Déserts médicaux : Emmanuel Macron juge les prochaines années "inquiétantes", une nouvelle proposition de loi rejetée
Lors de son déplacement dans la Creuse, le chef de l'État a estimé que la réponse au problème des déserts médicaux passe par "un cocktail de mesures sur les territoires", tandis que le président de l'Association des maires ruraux mise sur "des mesures coercitives"... et que la majorité parlementaire vient de rejeter une proposition de loi qui prévoyait une obligation transitoire de présence en zone sous-dense en fin d'internat.
Comme Localtis l'indiquait il y a quelques semaines (voir notre article du 13 décembre 2021), la question des déserts médicaux devient un thème phare de la campagne des présidentielles. Lors de son déplacement du 24 janvier à Bourganeuf (Creuse, 2.500 habitants), Emmanuel Macron a participé à une table ronde sur l'offre de soins en milieu rural. Le chef de l'État a largement repris les propos qu'il avait tenus, lors d'un déplacement dans l'Allier, au cours d'une séance de questions avec les auditeurs de France Bleu Pays d'Auvergne (voir notre article du 13 décembre 2021).
Il a ainsi qualifié la désertification médicale d'"inquiétante les prochaines années" et affirmé qu'"on reste confronté à une situation difficile, malgré le Ségur de la santé", qui a au demeurant peu porté sur la médecine ambulatoire. Comme l'Allier, la Creuse est particulièrement touchée par le phénomène, avec seulement 90 généralistes, souvent âgés, pour 117.000 habitants. Ce nombre enregistre en outre une baisse de 13% par rapport à 2017, sous l'effet des départs en retraite non remplacés. En matière de solutions rapides – la suppression du numérus clausus ne pouvant produire ses effets avant une dizaine d'années –, le chef de l'État n'a pas exclu des solutions plus contraignantes comme les stages obligatoires en cours ou en fin d'études médicales. Néanmoins, "on voit bien que la réponse est un cocktail de mesures sur les territoires pour restructurer une offre de soins, comme la maison de santé de Bourganeuf".
Interrogé le même jour sur France Info, Michel Fournier, président de l'AMRF (Association des maires ruraux de France) et maire de Les Voivres (Vosges, 300 habitants), estime que "ce gouvernement n'a pas osé prendre des mesures coercitives qui seraient nécessaires de manière à ce qu'il y ait une implantation beaucoup plus aménagée sur nos territoires". Le président de l'AMRF explique notamment que "dans l'agenda rural, il y a une mesure qui oblige normalement chaque interne à finaliser son cursus avec une présence pendant six mois ou un an dans des territoires ruraux, sauf que ça ne se fait pas. On demande simplement à ce que ce soit imposé".
Quelques jours plus tôt, le 20 janvier, l'Assemblée nationale a écarté une "proposition de loi d'urgence contre la désertification médicale", déposée par Guillaume Garot, député de la Mayenne, et ses collègues du groupe socialiste. Composé de seulement deux articles, ce texte prévoyait d'encadrer l'installation des médecins dans "les zones dans lesquelles le niveau de l'offre de soins est particulièrement élevé", déterminées par l'ARS, seul le remplacement d'un départ de médecin devenant alors possible. Le texte prévoyait également "une obligation exceptionnelle et transitoire" de présence en zone sous‑dense pour les internes de médecine au cours de leur dernière année d'internat, puis dans les deux années suivant l'obtention de leur diplôme. Sans surprise, les députés de la majorité ont rejeté cette proposition de loi, qui s'ajoute à la longue liste des propositions sur le même thème depuis plusieurs années.
À ce jour, aucun gouvernement (LR, PS ou LREM) n'a pris de mesures contraignantes sur l'installation de médecins, mesures qui risqueraient au demeurant d'accélérer la fuite, déjà très prononcée, des nouveaux diplômés devant l'exercice libéral. Des propositions de loi fleurissent en revanche lorsque ces partis se retrouvent dans l'opposition.