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Finances locales - DMTO : une manne de 11,5 milliards pour les départements

Conséquence de la bonne santé de l'immobilier, les départements se partagent cette année 11,5 milliards d'euros de droits de mutation à titre onéreux (DMTO) perçus pour l'année 2017. Le montant a été communiqué mardi 17 avril au Comité des finances locales (CFL). Son président, André Laignel, a souligné "l'inégale répartition" de ces recettes, rendant indispensable le fonds de péréquation créé en 2011. Lors de la séance de l'instance, il a aussi été question du fonds de soutien au développement des activités périscolaires, de la répartition du produit des amendes de police ainsi que de la dotation d'intercommunalité.

L'embellie du marché immobilier s'est poursuivie en 2017. Selon la Fédération nationale de l'immobilier (Fnaim), 986.000 logements ont été vendus l'an dernier et les prix ont augmenté en moyenne de 4,2% par rapport à 2016. Ces bons résultats font l'affaire des départements. Au titre des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) qui assujettissent les ventes réalisées en 2017, ils touchent une manne de 11,5 milliards d'euros, selon des informations que la direction générale des collectivités locales (DGCL) a présentées ce 17 avril au Comité des finances locales (CFL). Cette somme est supérieure de 1,7 milliard d'euros au montant que les départements ont perçu pour 2016… et de 4,3 milliards d'euros par rapport à celui de 2013, année qui avait été noire pour l'immobilier. Les marges de manœuvre sur le taux des DMTO - que le gouvernement de Jean-Marc Ayrault avait accordées aux départements en 2013 et que la loi de finances pour 2015 a rendu pérennes - ont aussi contribué à la dynamique.
Mais le regain enregistré par les DMTO bénéficie très "inégalement" aux départements, comme l'a rappelé à la presse le président du CFL, André Laignel, à l'issue de la réunion. Après le versement de leur contribution au fonds national de péréquation des DMTO des départements mis en place en 2011, Paris et les Hauts-de-Seine bénéficient encore de sommes rondelettes, respectivement 1 milliard et un peu moins de 600 millions d'euros. Ce qui représente des montants par habitant de 437 et 366 euros (après mise en œuvre du dispositif de solidarité concernant les DMTO). Les Alpes-Maritimes prennent la troisième place (avec près de 296 euros par habitant), puis suivent le Var (248 euros) et la Gironde (230 euros). L'écart est considérable avec Mayotte, qui ne perçoit que 1,5 million d'euros de DMTO, de même qu'avec la Lozère, la Creuse et la Guyane, dont les recettes de DMTO sont comprises entre 5 et 9 millions d'euros.
Le fonds national de péréquation des DMTO contribue cependant à resserrer un peu les écarts. Ainsi, Mayotte percevra une attribution, au titre de ce fonds, de près de 44 millions d'euros, bien supérieure à celle de la Guyane (14 millions), ou encore aux versements dont bénéficient la Lozère et la Creuse (respectivement 5,5 et 6,2 millions d'euros).

DMTO : vers un mécanisme plus solidaire ?

Au total, le fonds de péréquation des DMTO des départements est doté cette année de 772 millions d'euros, soit 6,73% du montant de la taxe perçue par les départements. Jamais le fonds n'a atteint un tel niveau. L'an dernier, il s'était élevé à 630 millions d'euros. En tenant compte à la fois des prélèvements et des versements, c'est, au total, près d'un quart des départements (24) qui, cette année, contribuent à ce dispositif et les trois-quarts (76) qui en bénéficient. Mais les bénéficiaires ne percevront que 652 millions d'euros cette année, puisque le CFL a décidé, en accord avec l'Assemblée des départements de France (ADF), de mettre en réserve 120 millions d'euros, comme la loi l'y autorise. Cette épargne sera utilisée lors d'une éventuelle prochaine période de vaches maigres. Les présidents de département et les membres du comité se sont ainsi souvenus que les 120 millions d'euros mis de côté en 2012 ont permis, en débloquant cette somme les deux années suivantes (60 millions en 2013 et autant en 2014), d'amortir un peu, à ce moment-là, la contraction des DMTO.
En sachant que les départements qui profitent le plus de la manne immobilière ne font pas nécessairement partie de ceux dont les charges d'aide sociale sont les plus fortes, ne faudrait-il pas muscler le mécanisme de péréquation ? Lors de son audition le 21 mars par la commission des finances de l'Assemblée nationale, le sénateur Alain Richard, qui pilote la mission sur les finances locales, avait déclaré être favorable à une telle option, au grand dam de nombreux députés. La mise au point d'un mécanisme plus solidaire pourrait donc figurer dans les propositions que la mission remettra d'ici la fin du mois au Premier ministre. Auquel cas un débat vif sur la question semble prévisible, que ce soit entre présidents de département ou entre élus départementaux et majorité parlementaire.

Dotation d'intercommunalité : "Un système bloqué"

Au cours de la même réunion, le CFL a décidé "à l'unanimité" de mettre sur pied dès le mois prochain un groupe de travail qui fera des propositions de réforme de la dotation d'intercommunalité (près d'1,5 milliard d'euros en 2018) en vue du prochain projet de loi de finances. Avec les ponctions de ces dernières années sur cette dotation, l'application des dispositifs de garanties accordées aux communautés et les évolutions de la carte intercommunale, "le système" a fini par "se bloquer", a expliqué André Laignel. En précisant que "d'après les premiers chiffres de 2018", les communautés de communes à fiscalité unique ont "des difficultés pour pouvoir recevoir leur dotation".

Aide aux activités périscolaires : des communes rurales pénalisées ?

Le CFL a par ailleurs demandé au ministère de l'Education nationale de réécrire un projet de décret modifiant les modalités du fonds de soutien au développement des activités périscolaires, dont bénéficient les seules communes dans lesquelles les écoles maternelles et élémentaires ont conservé l'organisation des enseignements sur neuf demi-journées par semaine ou huit demi-journées par semaine comprenant cinq matinées.
Selon une enquête de l'Association des maires de France présentée en novembre dernier, ces communes-là devraient être minoritaires à la rentrée 2018. La modification de l'année de référence pour le calcul de la dotation allouée aux communes, telle que prévue par le projet de texte, a pour inconvénient de léser les communes qui, en 2018, ne perçoivent plus la part "cible" de la dotation de solidarité rurale (DSR) (elles seraient au nombre de 1.600) et dont les écoles continuent à appliquer les nouveaux rythmes scolaires mis en place sous le quinquennat de François Hollande. Les communes concernées pourraient perdre non seulement le bénéfice de la DSR cible, mais aussi la majoration de 40 euros par élève de l'aide aux activités périscolaires qui est accordée aux communes bénéficiant de la DSR cible, a pointé André Laignel. Le maire d'Issoudun a évoqué une "double peine".

Amendes de stationnement : une ressource stable en 2017

Le CFL a également adopté la répartition pour 2017 du produit des amendes de la circulation routière - ce qui inclut les amendes de stationnement - dressées en 2016. Une ressource qui s'élève à 626,7 millions d'euros. Les communes et les EPCI à fiscalité propre (ainsi que la région et le syndicat des transports en Ile-de-France) se partagent une ressource globalement en hausse de 3,27% par rapport à 2016. La valeur de point qui sert au calcul des dotations attribuées aux collectivités (soit directement, soit par le biais des conseils départementaux pour les communes de moins de 10.000 habitants) s'établit, en 2017, à 24,86 euros (en hausse de 0,18%).