts des collectivités. Il milite pour "un système moins figé, plus adapté et incitatif en vue d'une meilleure mobilisation du bois". Egalement critique envers les frais de garderie, il accepte l'idée d'une remise à plat du système. Entre les divers ministères (Agriculture, Ecologie, Budget pour la fiscalité forestière) qui chapeautent le secteur, il espère voir émerger une meilleure dynamique interministérielle : "Pas seulement au niveau des arbitrages mais en amont dès les travaux de préparation. La forêt est rarement une préoccupation centrale. Sur le plan administratif, il y a beaucoup à faire pour qu'elle soit mieux incarnée. Nombre de conditions sont aujourd'hui réunies pour qu'elle fasse valoir ses enjeux." Et de faire écho au projet de "loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt" (Laaaf), adopté par le Parlement le 11 septembre, qui reprend certaines de ses propositions. Pour mettre davantage à contribution la forêt privée, la Laaaf a ainsi créé un fonds stratégique visant à stimuler les travaux forestiers et à offrir la possibilité aux propriétaires de se regrouper plus facilement pour exploiter leurs parcelles.

Régions et agences de l'eau

Enfin, l'ONF entame un rapprochement avec les agences de l'eau. "L'idée serait à terme de passer un contrat pluriannuel, ce qui serait nouveau." Et, sur la base d'un programme commun, préparé bassin par bassin, de flécher certains financements vers des travaux forestiers préservant la ressource en eau. Quant aux élections régionales de 2015, il estime qu'elles sont une opportunité car "la forêt, sous l'angle du développement économique ou de la formation, peut constituer pour une région un bon élément de programme".