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Insertion - Dix-huit départements déposent une proposition de loi pour expérimenter le revenu de base

Comme annoncé avant l'été (voir notre article ci-dessous du 7 juin 2018), 18 départements à majorité socialiste (*), menés par Jean-Luc Gleyze, le président du conseil départemental de la Gironde, ont présenté le 17 octobre une proposition de loi pour expérimenter le revenu de base. Les présidents de conseils départementaux n'étant pas parlementaires, la proposition de loi a été remise entre les mains de Valérie Rabault, présidente du groupe socialiste et apparentés à l'Assemblée nationale, et de Patrick Kanner, président du groupe socialiste et républicain du Sénat. À charge pour eux de déposer la proposition de loi sur les niches parlementaires du groupe.

Inconditionnalité, dégressivité et ouverture aux moins de 25 ans

Les promoteurs du projet ont rallié à leur cause cinq départements supplémentaires par rapport aux treize d'origine : les Alpes-de-Haute-Provence, le Finistère, l'Hérault, la Loire-Atlantique et le Lot. Les promoteurs du projet n'excluent pas non plus de proposer la démarche à d'autres groupes politiques au Parlement.
Sur le fond, la proposition reprend les modalités envisagées en juin dernier, lorsque les treize départements de départ s'étaient déclarés prêts à lancer l'expérimentation. On y retrouve notamment les trois principes de base du projet : l'inconditionnalité (à ne pas confondre avec le revenu universel), l'ouverture du revenu de base aux jeunes de moins de 25 ans (avec le choix d'ouvrir dès 18 ans et non 21 ans comme envisagé un temps) et la dégressivité en fonction des revenus d'activité afin de maintenir une incitation au travail.
En pratique, la proposition de loi laisse ouverts deux scénarios susceptibles de faire l'objet de l'expérimentation : une fusion du RSA et de la prime d'activité ou une fusion de ces deux prestations et de l'aide personnelle ou logement (APL). L'expérimentation se déroulerait dans les départements volontaires (les 18 porteurs du projet et, le cas échéant, d'autres territoires) et devrait couvrir 60.000 personnes pendant une période de trois ans, avant une évaluation et une généralisation éventuelle du revenu de base. Le montant de ce dernier serait au minimum de 550 euros dans le premier scénario et de 740 euros dans le second. Les promoteurs du projet estiment le surcoût annuel de l'expérimentation à 18 millions d'euros, par rapport au coût actuel des prestations fusionnées.

Des points de convergence avec la stratégie du gouvernement contre la pauvreté

Jusqu'à présent, le gouvernement n'a pas officiellement pris position sur l'expérimentation du revenu de base. Mais plusieurs éléments nouveaux, apparus depuis la présentation de juin dernier, pourraient faciliter la convergence. Certes, quelques-uns privent la proposition d'expérimentation de certains de ses arguments. C'est le cas, par exemple, de l'argument de l'automaticité de la prestation et de la lutte contre le non recours aux droits. La mise en place du prélèvement à la source, avec son dispositif de connaissance anticipée des revenus, devrait en principe y pourvoir.
En revanche, le principe et les modalités du revenu de base se rapprochent singulièrement de la fusion de certains prestations (dont le RSA, la prime d'activité et les APL) envisagée par la plan Pauvreté présenté récemment par Emmanuel Macron et Agnès Buzyn, et qui pourrait se concrétiser dans un "revenu universel d'activité" (voir notre article du 13 septembre). Il reste toutefois au moins une différence à surmonter : le projet de revenu de base prévoit une inconditionnalité de la prestation (même si un accompagnement social est envisagé), alors que le projet du gouvernement prévoit - comme le RSA actuel - l'inscription obligatoire dans un parcours d'insertion et l'interdiction de refuser plus de deux offres raisonnables d'emploi ou d'activité.
En attendant, et selon Jean-Luc Gleyze, l'expérimentation du revenu de base pourrait être discutée à l'Assemblée nationale à l'occasion d'une "niche" du groupe socialiste, le 17 janvier prochain, avant d'être examinée par le Sénat au printemps 2019.

(*) Alpes-de-Haute-Provence, Ardèche, Ariège, Aude, Dordogne, Finistère, Gers, Gironde, Haute-Garonne, Hérault, Ille-et-Vilaine, Landes, Loire-Atlantique, Lot, Lot-et-Garonne, Meurthe-et-Moselle, Nièvre et Seine-Saint-Denis.